Ce texte est extrait de Mai 68, les grèves en France
IV - Le démontage
de la grève
Si le rejet de Grenelle marque de façon indiscutable la force du mouvement de grève, il n’en reste pas moins qu’il annonce aussi son déclin, même s’il faudra plus de trois semaines pour que le travail reprenne dans toutes les entreprises. Comme on vient de le dire, le mouvement cesse maintenant d’être national, et devient un ensemble de grèves d’entreprise ou de branche. Ce fractionnement de la négociation à venir est l’une des conditions de la défaite des grévistes.
La littérature que nous avons utilisée pour construire ce récit est beaucoup moins prolixe sur la fin de la grève que sur son début. Elle fait cependant suffisamment apparaître de nombreux point de résistance à la reprise du travail, et pas seulement dans la métallurgie avec les batailles de Flins et de Sochaux.
IV. 1 - Jusqu’à la Pentecôte (2-3 juin) : la grève continue
Le 27 mai, on assiste encore à des entrées en grève. C’est le cas pour la Batellerie de la Seine. Il y a aussi des reprises du travail, en province en particulier. Simultanément, des négociations ont lieu, en particulier dans certaines administrations ou entreprises publiques. C’est par exemple le cas des Charbonnages, où les négociations durent du 26 au 28 mai pour aboutir à des résultats plus favorables que ceux du protocole de Grenelle. De sorte que la reprise serait possible dès le 29, et certains le souhaitent. Mais la grève a, selon eux, été prolongée par le PC et la CGT, pour des raisons politiques, et ils trouvent les portes verrouillées (132).
Il y a en effet un durcissement partiel de la grève, et cela n’est pas contradictoire avec le mouvement général de son déclin. Car les quelques journées après Grenelle constituent une période de haute tension politique, où la gauche commence à croire qu’elle va pouvoir faire partir De Gaulle, et où la droite commence à craindre que son temps est en effet fini. Ce n’est pas l’objet de ce travail de retracer toutes les péripéties du jeu politique subtil qui va se dérouler. Mais quelques indications sont nécessaires.
Le lundi 27 a lieu le meeting de Charléty. Il rassemble l’Unef, la CFDT, la gauche non communiste et accueille très favorablement Mendès-France (qui cependant refuse de prendre la parole). Nous l’avons déjà évoqué. Le 28 mai, François Mitterrand se porte candidat à la présidence de la République et propose Mendès-France comme premier ministre. Le 29, le PC organise une grande manifestation pour rappeler à la gauche non communiste qu’il faut compter avec lui. C’est aussi ce jour-là que De Gaulle " disparaît ". En cachette de tout son gouvernement, il va voir le général Massu à Baden-Baden, en Allemagne. Cette visite impromptue pourrait avoir pour but de vérifier l’état d’esprit de l’armée (133). Massu remonte le moral à De Gaulle, qui doutait un peu de son destin, mais qui se sent mieux maintenant et va se reposer à Colombey, sa résidence personnelle dans la Haute-Marne. De là, il téléphone à Pompidou, son premier ministre, pour lui dire qu’il rentrera à Paris le lendemain et qu’il s’adressera au pays à la radio. Le 30 mai, dans un discours radiodiffusé, De Gaulle affirme avec force la légitimité de son pouvoir, renonce au référendum qu’il avait annoncé la semaine précédente, dissout le Parlement et annonce des élections et des réformes. Au même moment, une manifestation de la droite, prévue depuis quelques temps sur les Champs-Elysées, rencontre un succès inattendu, et populaire au moins en partie. 300 000 personnes (134) remontent l’avenue dans une mer tricolore. A partir du 31, la campagne électorale est lancée.
Revenons au mouvement des grèves. On a vu, dans le cas des Charbonnages, que les durs de la CGT ont poussé à la continuation de la grève bien qu’un accord favorable ait été conclu. D’autres éléments de durcissement de la grève apparaissent, notamment à EDF, où les premières coupures de courant du mouvement ont lieu les 27, 28 et 29 mai. Ces coupures sont surtout destinées à donner la mesure de la capacité de nuisance de la CGT et du PC aux partisans du projet Mitterrand-Mendès-France. De même, la grève se durcit dans l’imprimerie, et entrave comme par hasard l’impression des journaux de la CFDT. Le 29 également, une coupure de téléphone a lieu dans le secteur Trudaine, celui du siège de la CFDT. La CGT commence par prétendre qu’il s’agit d’un problème technique, mais renonce à envenimer les choses quand la CFDT propose d’envoyer une escouade de techniciens pour faire la réparation (135). On comprend donc qu’il faut prendre avec réserve ce prétendu regain de militantisme de la CGT.
D’ailleurs, dès l’annonce de la dissolution du Parlement, l’atmosphère change. De Gaulle et la droite reprennent clairement l’initiative, et la perspective des élections donne un prétexte au PC et à la CGT : les élections, et non plus la grève et les revendications, tel devient instantanément le combat qu’ils considèrent comme vraiment important. On a de la peine à croire qu’ils ne connaissent pas les analyses politiques qui montrent que le corps électoral est nettement plus conservateur que l’opinion publique en général, en raison de la sur-représentation de la province et des zones rurales et de la sous-représentation des jeunes. Et s’ils les connaissent en effet, leur pari est de reconduire plus ou moins le statu quo, avec leur rôle central dans une opposition maintenue à la marge de la modernisation capitaliste de la France. L’important est que les tendances nouvelles qui se sont manifestées pendant les semaines passées (la remise en cause explicite de la légitimité du PC, la contestation des bureaucraties syndicales par de jeunes ouvriers, la montée en puissance de la gauche non-communiste, et même le militantisme gauchiste, pourtant bien marginal) soient gommées par un retour à une vie politique " normale ". Dans Le Figaro du 4 juin, Raymond Aron commente : le gouvernement a eu raison de faire confiance au soutien du Parti car, " dans l’heure qui a suivi l’allocution du Président, il a désamorcé la bombe et consenti à des élections qu’il n’a guère l’espoir de gagner "Ê(136).
Le 31 mai, deux événements au moins marquent le retour à la normale et la position modérée des syndicats. Ce jour-là est un vendredi, et c’est la veille du week-end prolongé de la Pentecôte. Dans les chroniques des événements, on lit que c’est le jour où le gouvernement décide le retour de l’essence dans les stations-service. Comme si c’était lui qui avait bloqué la distribution du carburant. Sa décision, c’est bien sûr d’envoyer les CRS et l’armée " libérer " les dépôts d’essence. Cette décision est prise immédiatement après le discours de De Gaulle, le 30 au soir, de sorte que les pompes sont alimentées dès le 31 au matin. Dansette ne donne aucun détail sur la façon dont le gouvernement " obtient des camionneurs en grève qu’ils reprennent le travail " (137), et la CFDT, dans sa chronique du mouvement, se contente de mentionner le fait que " les CRS font partir des piquets de plusieurs dépôts d’essence " (138). Bref, le contrôle de l’essence n’a fait l’objet d’aucune résistance de la part des grévistes de ce secteur, ni d’aucune solidarité de la part du reste du mouvement.
D’autre part, le ministre des P et T commence à faire évacuer les bureaux de postes et les centraux téléphoniques dès le soir du 30 mai. La CFDT est aussi discrète là-dessus que sur la question des dépôts d’essence. Selon Rioux et Backmann (139), les syndicats conseillent aux grévistes de ne pas s’opposer à la police. A Rennes-Chèques, cela donne cependant lieu à des bagarres (140). A Paris-Chèques, à Paris Central et dans d’autres bureaux et centres de province, ce sont les Comités de défense de la République (CDR)* qui attaquent les grévistes. Dans tous les cas, la grève continue.
Le retour de l’essence est un coup politique. Par les embouteillages qu’il provoque, il manifeste le retour à la normale. Aux P et T, il s’agit plutôt d’un coup social - sous prétexte que les postes sont nécessaires pour organiser les élections annoncées, on tente de forcer la reprise du travail. Simultanément, le week-end de la Pentecôte voit se dérouler plusieurs négociations accélérées, dans l’idée d’une reprise généralisée du travail le mardi 4 juin.
En réalité, on va voir que le gouvernement et le PC auront beaucoup plus de peine que cela à faire reprendre le travail. Les coups de force aux P et T n’ont pas eu la même efficacité que pour les dépôts d’essence. Les facteurs ne reprennent pas le travail en masse, ni pendant le week-end ni le mardi matin. D’autres tentatives de faire reprendre par la force ont lieu. On signale le cas de la SNCF en Alsace, où la gare de Strasbourg est occupée par la police et où quelques trains sont remis en marche dans la nuit du samedi 1er au dimanche 2 juin. Ces trains sont arrêtés à Mulhouse, et la gare de Strasbourg est réoccupée par les grévistes.
IV. 2 - Après la Pentecôte : difficile reprise du travail
Certes, le mardi 4 juin, le climat est indéniablement à la reprise. Ce matin-là, le travail reprend en particulier à la Banque de France, dans les Charbonnages, à l’EDF et dans les arsenaux. Il reprend aussi dans de nombreuses PME où les smicards sont relativement nombreux - ils ont obtenu une substantielle hausse de salaire à Grenelle. Mais il y a de nombreux points de résistance, sur lesquels les syndicats vont user de multiples stratagèmes. Il y aura là pour eux 48 heures de rude activité, pour faire admettre à la base les résultats des négociations du week-end de la Pentecôte. Signalons quelques cas.
P et T : aux Postes et Télécommunications, les négociations entre le ministère de tutelle et les syndicats vont durer jusqu’au mardi 4 juin en fin de journée. Cependant, les dirigeants (pas les militants !) des syndicats de Paris recette principale appellent dès le 3 au soir à voter le 4 au matin sur la reprise. Cela donne lieu à une réunion houleuse où, sur les 600 travailleurs présents, 25 % seulement votent pour la reprise. François de Massot fait remarquer que les " pour " sont souvent du PC. Il existe dans la région parisienne un Comité régional de grève de la poste qui, depuis qu’il a été institué, essaie de lutter contre le cloisonnement de la grève par centre ou bureau. Le 4 juin à 17 heures, ce comité se réunit à la Bourse du travail. D’emblée, les dirigeants syndicaux annoncent que cette réunion est la dernière - impliquant donc que le travail reprend le lendemain matin. Ils rencontrent une telle opposition, y compris de la part de militants syndicaux, qu’ils sont contraints de convoquer une nouvelle réunion le lendemain. Cette fois, la réunion aura été mieux préparée, et profitera de plus de l’absence des militants anti-reprise de différents centres. Ils ne sont pas venus par découragement ou par crainte d’ouvrir un conflit dans leur syndicat. La reprise est donc votée. Cependant, le samedi 8 juin, la grève reprend dans les bureaux-gares de la région parisienne. Le gouvernement fait aussitôt de nouvelles concessions sur les conditions de travail (141).
RATP : la reprise des transports en commun dans la région parisienne est bien entendu un élément important d’une reprise générale du travail. On se souvient que l’entrée en grève des transports avait signifié une consolidation de la grève. Pendant le week-end de la Pentecôte, le gouvernement et les syndicats font donc avancer aussi vite que possible les négociations, qui aboutissent à un texte qui est soumis au personnel le dimanche 2 juin - donc en plein creux de la Pentecôte. Ce projet est pourtant rejeté, notamment parce que les concessions sont insuffisantes sur les jours de repos. Le personnel veut un système de roulement en 6/2 (6 jours de travail, 2 jours de repos). Le lundi 3 juin dans la soirée, les négociations ont un peu avancé sur la question des salaires et des roulements, et les syndicats pensent pouvoir présenter le nouveau texte au vote du personnel. Selon J.-F. Naudet (142), les progrès sont cependant minimes (de fait, le 6/2 attendra jusqu’en 1972, de même que les 40 heures, autre revendication centrale des grévistes de 1968). En tout cas, le vote sur la reprise se fait dans des conditions houleuses. Il se fait par attachement (terminus, dépôt, atelier), et ce sont les syndicats qui centralisent les résultats à la Bourse du travail, le 5 en fin de journée. Des travailleurs qui se méfient viennent assister au dépouillement des votes et cela donne lieu à des bagarres avec les gros bras de la CGT et à une confusion telle que le décompte ne pourra pas être fait à proprement parler (143).
On peut lire en annexe le récit des événements par des militants du CA-RATP. Il met en évidence la façon dont les syndicats ont joué sur le cloisonnement entre les différents attachements, faisant croire par exemple que le dépôt Lebrun a voté à 80 % pour la reprise du travail, alors que c’est à 80 % pour la poursuite de la grève (Lebrun est un dépôt particulièrement actif dans la grève). Il faut, dans tous les attachements, que les bureaucrates y aillent de tout leur poids pour faire reprendre le travail le jeudi 6 juin. Malgré cela, la reprise est si hésitante que les syndicats lancent, à midi, un ordre de reprise du travail qui est diffusé dans le réseaupar les moyens de la direction. De l’aveu même de Carprenet, responsable CGT parlant de Nation 2 et 6, " je me suis fais copieusement huer. J’ai même failli me prendre un poing sur la gueule, sauf qu’ils ont quand même repris le lendemain (144) ". Il en est visiblement fier. Il a pourtant fallu appeler les CRS pour faire évacuer le terminus Nation pendant la nuit du 6 au 7. On lit également, dans le témoignage du CA-RATP, comment les conditions scandaleuses de la reprise du travail ont amené certains militants à penser qu’un comité de base était possible à la RATP (145). La tentative en ce sens échoue cependant après que l’AG du 10 juin lance une tentative de reprise de la grève qui reste sans suite. Le vendredi 7, le trafic est donc rétabli.
SNCF : Les transports ferroviaires sont un autre point de passage obligé pour la reprise généralisée du travail. Comme dans les autres services publics, le week-end de la Pentecôte est consacré à la négociation non-stop. Le dimanche 2, le ministre de tutelle offre une enveloppe de 1,2 milliard de francs, contre une estimation des revendications syndicales à 2 milliards. Deux réunions tentent de concilier les points de vue le lundi 3. Dans un aparté avec la CGT, l’adjoint du directeur du personnel demande : " Combien vous faut-il pour reprendre ? La CGT répond 200 millions de francs, au chiqué. Du propre aveu du secrétaire fédéral, il aurait pu dire toute aussi bien 50 ou 500 millions. Après consultation du gouvernement, la direction donne son accord aux 200 millions, et la suite de la négociation se passera surtout... entre syndicats pour la répartition des 1 400 millions entre les différentes revendications (146). Un accord est donc finalisé à l’aube du mardi 4 juin. Il n’est pas signé par les centrales, mais un communiqué interfédéral appelle à la reprise immédiate - ce qui suscite de vives réactions à la base. De son côté, la CGT appelle à la reprise dès le 4 au soir.
Par rapport à d’autres corporations, les résultats sont appréciables. Les cheminots obtiennent notamment 10 % d’augmentation de salaire, 2 jours supplémentaires de congés payés, 1 h 30 de réduction du temps de travail.
Durant toute la journée du 5, les discussions se poursuivent à la base. Dans les bastions de la CGT, la reprise se passe sans problème. Ainsi à Achères où Massabiaux lui-même (le secrétaire fédéral) donne de sa personne. " Il n’y a pas eu de problème, on a défilé derrière le drapeau rouge descendu du château d’eau. " Mais en dépouillant les fiches de la CFDT sur les scrutins par établissement, G. Ribeill arrive à la conclusion que la majorité du personnel est contre la reprise du travail (147). Selon lui, l’opposition porte notamment sur la question du paiement des jours de grève. Elle est suffisamment forte pour que les centrales aillent chercher des assurances auprès de la direction. De quelle nature, on ne le sait pas. Mais elles donnent l’ordre de reprise en fin de journée du 5 juin, constatant que " les cheminots ont démocratiquement décidé, à la majorité des centres, la reprise du travail ". Ces votes par centre sont annoncés sur le telex interne de l’entreprise dès qu’ils sont positifs. Mais ils sont parfois refaits après un premier résultat négatif, comme au Mans, à Vierzon, à Orléans. A Lyon, le 5, un meeting grand messe est organisé pour conclure la grève. Le PCF s’y fait huer aux cris de " trahison " (148). Et cependant, dans la journée du 6, le trafic reprend de façon généralisée.
Sécurité sociale : le texte d’un accord est soumis par la CGT et la CFDT (149) au personnel le 4 juin. Sur les 16 000 personnes qui votent (42 % de participation) moins de 25 % sont en faveur de la reprise du travail. Le 6, les deux centrales donnent l’ordre " officiel " de la reprise. Mais la grève se poursuit dans certains centres jusqu’au 11 juin. D’après François de Massot, cela permet d’obtenir des améliorations sur l’accord initial, notamment par des augmentations de salaires plus importantes dans leur portion non hiérarchisée.
Enseignement : une réunion ministère-syndicats est convoquée le mardi 4 juin. Les négociations s’achèvent le 5. Le secrétaire général de la FEN se déclare " relativement satisfait ", mais la grève continue le 6 et le 7 dans l’enseignement secondaire. Les enseignants du second degré de la région parisienne, consultés dès le 5, se prononcent majoritairement pour la poursuite du mouvement. Dans l’enseignement primaire, le SNI* appelle à la reprise leÊ6. Il y a des protestations (dans le Nord, dans le Vaucluse et dans d’autres départements), mais un net mouvement de reprise se manifeste.
Beaucoup d’instituteurs et de professeurs du secondaire - souvent membres du courant Ecole émancipée de la FEN - ne sont pas satisfaits de leurs représentants syndicaux. Dans la région parisienne, ils obtiennent d’eux qu’un meeting d’explication soit tenu le samedi 8 à la Bourse du travail. 1 500 professeurss font le déplacement, mais aucun syndicaliste ne vient. Du coup, les enseignants se rendent rue Solferino, au siège de la FEN, qu’ils trouvent vide du moindre bureaucrate. Ils occupent brièvement les lieux et tirent un tract appelant à la poursuite de la grève et à un meeting le lundi 10. Celui-ci se tient en présence de plusieurs milliers d’enseignants, mais sans parvenir à empêcher la reprise du travail (150).
Divers : on signale d’autres difficultés de reprise, notamment dans les grands magasins. A Paris, des bagarres ont lieu et des lances à incendie sont utilisées par les grévistes des Galeries Lafayette pour empêcher les cadres de reprendre. Dans ce secteur, la CGT a donné l’ordre de la reprise dès le 4 juin, mais les personnels de la région parisienne ont voté la continuation de la grève. Il y a certainement de nombreuses autres situations conflictuelles analogues, mais c’est dans la métallurgie que les difficultés de la reprise vont être les plus grandes.
On voit donc que la reprise ne se fait pas toute seule. Certains auteurs, comme François de Massot, exagèrent cependant la portée de la résistance. Ils arguent de celle-ci pour accuser les syndicats d’avoir trahi une révolution possible. Il est vrai que les traficotages sur les votes, les rumeurs savamment distillées et les manipulations de toutes sortes sont nombreuses. Mais leur efficacité est à la mesure de la résignation et de la lassitude de la masse des grévistes. Dans le secteur public et nationalisé tout au moins, le gouvernement a fait un certain nombre de concessions pour favoriser la reprise du travail. Il espérait une reprise dès le mardi 4, et doit attendre jusqu’au jeudi ou au vendredi. Ce ne sont pas ces quelques jours qui font du mouvement de mai-juin 68 une révolution trahie par les bureaucrates - si tant est que cette notion ait le moindre sens.
IV-3 - Renault-Flins
Dans la métallurgie, le patronat adopte une attitude de combat et refuse de négocier au-delà du protocole de Grenelle. Est-ce pour cela que le gouvernement essaie de forcer la reprise chez Renault-Flins ?
Pendant le week-end de la Pentecôte, les cadres et la maîtrise de Flins ont fait des visites au domicile des ouvriers pour les encourager à affirmer leur " droit au travail ". Et le mardi 4 juin, la direction de Flins organise un vote, que les syndicats n’essaient d’empêcher que mollement, alors qu’ils se sont jusque-là systématiquement opposés à toute consultation des ouvriers par les patrons. Il faut une intervention des " gauchistes " pour attaquer les urnes et brûler les bulletins de vote déjà recueillis. Ce n’est qu’après ces incidents que les syndicats se prononcent pour la poursuite de la grève. Mais dans la nuit du 5 au 6 juin, la police renverse les grilles de l’usine, chasse les occupants et occupe le site. Cette usine a été choisie en raison de sa situation rurale. Jacques Baynac indique que " l’usine est occupée depuis les premières heures de la grève par des ouvriers souvent non syndiqués, parfois cédétistes, rarement cégétistes " (151). Ce peut être une autre raison de ce choix. La CFDT le pense (152). De toute façon, si l’organisation patronale, l’UIMM (Union des industries métallurgiques et minières) campe sur son refus de négocier, c’est aussi pour pousser le gouvernement à faire son travail de répression et obtenir ainsi une reprise du travail sans concession supplémentaire. On verra plus loin que, comme cette répression n’a pas l’efficacité escomptée, le gouvernement se retournera à son tour vers les patrons du secteur pour les contraindre à faire les concessions permettant la reprise.
Les ouvriers expulsés, l’usine est ouverte aux travailleurs sous la protection de la police. Même les cadres et les travailleurs immigrés (sur qui pèse toujours la menace de l’expulsion) refusent de reprendre le travail.
Dès la matinée du 6 juin, un premier meeting a lieu, qui réunit 2 000 à 3 000 personnes devant le député communiste du coin et le maire socialiste des Mureaux (ville limitrophe de Flins, à l’est). Dans l’après-midi, un second meeting réunit 5 000 personnes mais n’aboutit à aucune décision claire. Il s’achève dans la confusion et l’écœurement. Dans la nuit du 6 au 7, quelques centaines d’étudiants arrivent de Paris malgré la surveillance policière. Le matin du vendredi 7, ils participent au meeting convoqué initialement par les syndicats aux Mureaux, mais transféré à la place de l’Etoile d’Elisabethville (ville qui jouxte les usines Renault, à l’ouest) parce que c’est là que se trouvent la plupart des travailleurs. Il y a notamment Geismar, ex-secrétaire général du SNESup devenu militant maoïste. Il se tient tranquille dans l’assistance. La CGT dénonce la présence des étudiants, avertit contre les provocations. La veille, elle a publié un communiqué manifestant son " complet désaccord " avec l’initiative des étudiants et des professeurs de faire une marche sur Flins (153). Mais les auditeurs ne sont pas d’accord, et finissent par imposer Geismar à la tribune (154). Celui-ci y va très modestement d’un petit discours sur le thème " servir le peuple ", qui apparemment convient aux ouvriers. Quand le meeting se disperse et que des groupes remontent vers l’usine gardée par les CRS, ceux-ci attaquent sans prévenir. C’est le départ d’une série de combats extrêmement violents.
Pendant plusieurs jours, la police va mettre toute la région en coupe réglée. La répression est délibérément aveugle. Les flics s’attaquent aux ambulances, poursuivent les grévistes et les étudiants dans les jardins, dans les champs. Des hélicoptères les y aident. Il suffit d’être jeune pour se faire taper dessus. Et il suffit d’être immatriculé en dehors du département pour avoir ses pneus crevés. L’objectif est de terroriser la population, qui dans l’ensemble se tient coite, mais recueille parfois les fuyards et les cache. Le 10 juin, un groupe de gendarmes mobiles repère quelques jeunes en train de se reposer au bord de la Seine, sur la pointe d’île près du pont reliant Meulan aux Mureaux. La charge est délibérée, et les jeunes n’ont d’autre issue que de se jeter à l’eau. L’un d’eux, Gilles Tautin, 17 ans, militant de l’UJCML, se noie. Il n’y a que le récit de Christian Charrière pour signaler que trois gendarmes se dévêtent et se jettent à l’eau pour tenter de lui sauver la vie (155). Cela se passe en fin de journée. Dans la nuit, les forces de police se retirent de la région.
Le lundi 10 juin, la direction de Flins a convoqué les travailleurs à reprendre le travail. Il s’en présente quelques-uns. Les syndicats n’ont pas de peine à les convaincre de ne pas entrer dans l’usine. Mais le lendemain mardi 11, le travail reprend partiellement. Parmi ceux qui rentrent se trouvent les membres de la " CGT prolétarienne ", alias les maos. Dès qu’ils sont dans les lieux, ils reprennent l’occupation et hissent le drapeau rouge. Selon le récit qu’ils font de cette journée, les syndicats n’arrivent dans l’usine que dans l’après-midi. La CFDT cherchent à convaincre les grévistes d’évacuer. La CGT ne se mouille pas. Pour éviter que d’autres travailleurs ne rejoignent les grévistes, la direction proclame le lock-out. La police cerne l’usine où, en fin de journée, il ne reste qu’une " centaine de camarades résolus ". On suppose qu’ils quittent l’usine dans la nuit.
Le mercredi 12, les négociations s’amorcent au niveau de la RNUR (Régie nationale des usines Renault) dans son ensemble. Elles se terminent le 15, et les résultats en sont présentés aux travailleurs de la régie. FO publie, pour l’ensemble de la régie, une analyse négative des résultats. La CFDT titre son tract : " C’est insuffisant. " La CGT prolétarienne de Flins est également négative.
On comprend ces réactions en comparant les deux listes ci-dessous. La première est celle des revendications présentées aux ouvriers de Billancourt par A. Halbeher le 27 mai au matin, avant l’arrivée de Séguy, et sur laquelle il appelle à voter la poursuite de la grève. La deuxième est celle sur laquelle le même Halbeher appelle à voter la reprise du travail le 17 juin (156).
Revendications du 27 mai
paiement de tous les jours de grève
augmentation générale des salaires - pas de salaire inférieur à 1 000 F/mois
semaine de 40 heures payées 48
retraite à 60 ans
mensualisation de tout le personnel
élargissement des libertés syndicales à l’atelier
suppression des clauses anti-grève dans le paiement des primes
suppression des contrats provisoires pour les immigrés
Acquis du 17 juin s
paiement de 50 % des jours de grève
salaires augmentés de 10 % en 1968
réduction de la durée du travail de 1 h 30 par semaine
retraites : rien
mensualisation à 55 ans
droits syndicaux " étendus " à l’atelier
clauses anti-grève supprimées en partie. Prime trimestrielle payée
On peut ajouter que l’accord ne fait rien pour le resserrement de la hiérarchie des salaires. La CGT prolétarienne de Flins le souligne dans un tract comparant ce que " nous réclamions " " et ce que " le patron nous propose " (157). Bien sûr, la CGT de Flins trouve les résultats convenables et appelle à la reprise " dès demain ". Mais en même temps, elle appelle à " exiger dans chaque atelier la discussion du cahier de revendications, portant en particulier sur les questions de cadences et de conditions de travail " (158). Elle indique là qu’un point crucial n’a pas été résolu par la grève et la négociation. A Flins, le vote du 17 juin ne dégage qu’une majorité de 58 % pour la reprise. Sur 8 300 votants, ça fait quand même près de 3 500 insatisfaits (159). Aussi ne faut-il pas s’étonner que le 19, premier jour de travail, un débrayage ait lieu. Plusieurs travailleurs étrangers ont été licenciés pour avoir fait grève, et les cadences sont passées de 32 à 36 voitures à l’heure (160). Cet épisode est emblématiquedes causes de la grève et des problèmes qui resteront non résolus pendant encore des années.
IV. 4 - Peugeot-Sochaux
La résistance à la reprise du travail à Sochaux est encore plus flagrante qu’à Flins. Les négociations entre les syndicats et la direction commencentle31 mai. Elles ne donnent rien ce jour-là. Le lendemain, la direction fait des propositions légèrement améliorées. En vain. Le 4 juin, la direction organise un vote. Le comité de grève appelle à le boycotter. Il y a 42 % de participation, et 77 % de votes en faveur de la reprise du travail. Les syndicats considèrent que le vote est nul et non avenu (161). Ils en organisent un autre le samedi 8 juin. Il y a 5 279 votants (20 % de participation), et la majorité en faveur de la reprise est de 49 voix (162). Les trois syndicats sont d’accord pour trouver le vote probant. Ils mettent fin à l’occupation et quittent l’usine dans l’après-midi (163). Le lundi 10 juin à l’aube, les cars de la direction reprennent le ramassage et le travail reprend. Assez mollement il est vrai. Les ouvriers quittent leur poste pour discuter entre eux, et deux rumeurs se répandent bientôt : que les cadences vont augmenter et que la direction va imposer de travailler 17 samedis pour rattraper le retard. A 10 heures, la grève repart à la carrosserie. Des militants CFDT sont impliqués dans ce démarrage, qui fait très rapidement tache d’huile. A 15 heures, 10 000 ouvriers votent la grève avec occupation. Plusieurs centaines d’entre eux s’organisent pour la nuit.
L’ordre de faire évacuer l’usine aussitôt est donné de Paris. De son côté, la direction fait savoir par la radio que le travail reprendra le mardi, et qu’elle enverra les cars de ramassage. A 3 heures du matin, les CRS se présentent devant l’usine et demandent l’évacuation. Pendant ce temps, d’autres CRS sautent les murs par derrière et envahissent l’usine, qu’ils vident sans ménagement, avec une violence apparemment délibérée. A l’aube, les CRS occupent l’usine tandis que les ouvriers se retrouvent sur l’avenue d’Helvétie, qui partage l’usine en deux. Des barricades se dressent, les ouvriers entreprennent de reprendre l’usine, jettent des briques sur les CRS à l’intérieur. Ceux-ci sortent et la bataille fait rage jusqu’à la fin de la journée. Grévistes et non-grévistes arrivant par cars entiers s’unissent dans les bagarres. D’autres ouvriers les rejoignent. Des usines de la région débrayent. La bataille fait deux morts : Henri Blanchet, qui est soufflé par une grenade et se fracture le crâne en tombant d’un pont, et Pierre Beylot, qui est tué de trois balles par un gradé. La police est déchaînée et se livre à des exactions féroces. Elle est évacuée de la région vers 21 heures, et part en crevant les pneus des voitures et en balançant des grenades au hasard. Après son départ, les ouvriers envahissent le bâtiment qui lui servait de quartier général. Il s’agit du club-hôtel Peugeot, où se retrouvent habituellement les cadres et où la direction reçoit ses VIP.
L’endroit est mis à sac (164) (voir aussi Chez Peugeot, en juin 1968, une insurrection ouvrière peu connue.
Le mercredi 12 juin, l’usine reste fermée. Elle le reste jusqu’au 21, date de la reprise du travail. Pendant une semaine, la direction et les syndicats ne parviennent pas à s’entendre. Finalement, le 19 juin, et après intervention du gouvernement, un représentant du siège parisien arrive à Sochaux avec des propositions nouvelles. L’accord est obtenu en quelques heures.
IV. 5 - Reprise des derniers métallurgistes
Le gouvernement exerce la même pression sur Citroën. Comme celle de Peugeot, la direction de Citroën joue le pourrissement de la grève et considère que le contenu de Grenelle doit suffire. Un accord est finalement conclu, et les responsables CGT se présentent devant le personnel de Javel pour le défendre. Cela se passe le vendredi 21 juin. Mais ils trouvent dans le public du meeting une fraction suffisamment forte de jeunes ouvriers avec des pancartes en faveur de la poursuite de la grève pour conclure qu’il n’y a pas le quorum et qu’il vaut mieux reporter le vote. Celui-ci aura lieu le 24, donc après le premier tour des élections, et la reprise se fera le 25.
Les patrons de la métallurgie ont fait preuve de la même attitude que ceux de Peugeot et de Citroën. C’est donc dans ce secteur que se font les reprises les plus tardives. Les syndicats font tout ce qu’ils peuvent, mais les travailleurs y vont vraiment à reculons. On dispose du témoignage des contestataires communistes d’Hispano-Suiza (165). Dans la deuxième semaine de juin, la CGT fait d’abord admettre le principe du vote à bulletin secret. Elle convoque ensuite un scrutin où elle fait voter l’ensemble du personnel, y compris ceux qui n’ont pas participé activement à la grève et à l’occupation. Mais ce délayage ne suffit pas : il y a une majorité de voix pour la continuation du mouvement. Les syndicalistes proposent alors que la question de la reprise du travail soit rediscutée dans les sections syndicales respectives. La CGT organise aussitôt une assemblée de tous ses adhérents (la première de la grève). La réunion est houleuse, et les dirigeants doivent faire procéder à plusieurs votes avant d’obtenir une majorité pour la reprise du travail. Le lundi 17 juin, à l’assemblée générale du personnel, la CGT parle de reprise du travail, mais sous certaines conditions revendicatives - qu’elle abandonnera le lendemain. Le mardi 18, lors du dernier meeting de la grève, le leader CGT considère la reprise comme acquise et roule solennellement le drapeau rouge en disant qu’il resservira. Il appelle ensuite les travailleurs à rejoindre leur poste. Personne ne bouge. Il s’ensuit un moment de grande confusion. Certains rentrent dans l’usine, mais pour y reprendre leurs habitudes d’occupants. La plupart restent sur la place devant l’usine. La CGT doit faire donner l’alarme pour inciter ceux qui étaient rentrés à sortir de nouveau. Dès que c’est fait, les portes sont fermées sur une usine vide, sauf pour le leader syndical qui continue à parler dans la sono en demandant qu’on lui fasse confiance. Certains travailleurs pleurent. La reprise aura lieu le mercredi 19.
La Saviem reprend le vendredi 21, mais Usinor ne reprend que le 26. Chez Caterpillar à Grenoble et Paris-Rhône à Lyon et à Bourgoin(Isère), la reprise du travail intervient encore plus tard.
Epilogue
Depuis qu’ils ont commencé à faire pression en faveur de la reprise, c’est-à-dire depuis l’annonce de la dissolution du Parlement et la convocation des élections, la CGT et le PC n’ont cessé d’invoquer la " deuxième chance " des travailleurs. En élisant un Parlement de gauche, les travailleurs pourraient mettre au gouvernement des forces politiques qui corrigeraient facilement les imperfections des accords sur lesquels les syndicats appellent à la reprise. Par exemple, L’Humanité du 6 juin admet que " tout n’est pas réglé. Personne ne le contredira... Mais, en ayant, avec les autres grévistes, obligé le gouvernement à recourir à des élections, [les cheminots] se sont ménagé une nouvelle chance de voir garanti ce qu’ils viennent d’obtenir par la lutte. Cette deuxième chance ne doit pas être compromise " (166). L’Humanité elle-même avoue donc que les " victoires " des travailleurs n’ont rien d’assuré. S’il leur faut une deuxième chance, c’est probablement pour l’échelle mobile des salaires, ou pour la suppression du salaire au poste, ou pour le contrôle des cadences, etc.
En fait de deuxième chance, les élections produisent une majorité de droite comme on n’en n’a jamais vue. Et comme on l’a dit plus haut, les politologues du PC devaient savoir dès le départ que la deuxième chance était bien faible - ou alors ils faisaient mal leur boulot. Quoi qu’il en soit, les travailleurs, globalement, ont obéi. Selon François de Massot (167), ils votent en majorité pour " leurs partis de classe " et seuls 500 000 - surtout des électeurs du PCF - s’abstiennent. Cela fait environ 10 % de l’électorat traditionnel du PC, ou 5 % des grévistes.
Comment résumer tout ce que nous venons de voir sur le mouvement des grèves de mai-juin 1968 ? Nous avons observé un des arrêts de travail les plus massifs de l’histoire de la France industrielle, et il se solde par des résultats plutôt maigres. L’imagerie populaire de mai 68 est celle d’une période de tous les excès, d’une phase de folie sociale, et nous avons vu des ouvriers majoritairement passifs. On évoque les gauchistes de 68 comme de dangereux révolutionnaires, et l’on voit qu’ils n’ont qu’à peine entamé la lourde domination des appareils traditionnels. Et les différentes tendances n’ont pas fait mieux les unes que les autres ; ce n’est donc pas une question de politique juste ou fausse, léniniste ou ultra-gauche ou anarchiste. On compare les occupations de 1968 à celles de 1936, mais en fait les usines sont quasiment vides.
Et malgré la faible militance des grévistes, malgré le peu d’influence des éléments radicaux, la grève dure et le travail ne reprend pas facilement. Quand il reprend, c’est globalement sur une défaite des travailleurs. Il y a dans tout cela une sorte de paradoxe, entre la lourde affirmation d’une classe et son manque d’initiative, entre la force d’une grève et sa soumission à des appareils qui la trahissent même au niveau revendicatif élémentaire. Dans la deuxième partie de ce travail, nous essaierons d’expliquer ce paradoxe. Il faudra chercher dans les caractéristiques du changement d’époque que constitue la fin des années 1960 les raisons de cette configuration particulière du mouvement ouvrier.
Lire la suite Les grèves de mai-juin 68, éléments d’analyse
Mai 68 dans Echanges
ICO, puis Echanges, ont publié plusieurs textes sur Mai-68, qui donnent un aperçu assez complet du déroulement et de ce que nous pensons de ces événements devenus mythiques :
La Grève généralisée en France, mai-juin 1968 (analyses et témoignages), supplément à ICO n° 72, juin-juillet 1968. Réédition Spartacus, mai 2007, avec une préface inédite d’Henri Simon (10 €).
Bilan d’une adhésion au PCF, témoignage d’un militant de province en mai-juin 1968, ICO.
Chez Peugeot, en juin 1968, une insurrection ouvrière peu connue
Un témoignage sur la grande manifestation du 13 mai 1968
Sur demande aupès d’Echanges (echanges.mouvement@laposte.net) : photocopie d’articles parus dans ICO de l’époque (et non dans le supplément La Grève généralisée), rédigés par des participants d’ICO sur ce qui s’était passé dans leur entreprise en mai-juin 1968.
Et, sur les militants maos de l’après-1968 : Tentative de bilan du Comité de lutte Renault, de Baruch Zorobabel, ICO, 1972.