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Irak : Pour une loi consacrant l’égalité des sexes (2003)

mardi 25 mai 2004

Les femmes et les hommes doivent jouir des mêmes droits civiques et individuels

INTRODUCTION

Les femmes en Irak n’ont jamais bénéficié des mêmes droits que les hommes depuis la création de l’État irakien moderne. La Loi sur la famille (ou loi sur les affaires domestiques) adoptée à la fin des années 50 n’a pas su reconnaître officiellement l’égalité complète entre les genres. Violant ouvertement les droits et les libertés des femmes, le régime du Parti Baas, spécialement durant les dernières années de son règne, a supprimé certaines des lois adoptées à la suite de décennies de lutte des femmes. Les changements apportés ont entériné la polygamie et les « crimes d’honneur ».

L’État irakien est en train d’être reformé. Ses fondations juridiques, et ses institutions politiques et sociales sont en train d’être redéfinies. Etant l’organisation qui représente les revendications des femmes irakiennes, l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak s’oppose au Code de la famille en vigueur depuis 40 ans et à la loi islamique que le Conseil de gouvernement provisoire a adoptée lors de sa résolution 137 en janvier 2004. L’Organisation pour la liberté des femmes en Irak souhaite que la loi reconnaisse le principe d’une égalité totale et inconditionnelle entre les femmes et les hommes au sein de la famille et dans la gestion des affaires domestiques. L’Organisation pour la liberté des femmes en Irak lutte pour l’application immédiate d’une loi sur l’égalité des genres en Irak.

Principes généraux

La loi islamique (charia) et le Code de la famille inspiré de la charia sont fondées sur la soumission des femmes et les traitent comme des citoyennes de seconde classe. Ces lois légalisent ouvertement la violence et la discrimination contre les femmes, y compris leur assassinat. Pour atteindre l’égalité complète entre les femmes et les hommes, il faut que toutes ces lois soient supprimées et que les lois islamiques cessent de régenter la vie sociale. Les institutions publiques, l’Etat doivent éradiquer systématiquement toutes les traces et tous les effets de ces lois sur la société.

La loi sur l’égalité des genres s’applique à tous les citoyens, à tous les êtres humains quel que soit leur sexe. Elle doit être la loi officielle en Irak et devenir la source de tous les articles et clauses de la future Constitution.

C’est le devoir de l’Etat de former des commissions et des institutions spéciales pour surveiller l’application de la loi sur l’égalité des genres et de poursuivre tous ceux qui ne respectent pas les articles de la loi. Les articles de cette loi doivent s’appliquer à toute la population de l’Irak sans aucune exception.

Note : Tout amendement ou révision des articles de cette loi ne doit pas dévier des principes généraux et du cadre définis ci-dessus.

Article 1 : Le mariage

Section 1 : Définition du mariage Le mariage est issu d’un libre consentement entre deux adultes et vise à établir une relation fondée sur la cohabitation des époux.

Section 2 : Un simple enregistrement auprès d’un notaire ou l’établissement de papiers officiels préparés à cet effet suffisent pour que le mariage soit officiellement reconnu et protégé par les lois sur la famille, si les parties le souhaitent.

Section 3 : Le ta’addod zowjat (la polygamie islamique) est interdit. Aucun homme n’a le droit d’épouser plus d’une femme.

Section 4. Dans le cadre du mariage, toute forme de coercition est interdite sur les individus concernés, qu’elle soit exercée par une personne ou une autorité quelconque.

Section 5. Le mariage n’est autorisé qu’à partir de 16 ans, pas avant. Les mariages entre mineurs de moins de 16 ans sont interdits.

Section 6 : La religion, la nationalité, l’appartenance ethnique, la couleur de la peau, ou les opinions personnelles ne peuvent être invoquées pour empêcher un mariage, si les deux parties souhaitent s’unir.

Article II : Dissolution du mariage

Section 1 : Tout mariage fondé sur la coercition sera invalidé. Aucun individu, aucune institution n’a le droit de forcer un individu à se marier.

Section 2 : Un homme marié n’a pas le droit de se marier avec une autre femme. Tout mariage de ce type sera invalidé.

Section 3 : Tout mariage sera invalidé s’il enfreint l’article 1, les sections 2, 3, 4 et 5, et les contrevenants seront poursuivis.

Article III - Les droits et les obligations des hommes et des femmes dans la famille

Section 1 : Dans le cadre d’un mariage, toute transaction financière, notamment sous forme de clauses ou conditions préalables, est illégale et interdite. Dans la mesure où l’objectif du mariage est la cohabitation entre deux personnes, la gestion des affaires familiales est une obligation partagée entre les époux.

Section 2 : Les femmes et les hommes ont des droits égaux dans la gestion des affaires familiales.

Section 3 : L’homme et la femme sont propriétaires à égalité des biens et ressources de la famille.

Section 4 : Des condamnations sévères seront imposées aux hommes qui maltraitent leur femme.

Article IV : Séparation et divorce

Section 1 : Toute femme et tout homme a le droit de se séparer de son partenaire et de divorcer.

Section 2 : Les procédures de séparation doivent être examinées par un travailleur social deux mois avant que la séparation ne soit prononcée.

Section 3 : Toute femme a le droit de se remarier, au moment de son choix, après sa séparation ou la mort de son conjoint.

Section 4 : Les femmes et les hommes ont des droits égaux en ce qui concerne le choix du prénom et du nom de l’enfant, et peuvent décider de lui donner le nom de la mère ou du père.

Section 5 : En cas de désaccord entre les conjoints, l’enfant prendra le nom de la mère.

Section 6 : Les enfants nés hors mariage ou de parents inconnus peuvent être adoptés par d’autres adultes et prennent leur nom.

Section 7 : Tous les enfants dépourvus de famille ou privés de soins familiaux peuvent être placés sous la tutelle de l’Etat et garderont uniquement leur nom personnel.

Article V : Les soins apportés aux enfants et leur éducation

Section 1 : La femme et l’homme ont les mêmes droits et obligations concernant les soins apportés aux enfants et leur éducation.

Section 2 : En cas de séparation, la garde de l’enfant (ou des enfants) est confiée, après l’âge d’un an, à l’un ou l’autre des parents, une fois que l’on a examiné leur situation et leurs capacités à s’occuper de leur progéniture.

Section 3 : C’est un travailleur social qui prend la décision de confier la garde de l’enfant à l’un ou l’autre des parents après une séparation.

Section 4 : La décision d’avoir, ou ne pas avoir, un enfant appartient uniquement à la femme.

Article VI Dépenses pour les enfants

Section 1 : L’Etat est responsable des dépenses pour les enfants jusqu’à l’âge de 18 ans.

Article VII Héritage

Section 1 : L’Etat a la charge de diviser les biens de la personne décédée et de les répartir entre les membres de la famille en fonction de leur situation financière et de leurs revenus.

Section 2 : Les hommes et les femmes ont des droits égaux en matière d’héritage.

Section 3 : Les personnes qui ont le droit d’hériter sont, dans l’ordre d’importance, a) l’époux (l’épouse), b) les enfants et c) ceux qui sont prévus par le testament.

Section 4 : La division de l’héritage s’effectuera après le paiement des dettes éventuelles de la personne décédée.

Article VIII Code pénal

Section 1 : Toute personne qui en oblige une autre à choisir un partenaire, se marier ou se séparer sera poursuivie par la justice et condamnée.

Section 2 : Tout homme qui viole l’article 2, section 2, même avec l’accord de l’intéressée, sera poursuivi et condamné.

Section 3 : Tout viol sera l’objet de poursuites et d’une condamnation.

Section 4 : Tout meurtre sera l’objet de poursuites et d’une condamnation, que son auteur soit un homme ou une femme.

Section 5 : Les criminels seront poursuivis et condamnés, quel que soit leur sexe.

Section 6 : L’âge légal du consentement pour une relation sexuelle est de 15 ans, pour les hommes comme pour les femmes. Les relations sexuelles entre adultes (c’est-à-dire entre personnes âgées de plus de 15 ans) et les mineurs sont illégales, même si l’intéressé (e) mineur (e) est d’accord, et l’adulte sera poursuivi par la justice.

Section 7 : Aucun homme n’a le droit d’avoir une relation sexuelle avec une femme, sans le consentement de celle-ci, même s’il n’utilise pas la violence pour l’obtenir. S’il ne respecte pas la volonté de la femme, celle-ci pourra le poursuivre pour viol.

Section 8 : Les mauvais traitements des femmes, des petites filles et des jeunes filles sont interdits, qu’il s’agisse de coups, de menaces, d’humiliations, de restrictions de liberté ou de violences. Les contrevenants seront sévèrement punis.

Section 9 : Chaque femme est libre de s’habiller, de se maquiller, etc., comme elle le souhaite. Ces décisions relèvent de sa vie privée. Aucune personne, ni aucune autorité ne peut enfreindre ce droit.

Section 10 : Toute forme de ségrégation entre les hommes et les femmes dans un lieu public est interdite et les contrevenants seront poursuivis et condamnés.

L’Organisation pour la liberté des femmes en Irak se bat pour que ce projet de loi devienne la loi officielle dans tous les tribunaux d’Irak. Nous présentons ce projet de loi aux autorités irakiennes, aux femmes et à leurs organisations, aux institutions juridiques et judiciaires. Nous appelons toutes les femmes et tous les hommes épris de liberté en Irak, toutes les organisations de femmes et les forces politiques progressistes en Irak et à l’étranger à soutenir ce projet de loi.

Note : Ce projet de loi sur l’égalité hommes-femmes présenté par l’Organisation pour la liberté des femmes en Irak s’inspire d’un projet similaire adopté par l’Organisation indépendante des femmes le 29 octobre 1999 au Kurdistan irakien.

Organisation pour la liberté des femmes en Irak

(Article traduit par Ni patrie ni frontières et publié dans la brochure Femmes en Irak)

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