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Etats-Unis. Race et classe avant et après Ferguson

jeudi 19 mars 2015

Ce texte, paru dans Echanges n° 149 (hiver 2014-2015), est la transcription d’un entretien avec Loren Goldner, camarade américain, réalisé en décembre 2014 par l’émission «  Anábasis  », sur RadioK, radio libre d’Oviedo (Asturies) http://anabasis.radioqk.org/53-raza....

Sur Ferguson, lire aussi Ferguson, une semaine après...

Anábasis : Je crois que tu avais prévu de commencer par les événements actuels, suite aux assassinats de Ferguson, de New York.... par l’oppression policière en définitive ?

Comme la majorité de notre public le sait probablement déjà, ce mouvement a commencé au mois d’août [2014], dans la petite ville de Ferguson, banlieue de la ville de Saint-Louis, qui a déjà une histoire très intéressante  ; parce que, il y a trente ou quarante ans, Saint-Louis, comme beaucoup d’autres villes du Midwest, a connu une forte industrialisation. Mais la crise des années 1970 a entraîné une vague de fermetures d’usines, de restructurations... choses que vous connaissez très bien dans les Asturies. Et, naturellement, tout cela a transformé profondément la ville de Saint-Louis et les banlieues comme Ferguson, qui était une ville vraiment ouvrière à l’époque ; majorité d’ouvriers blancs, dois-je ajouter.

Avec la restructuration et le chômage permanent, peu à peu, Ferguson, comme beaucoup de petits villages des alentours, s’est transformé en une ville à forte proportion d’habitants noirs ; je ne connais pas exactement les chiffres, mais, pour vous donner un contexte plus général, on peut dire qu’aux Etats-Unis la police tue chaque semaine quelque part de deux à trois jeunes Noirs ou Latinos, dans divers types d’incidents. Bien sûr, c’est quelque chose qui concerne surtout les minorités raciales du pays ; la police ne tue pas de jeunes Blancs dans des situations semblables. Et cela arrive depuis des années. Encore une fois je ne connais pas les chiffres exacts mais, depuis les années 1960, en plus des milliers de jeunes qui sont passés par la prison (surtout suite à des incidents concernant les drogues), les morts de jeunes Noirs et Latinos doivent se compter par milliers – je dois ajouter que, aux Etats-Unis, un Latino c’est quelqu’un généralement hispanophone, avec quelques variantes : dans le Sud-Ouest on les appelle «  chicanos  », dans l’Est, où j’habite, le mot «  politiquement correct  » est Latino – et on inclut dans ce groupe non seulement les gens nés aux Etats-Unis depuis plusieurs générations, mais aussi les immigrés de Porto Rico, de Saint-Domingue, ainsi que ceux des autres îles des Caraïbes. En général, j’utiliserai le mot « Latino » pour faire référence à toute personne d’origine mexicaine, ou hispanophone.

En général ces incidents entre la police et les jeunes Noirs et Latinos ont eu lieu dans une situation, je ne dirais pas tolérée, mais de silence et de passivité sociale énorme, à part quelques exceptions. Je ne sais pas exactement pourquoi précisément l’homicide du jeune Michael Brown à Ferguson a lancé le mouvement, mais j’ai l’impression que beaucoup de gens, surtout les jeunes, naturellement, ont décidé de dire «  ça suffit, il faut qu’on fasse quelque chose...  » et je crois que la situation a été aggravée par le fait que la police avait laissé le corps sans vie de Michael Brown dans la rue, pendant quelque quatre heures et demie, en plein soleil d’été. Un dernier acte de barbarie pour ainsi dire. Et cet élément supplémentaire de dégoût a été la goutte qui a fait déborder le vase, qui a fait exploser la situation.

A partir de cet après-midi-là a commencé une semaine, au moins, de mobilisations, d’affrontements. Il y eut par exemple une cérémonie spéciale pour l’enterrement, à laquelle beaucoup de parents et beaucoup de gens du village ont assisté, très calme et tranquille. Puis la police est arrivée, genre l’armée américaine en Irak, avec un armement incroyable. Je dois préciser, entre parenthèses, que depuis très longtemps le Pentagone, le siège des forces armées, vend des armes, des chars, etc. à n’importe quelle municipalité et mairie pour leur police locale. Cela ressemblait à une invasion armée de Ferguson par la police, et je crois que çaa beaucoup contribué à l’intensification de la lutte.

Mais il faut voir tout cela dans une certaine perspective historique : ces trois ou quatre dernières années on a vu des incidents de ce genre, chaque fois plus marqués par ce type d’affrontements. Il y a trois ou quatre ans, un jeune Noir d’Oakland (à côté de San Francisco), Oscar Grant, a été assassiné par la police dans le métro suite à un affrontement verbal, ce qui a entraîné deux ou trois nuits d’affrontements dans le centre de cette ville, avec des voitures brûlées, etc.

Dans ce genre de situation il n’y a pas seulement des affrontements dans la rue, mais aussi une série de professionnels qui arrivent avec l’espoir de calmer la situation, à commencer par des politiciens noirs divers, certains très connus, comme Jesse Jackson ou Al Sharpton. Ce sont des professionnels de la classe moyenne noire, dont le rôle spécifique est de calmer ce type de situation. En plus de ces gens-là, il y a les ONG qui font plus ou moins la même chose, ainsi que des curés et des prêtres de diverses églises qui appellent à prier... Tout cela est un scénario presque classique, qui s’est répété des centaines de fois depuis les années 1970  ; ce qui est intéressant dans le cas de Ferguson c’est que les jeunes dans la rue ont rejeté viscéralement tout type de récupération de leur mouvement de la part de ces gens-là.

Cette fois les gens ne sont pas rentrés chez eux

Outre la mort d’Oscar Grant, il y a trois ou quatre ans aussi, il y a eu un cas très médiatisé dans l’Etat de Floride, celui d’un jeune Noir de 17 ans qui faisait des courses et a été arrêté dans la rue, non par un policier mais par un vigile privé du quartier, du quartier même où habitait le père du jeune homme ; il y a eu un affrontement verbal, sans témoin, mais le fait est que le jeune Noir a fini assassiné de deux balles dans le cœur. Cette fois il y a eu une mobilisation officielle et un procès contre le vigile mais, comme on peut le deviner, il fut déclaré innocent. Cela a entraîné un peu partout dans le pays des manifestations pendant trois ou quatre jours et puis plus rien. Je dis tout cela pour souligner que ce qu’il y a de différent à Ferguson c’est que les gens ne sont pas rentrés chez eux : ils se sont mobilisés semaine après semaine, et quand les politiciens noirs professionnels sont arrivés, les jeunes les ont expulsés de la ville  ; avec des tactiques et des stratégies assez originales : beaucoup de gens passaient dans la rue avec les bras en l’air en train de crier « Ne tirez pas », une méthode assez pacifique et à la fois agressive de s’affronter à la police, et cela continua nuit après nuit. Finalement, cela s’est calmé en attente d’un procès contre le policier [Darren Wilson], au cas où il y aurait été accusé d’homicide.

Comme on pouvait s’y attendre, on a annoncé [le 23 novembre] qu’il n’y aurait aucune inculpation de la police et, avec cette décision, les jeunes de Ferguson (et leurs parents dois-je ajouter, ce ne sont pas seulement les jeunes Noirs qui sont mobilisés) sont revenus dans la rue, cette fois avec une certaine violence (plusieurs magasins détruits).

Et tout cela se passait alors qu’à New York se tenait un procès [similaire]  : vers le mois de septembre, un Noir d’une cinquantaine d’années, Eric Garner, un personnage de la rue, gros, asthmatique, vendait des cigarettes à l’unité, sans autorisation officielle de la mairie. La police est arrivée, affrontement verbal, quatre policiers finissent par l’étrangler... quelqu’un a tout filmé, sa mort a été vue sur Internet par des millions de personnes. C’était un incident encore plus grave que celui de Ferguson, si c’est possible. Comme l’homme en question était asthmatique, il a répété onze fois « Je ne peux pas respirer »... et il est mort. C’est pour cela que dans les protestations des dernières semaines, les manifestants scandaient « Je ne peux pas respirer ». Alors que le mouvement était dans la rue à Ferguson, on a annoncé à New York qu’il n’y aurait aucune inculpation contre les policiers.

Le mouvement a alors commencé à être national et international (l’ambassade américaine à Londres a été attaquée par un millier de personnes il y a trois ou quatre jours, il y a eu des manifestations de solidarité à Paris...). Naturellement, tous les types de mobilisations se sont intensifiés. Samedi dernier, par exemple [le 13 décembre], il y a eu une manifestation nationale, avec des gens dans la rue dans 100 ou 120 villes  ; dans certaines comme New York cela a commencé à 14 heures mais à minuit il y avait encore des gens (des libertaires, des anarchistes, les gens les plus radicaux...) qui continuaient dans la rue, bloquant des autoroutes, des ponts, s’affrontant à la police, etc.

Précariat blanc

Un camarade français m’écrivait il y a deux semaines pour me demander pourquoi dans de telles manifestations il y a une majorité de Blancs. Il est indéniable que dans d’autres villes les manifestants étaient en majorité noirs, voire en totalité. Mais à Minneapolis ou à Seattle (dans le Nord-Ouest), par exemple, la grande majorité était des Blancs et, à ma connaissance, ce furent les affrontements les plus durs de tous. Comment l’expliquer ? Tout simplement, les Noirs savent par une longue expérience que s’affronter dans la rue avec la police leur coûte beaucoup plus cher qu’aux Blancs, pour des raisons que nous pouvons imaginer : risque de se retrouver en prison, passages à tabac dans les locaux de la police, tirs à balles réelles dans les affrontements... plus fréquents quand il s’agit de Noirs. Je dirais qu’en général les deux groupes les plus présents dans ces manifestations ont été, en premier lieu, le « précariat » blanc, puis une quantité impressionnante de Noirs. Le « précariat » est une couche sociale composée plus ou moins d’ex-membres de la classe moyenne  ; des étudiants et, de manière générale, toute une sous-culture assez importante dans le pays, dans des villes telles que San Francisco, Oakland, Seattle, Minneapolis... Ces gens-là ont déjà fait leurs premières expériences de mobilisations dans la rue avec le mouvement Occupy !

Occupy ! s’est terminé à la fin de 2011, pendant l’hiver, et il a semblé disparaître pendant un certain temps, mais je pense qu’il y a une continuité évidente entre lui et la mobilisation actuelle. La différence essentielle, dans nombre de villes, c’est la présence importante de Noirs (parfois majoritaires). Les Noirs étaient en général sceptiques par rapport à Occupy ! (avec quelques exceptions comme à Oakland), le voyant comme un mouvement de « petits Blancs » qui n’avait rien à voir avec leurs intérêts. Mais cette fois, naturellement, ce fut le contraire, comme à New York : dans les mobilisations où je suis allé il y avait quelque 30 % à 40 % de Noirs. La ville d’Oakland est un cas spécial. Comme elle se trouve à côté de San Francisco et de la ville universitaire de Berkeley, elle connaît une grande tradition de radicalisme ; par exemple, les Black Panthers sont nés dans les années 1960 à Oakland, de même que d’autres mouvements. C’est une ville à majorité noire qui, ces dernières années, a été transformée par une invasion de yuppies, des techniciens des nouvelles entreprises de technologie  ; cet embourgeoisement a créé une nouvelle pression sur les loyers, sur le prix du logement, pour tout le monde et surtout pour les Noirs pauvres.

Déjà il y a trois ans le mouvement Occupy ! a eu une dimension prolétaire plus profonde à Oakland que dans n’importe quelle autre ville du pays, pas seulement du côté des Noirs mais aussi des Latinos ; il a réussi à fermer par deux fois le port d’Oakland, un port très important de la Côte Ouest, il y a eu des «  grèves générales  » en novembre et décembre 2011... Cela ne s’est produit nulle part ailleurs. Je dis cela pour signaler qu’Oakland est une ville un peu à part dans le mouvement général des Etats-Unis, à cause de cette dimension prolétaire et de cette participation des Noirs, il y a déjà trois ans. Je ne sais pas exactement quand prendra fin le mouvement actuel, mais son impact est assez impressionnant. Les mouvements de rues ont obligé presque toute la classe politique, droite, centre et « gauche », à se prononcer sur les homicides des jeunes Noirs et peut-être même le gouvernement va-t-il intenter un procès civil contre les policiers impliqués dans les morts de Ferguson et d’Eric Gardner à New York.

Une campagne électorale permanente

Pour vous donner un peu le contexte, nous venons de passer par les élections biennales, avec un très faible taux de participation, et le Parti républicain (droite dure) a gagné la majorité au Congrès. Entre parenthèses, je dirais qu’aux Etats-Unis nous avons un parti de droite (républicain) et un parti de centre droit (Parti démocrate), et je ne saurais pas dire s’il y a eu un vrai parti de gauche ou même un parti social-démocrate classique comme dans divers pays d’Europe ; c’est un autre élément un peu étrange des Etats-Unis. Mais d’ores et déjà, le jeu politique, au niveau national, est une préparation pour les élections de 2016, et c’est dans ce cadre qu’il faut interpréter tout ce que font le gouvernement et les politiciens ; se préparer, se placer politiquement en vue des prochaines élections. Les Etats-Unis sont pratiquement en permanence en campagne électorale  : quand les élections biennales se terminent, la campagne présidentielle suivante commence. Cela pour vous dire que les manœuvres autour de ces incidents, ces homicides de jeunes Noirs, doivent être interprétées toujours dans le cadre des perspectives électorales des politiciens.

Anábasis  : Nous avons parlé de l’actualité et des scénarios du futur. Ce serait peut-être bien de remonter vers le passé, pour comprendre clairement ces événements.

Oui. Dans mon expérience, ayant vécu un an et demi en Espagne et ayant parcouru plusieurs pays européens, en général, tout en étant moi même très « anti-américain », j’ai trouvé parmi les camarades beaucoup de stéréotypes au sujet des Etats-Unis. Un stéréotype n’est pas obligatoirement faux, mais il est souvent exagéré, à cause de cela j’essaierai de mettre en perspective de façon plus concrète les rapports entre race et classe sociale, pour expliquer un peu le contexte de cette guerre de la police contre les jeunes Noirs et Latinos, depuis au moins les années 1960.

Pour commencer par le début, les Etats-Unis ont toujours été un pays d’immigrants d’un côté, mais naturellement les Noirs qui sont arrivés ici en tant qu’esclaves n’étaient absolument pas des immigrants. Pas plus que l’autre groupe important, les Indiens, qui étaient là depuis toujours. Et depuis le début il y a eu cette dialectique entre classe et race et, en même temps, dans la politique extérieure, une guerre permanente contre les Indiens, pendant deux cent cinquante ans, jusqu’à la fin du xixe siècle.

Le racisme, création de la classe dominante

Ce qui est intéressant, c’est que, au début, les premières colonies importantes se trouvaient, d’un côté, dans l’Etat du Massachusetts où se trouve Boston, peuplé de puritains et d’autres réfugiés religieux, généralement de gauche en Angleterre ; et d’un autre côté dans l’Etat de Virginie, capitale Washington (celle de maintenant), avec une classe agraire, non de latifundistes mais avec d’assez grands investissements surtout dans la culture du tabac  ; un autre monde, très différent de l’économie du Massachusetts. Il faut comprendre que, au début, les rapports des esclaves noirs africains avec les ouvriers agricoles blancs n’avaient pas encore un caractère raciste  ; ces travailleurs anglais étaient très souvent des prisonniers qui avaient été plus ou moins expulsés de l’Angleterre et envoyés aux travaux forcés dans l’Etat de Virginie ; ils étaient aussi des travailleurs domestiques des grands propriétaires terriens  ; leur statut social n’était pas différent de celui des esclaves et il existait une certaine égalité entre les Blancs pauvres et les esclaves.

Plus tard, au cours du xviie siècle, il y eut deux insurrections de Blancs et Noirs contre la classe des propriétaires terriens, malheureusement défaites, très réprimées. Toujours est-il que, vers la fin du xviie siècle, la classe des propriétaires terriens a décidé qu’il fallait créer une distinction entre les Blancs pauvres et les esclaves, pour introduire un « privilège blanc », c’est pourquoi ils ont créé une série de lois qui distinguaient les Blancs des Noirs : c’est essentiel pour comprendre ce qui s’est passé plus tard. Il n’y a rien de naturel, bien sûr, dans le racisme et cette hiérarchie de couleurs, c’était une création consciente de la classe dirigeante de l’époque. Et à la fin, ce qui s’est passé en Virginie au xviie siècle s’est généralisé à tout le pays au cours de l’histoire d’Amérique du Nord. C’est très intéressant, et cette histoire est encore mal connue. Pour compléter la situation, plus au Nord, dans le Massachusetts, les puritains ont commencé presque aussitôt une série de guerres contre diverses tribus indiennes, avec beaucoup de massacres, essentiellement comme dans la guerre du Vietnam, trois cent cinquante ans auparavant... C’est un autre sujet et si j’y rentre nous ne finirons jamais.

Au milieu du xixe siècle il y eut la Guerre de Sécession (1860-1865), très importante dans l’histoire des Etats-Unis. C’est compliqué mais, de son côté, le Nord a eu l’intention de mettre fin à l’esclavage dans tout le pays, c’était un but important. Comment l’expliquer ?

L’agitation contre l’esclavage a commencé dans ce même Etat du Massachusetts. Dans un certain sens il était et continue d’être l’Etat le plus libéral du pays. Un jour un sénateur du Sud – de Caroline du Sud, un Etat très lié à la réaction sudiste – a dit que dans l’Etat du Massachusetts il y avait du féminisme, du socialisme, du communisme et tous les « ismes » qu’on voudra. Et c’est un peu comme ça qu’a commencé la vie politique dans cet Etat ; il y avait là un groupe qui s’appelait, à partir des années 1830 et 1840, « les Abolitionnistes », c’est-à-dire des gens qui voulaient abolir l’esclavage  ; ils étaient très radicaux. Ils appartenaient à la classe moyenne, et ils ont commencé leur agitation, de plus en plus radicale ; particulièrement John Brown, à la fin des années 1850, a commencé une série d’actions militaires contre le pouvoir esclavagiste, dont la plus importante, l’attaque par trente ou quarante hommes de la forteresse militaire de Harper’s Ferry, en Virginie ; ce fut un échec, la majorité a été assassinée et Brown lui-même a été exécuté peu après, mais, en un sens, ce fut l’incident qui a plus ou moins initié la Guerre civile, qui a commencé un an plus tard, en 1860. Je raconte tout cela pour souligner qu’il y a toujours eu des groupes de Blancs dans la lutte contre l’oppression raciale des Noirs. Des groupes de Blancs plus généralement des classes moyennes du pays, qui étaient contre l’esclavage au xixe siècle, contre le racisme (officiel ou pas) au xxe siècle, en alliance, naturellement, avec des militants noirs... et tout cela a laissé la classe ouvrière blanche dans une situation d’ambiguïté, héritage direct des premières lois que je mentionnais, en Virginie au xviie siècle.

Comme les propriétaires terriens l’ont dit à l’époque : nous devons donner au travailleur blanc l’idée qu’il a un intérêt à la préservation de l’ordre social  ; c’est-à-dire en lui offrant desprivilèges, en termes psychologiques et parfois économiques, contre les Noirs ; parce que, au niveau objectif, naturellement, les Blancs et les Noirs ont beaucoup plus d’intérêts en commun, mais il a toujours existé un courant important parmi les ouvriers blancs racistes (consciemment ou non), qui, souvent, ont pu agir de manière raciste, anti-noirs. Par exemple, pendant la Guerre de Sécession il y a eu à New York une insurrection d’ouvriers irlandais contre la conscription ; ils ont fini par incendier une maison pleine d’enfants noirs, aux cris de « Nous ne combattrons pas dans la guerre des Noirs ». Et ainsi de suite. C’est-à-dire que, à chaque moment important de l’histoire des Etats-Unis, il y a toujours eu une certaine couche d’ouvriers plus ou moins en faveur de la hiérarchie raciale établie au xviie siècle.

Une nouvelle forme de servitude

Une chose essentielle pour comprendre l’histoire des Etats-Unis est que, juste à la fin de la Guerre de Sécession, il y eut au Congrès et dans le Parti républicain (c’est-à-dire ceux qui avaient appuyé la guerre contre le Sud), l’idée de créer une classe paysanne libre de Noirs dans les Etats du Sud, avec l’expropriation de la terre des grands propriétaires, des gens qui avaient pratiqué l’esclavage pendant deux siècles. Ces terres furent expropriées de fait mais il ne s’est pas créé cette classe paysanne noire indépendante. Ce qui s’est passé, au contraire, c’est un mouvement de la part des Blancs qui peut s’appeler sans problème un mouvement terroriste, depuis le milieu des années 1860 jusqu’au début des années 1870, pour terroriser la population noire et lutter par tous les moyens contre la création de cette nouvelle classe paysanne libre.

A mon avis (et pas seulement le mien) c’est le point peut-être le plus important de l’histoire des Etats-Unis : au lieu d’une émancipation réelle de l’esclavage il y eut une nouvelle forme de servitude des Noirs ; au lieu d’être esclaves ils sont devenus ouvriers dans les terres qui appartenaient encore à la vieille classe des propriétaires terriens, très pauvres, très opprimés jusqu’au milieu du xxe siècle. L’importance de cet épisode, juste après la Guerre de Sécession, ne saurait être exagérée.

Puis est venue l’industrialisation du pays et une chose très intéressante que je n’ai moi-même pas bien comprise jusqu’à ce que j’aie commencé à étudier sérieusement l’histoire de l’Amérique du Nord : à la différence de certains pays d’Europe, par exemple, où il y a eu une rupture très importante entre le féodalisme et le capitalisme moderne, ce qu’il y a de «  fascinant  » dans l’histoire américaine est qu’il y a eu une industrialisation mais avec l’intégration de la vieille culture pré-industrielle, c’est-à-dire que cette hiérarchie entre Blancs et Noirs et les rapports sociaux, surtout dans le Sud, restaient les mêmes dans un contexte complètement nouveau de production industrielle capitaliste.

Un marxisme aveugle

C’est un problème pour le marxisme aux Etats-Unis : on dit qu’un marxisme insensible à la question de la couleur est un marxisme aveugle ; il y a eu jusqu’à récemment beaucoup de marxistes « aveugles » à ce sujet. Je dois confesser que moi aussi, dans ma jeunesse, je pensais qu’un prolétariat est un prolétariat ; blanc, rouge ou jaune, pas d’importance. Mais en fait non, et cela ne peut pas se comprendre en lisant Le Capital de Marx ; on doit le comprendre en étudiant la formation concrète de la classe ouvrière aux Etats-Unis, avec la conservation de cette idéologie et pratique pré-industrielles, créées à partir de l’Etat de Virginie. Alors c’est un fait très intéressant que, jusqu’en 1900, 90 % des Noirs « émancipés » sont restés dans les Etats du Sud profond (Mississippi, Alabama...). La grande émigration vers le Nord industriel des Noirs du Sud a commencé avec la première guerre mondiale et s’est poursuivie dans les années 1920-1930. Lors de la deuxième guerre mondiale, il y avait une énorme émigration au Nord et il s’est créé pour la première fois vraiment une classe ouvrière multiraciale, surtout dans les centres industriels tels que Detroit, Chicago et d’autres dans le Middle-East des Etats-Unis. D’un côté cela apparaissait comme une nouveauté par rapport au passé, mais d’un autre côté on retrouvait la même hiérarchie raciale, cette fois dans la production et dans la vie quotidienne des villes du Nord.

Par exemple, dans les usines d’automobiles de Detroit et d’autres villes du Middle East, les ouvriers blancs avaient, en général, les meilleurs postes de travail et les Noirs toujours les plus mauvais. Le rôle des syndicats, surtout celui des ouvriers de l’automobile (United Auto Workers), j’allais dire qu’il était ambigu, mais en fait il n’était pas du tout ambigu, le syndicat a aidé à maintenir cette situation jusqu’à la fin des années 1960, quand a commencé une réelle insurrection noire dans les Etats du Nord, y compris dans les usines de Detroit, Chicago, etc. Pour la première fois il y eut des luttes contre ce type de séparation dans les usines. En général, à quelques exceptions près, le rôle de la classe ouvrière blanche dans cette partie des années 1960 et début 1970, n’a pas été brillant ; il y a bien eu quelques épisodes de solidarité mais ils étaient exceptionnels ; la règle était plutôt, comme je disais, une perpétuation de la hiérarchie raciale, un manque de solidarité entre Blancs et Noirs.

Au début des années 1970 notamment, on avait l’impression que les capitalistes avaient perdu vraiment le contrôle des usines ; le niveau d’absentéisme au travail était incroyable  : les lundis et les vendredis presque la moitié du personnel était « malade », absente. Il y a eu par exemple une convention négociée au début des années 1970 par le syndicat United Auto Workers (UAW) ; quand les bureaucrates syndicaux ont annoncé fièrement qu’ils avaient gagné la semaine de quatre jours, les ouvriers ont répondu « La semaine de quatre jours ? Nous l’avons déjà ! »

Restructuration et réaction des années 1970

C’était une situation, malheureusement très temporaire où, dans la pratique quotidienne de l’usine, le contrôle de la production était presque dans les mains des ouvriers. Mais avec la grande crise du pétrole, la récession mondiale du milieu des années 1970, tout cela a naturellement pris fin et la restructuration a commencé, la désindustrialisation de presque tout le Middle East américain, avec la fermeture de beaucoup d’industries, la délocalisation d’abord vers les Etats du Sud puis à l’étranger. Il y eut une énorme décentralisation de la production industrielle dans le but de mettre fin à cette interminable série de grèves sauvages et d’insubordination dans l’usine.

Anábasis  : Oui, c’est un peu ce qui s’est passé en Europe aussi. Après la deuxième guerre mondiale il y a eu [aux Etats-Unis] un mouvement important spécifiquement noir, peut-être celui qui a été le plus connu ici, avec des émeutes comme à Watts et ailleurs, et des organisations noires comme les Black Panthers eux-mêmes, ainsi que des précédents comme la figure de Malcolm X. Que penses-tu de tout cela ?

Oui, j’étais en train de tracer les lignes générales et je suis arrivé un peu rapidement aux luttes industrielles de la fin des années 1960, mais oui, c’est vrai... Une chose intéressante, parmi d’autres, dans l’histoire des Etats-Unis, c’est comment les guerres mondiales ont changé, ironiquement, les rapports entre Blancs et Noirs. Déjà lors de la première guerre mondiale beaucoup de soldats ont été dans l’armée américaine en France et c’était, surtout, pour les ouvriers noirs originaires du Sud, la découverte d’un monde où le racisme tel qu’ils le connaissaient chez eux n’existait pas, ou bien existait d’une manière beaucoup plus subtile. Et cela a déjà contribué à une radicalisation de la conscience des Noirs. Il est très intéressant de noter qu’en 1919, juste après la guerre, il y a eu la vague de grèves la plus grande de toute l’histoire des Etats-Unis, dans la crise de restructuration et, en même temps, et souvent dans les mêmes villes, il y a eu des affrontements raciaux dans les rues entre Blancs et Noirs ; dans certaines villes, avec un niveau de destruction assez incroyable, faisant quarante, cinquante morts.

C’est-à-dire que l’histoire des luttes de classe aux Etats-Unis ne peut pas se séparer de cette question raciale qui apparaît à tout moment d’une manière ou d’une autre.

Ensuite, comme je disais, avec la grande émigration vers le Nord pendant la deuxième guerre mondiale, il y eut à Detroit, centre de l’industrie de l’automobile, d’un côté, en 1943, une vague de grèves sauvages très importante et, en même temps, des affrontements raciaux dans la rue entre Blancs et Noirs. La deuxième guerre mondiale fut encore plus importante pour la transformation de la conscience noire, parce qu’il y avait encore une fois beaucoup de soldats des différentes armées qui sont revenus avec l’idée « pourquoi mourir pour défendre une “démocratie” qui pour nous, dans le Sud, n’existe même pas dans le sens bourgeois du terme ? » et il y a eu des mouvements chez les soldats noirs ; et, pour la première fois je crois, dans les premières années après la deuxième guerre mondiale, le président Truman a ordonné l’intégration raciale dans les forces armées du pays  ; avant il y avait des divisions et des régiments séparés pour les Blancs et pour les Noirs. Et ce fut un premier pas. Je ne veux pas dire que ce fut un geste généreux de Truman, c’était une réponse à une pression plus forte de la part des Noirs, mais elle a commencé à changer un peu la situation. Il y eut des incidents, en plus, avec des soldats noirs qui rentraient d’Europe ou d’Asie, et qui, marchant en uniforme dans les rues, ont été attaqués et même tués par des groupes de racistes blancs. Ils avaient pu être des héros au front dans la lutte contre le fascisme, mais une fois de retour à la maison dans ladite démocratie, ils étaient les Noirs de toujours.

Peu après, au début des années 1950, la situation a commencé à changer radicalement. Il y a eu l’intégration dans les écoles ordonnée par la Cour suprême en 1954 et l’année suivante, dans la ville de Montgomery (Alabama) il y a eu un mouvement de plusieurs mois des ouvriers noirs, boycottant le système de transport public pendant deux ou trois mois, qui a obligé la ville à accepter l’intégration raciale dans les moyens de transport. Avant, les Blancs s’asseyaient dans la partie avant de l’autobus et les Noirs à l’arrière. Un jour une femme noire très forte, Rosa Parks, s’est assise dans la partie blanche et a refusé de se lever ; c’est comme ça qu’a commencé ce mouvement qui a fini avec l’intégration raciale dans les autobus à Montgomery.

Et c’est important de noter que ce n’est pas par hasard que tout ceci a commencé à Montgomery, parce qu’il y avait là plusieurs usines métallurgiques avec beaucoup d’ouvriers noirs et, déjà, quelque deux ans auparavant, un anarchiste français, Daniel Guérin, voyageant par là, avait un peu prévu l’explosion raciale dans la ville de Montgomery en particulier. Ces deux choses, l’intégration, appliquée dans les écoles en 1954 et le mouvement de Montgomery en 1956, ont marqué le début du mouvement moderne pour mettre fin à ce système, à « Jim Crow  », terme qui définissait l’apartheid des Etats-Unis.

Insurrections urbaines

Ensuite le mouvement s’est développé, toujours plus rapidement, surtout à partir de 1960 aussi dans le Nord. Il y a toujours eu une certaine division dans le mouvement noir pendant ces années : dans le Sud c’était plutôt les couches moyennes noires, organisées surtout en églises protestantes, qui ont lancé le mouvement ; dans le Nord par contre, c’était plus prolétarien, plus urbain, plus classe ouvrière et toujours plus classe marginale. Les revendications et argumentations du mouvement du Sud, dont le leader était Martin Luther King, ne fonctionnaient pas de la même manière dans les Etats du Nord, dans une réalité plus prolétarienne, où la séparation raciale légale n’a pas tellement existé : par exemple, dans les Etats du Nord, un Noir, théoriquement, pouvait entrer dans n’importe quel restaurant, il n’y a pas eu la même séparation légale dans les écoles et les autres institutions. Mais il y avait quand même des ghettos, des quartiers séparés de Noirs et, de ce fait, la séparation raciale de la population était aussi forte, sinon plus que dans les Etats du Sud.

Et c’est comme ça qu’a commencé la vague d’insurrections urbaines dans le Nord à partir du soulèvement de Harlem (New York) en 1964 jusqu’au printemps de 1968, après l’assassinat de Martin Luther King en avril 1968, quand d’énormes soulèvements ont eu lieu dans une bonne centaine de villes des Etats-Unis. C’était presque une situation de guerre civile. C’était aussi, naturellement, les années du mouvement du Pouvoir noir, Black Power, qui a commencé après le début de l’échec du mouvement antérieur pour les droits civiques.

Quand le mouvement lancé dans les Etats du Sud par Luther King et les églises a atteint ses buts immédiats, avec des changements législatifs importants en 1964 et 1965, avec l’établissement légal des droits civiques dans tout le pays, mettant fin à beaucoup de séparations légales (restaurants, services....) , sont restés les problèmes plus profonds du prolétariat urbain dans le Nord et il y eut, naturellement, une radicalisation du mouvement. C’était l’époque, par exemple, où l’influence de Malcolm X, un leader très important, plus radical que Luther King, a été assassiné... c’est une histoire très compliquée, mais il est assassiné au printemps de 1965. Malcolm avait articulé avec d’autres leaders noirs dans les Etats du Nord quelque chose de plus radical que le mouvement d’intégration raciale et des droits civiques, et alors une jeunesse de la classe moyenne et de la classe ouvrière dans les Etats du Nord s’est développée toujours plus vite jusqu’à la fin des années 1960.

La question blanche

Par exemple, dans le cas des luttes ouvrières que je mentionnais, à Detroit et autres, elles avaient aussi inspiré un certain radicalisme aux ouvriers blancs. Je ne veux pas dire que ceux-ci avaient besoin de l’influence du mouvement noir, parce qu’il y a eu des grèves sauvages et des luttes dans l’industrie des Etats-Unis depuis les années 1950, mais il est évident que les succès du mouvement noir et sa combativité étaient une incitation non seulement pour les ouvriers mais aussi pour d’autres sphères de la société, comme, par exemple les gays, qui en 1969 ont animé des émeutes à Stonewall, un quartier de New York, contre la répression policière ; de même pour le mouvement féministe et ainsi de suite. Donc, pour revenir au début de notre conversation, déjà au xviie siècle la « question noire  », qui est en réalité «  la question blanche  », celle de la passivité de la majorité des Blancs à travers de nombreux mécanismes, est le point le plus marquant de la lutte des classes aux Etats-Unis. Je ne dis pas que ce soit en soi une lutte de classe mais bien la clé de l’ordre établi qui s’est développé depuis aussi longtemps que j’ai essayé de le dépeindre. Ce système d’oppression des Noirs n’a pas tant pour but de contrôler les Noirs, que de contrôler les Blancs.

Pour répondre à ta question, oui, le mouvement noir plus ample, commencé dans les Etats du Sud dans les années 1950, se poursuivant dans le Nord dans les années 1960, avait changé les bases de toute lutte aux Etats-Unis, y compris dans des sphères qui ne se sentaient pas directement concernées par la question raciale. Alors, avec l’arrivée au pouvoir de Nixon en 1968, qui a été élu concrètement et consciemment en réaction contre tous ces mouvements des années 1960, a commencé une période de réaction assez forte qui se termine à peine aujourd’hui. J’ai mentionné la désindustrialisation des années 1970, qui a contribué beaucoup à mettre fin aux grèves sauvages dans les usines et les émeutes dans les rues. Une chose importante depuis les années 1960 est le développement d’une certaine couche moyenne et élevée noire, résultat aussi des mouvements des années 1960. Jusqu’aux années 1960 il y a eu dans toute les villes du Nord cette classe moyenne noire, d’avocats, médecins... mais elle était petite, fragile et elle vivait exactement dans les mêmes ghettos que les prolétaires et les pauvres marginaux noirs.

Classe moyenne noire

A partir des années 1970, que cette couche s’est séparée toujours plus du reste de la population noire et, de nos jours, dans des villes comme Atlanta (en Georgie, dans le Sud), par exemple, cette couche noire de classe moyenne et élevée est presque au pouvoir ; elle constitue presque l’establishment : le maire est noir, le chef de la police est noir, presque tous les policiers sont noirs. C’est-à-dire que, dans certaines situations locales, ils sont au pouvoir, mais ils sont comme le PSOE au pouvoir en Espagne à partir des années 1980, ils sont là pour administrer le même système capitaliste, et leur arrivée au pouvoir dans ces situations ne veut pas dire du tout que l’oppression raciale, y compris localement, ait pris fin : la police noire réprime les jeunes marginaux noirs avec la même – ou une plus grande – férocité que les policiers blancs.

Mais on ne peut pas nier qu’il y a eu certains changements. C’est la rhétorique et l’idéologie du Parti démocrate actuel et du président Obama, un bon exemple. Depuis son arrivée au pouvoir, cela fait six ans, il n’a pas cessé de suivre une politique plus ou moins réactionnaire mais travestie par le fait que c’est la première fois qu’un Noir occupe la Maison Blanche. La semaine dernière, après les mobilisations, il a dit publiquement : on ne peut pas nier que la situation n’a pas changé ces derniers cinquante ans. Je me rappelle très bien que, quand a éclaté le mouvement à Ferguson et qu’il y a eu ensuite l’assassinat à New York, je me suis dit « Merde, en cinquante ans rien n’a changé ». Et pourtant, il y a cinquante ans, un président noir aux Etats-Unis aurait été impensable. De même, la séparation de cette classe moyenne-riche noire que j’ai mentionnée, dans des villes comme Atlanta, n’existait pas non plus. Mais en même temps nous avons aux Etats-Unis entre 1 et 2 millions de personnes dans les prisons, dont 80 % à 90 % sont noirs et latinos. Ainsi, la même polarisation qui a existé dans toute la société existe aussi au sein de la population noire ; oui, c’est vrai que maintenant il y a des bourgeois riches noirs dans pas mal de villes, mais il y a une population emprisonnée énorme qui n’existait pas non plus il y a cinquante ans... Pour arriver à la conclusion, ces rapports entre race et classe sociale qui ont commencé en Virginie il y a quatre cents ans n’ont pas cessé de se recomposer, avec des progrès et des reculs, mais toujours existants dans le temps.

J’espère avoir réussi à vous faire un certain tableau de la situation aux Etats-Unis, avec ces mouvements plus récents et tout le développement historique qui se trouve derrière eux.

L. G.

(Traduit de l’espagnol par M. D.)

Cet entretien tenu en espagnol n’a pas encore été traduit en anglais. Loren Goldner édite une revue en ligne, insurgent notes

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