Culture, nation, ethnie, nationalisme : du flou et du moins flou de quelques définitions
« Entre patrie et Etat, entre le plus ouvert et le plus fermé, la nation est une instance d’échange, de remaniement du sens, de redistribution de ses éléments. […] Elle est un lieu immatériel, là où les sociétés projettent leur désir de perfection, là où, par-delà la contingence, nation et nature coïncident absolument. […] Elle est une forme parfaite qui se tient au-dessus de la société et des individus qui la composent, s’impose à eux et les saisit dans leur destin personnel à travers lesquels elle se prolonge et s’accroît sans être affectée par leur singularité. » [1]
Notre objectif, en clair : tâcher de déterminer ce qui fait l’essence de la nation et du nationalisme, de mettre en évidence l’élément structurant de toutes les tendances de ce dernier afin de déterminer ultérieurement si, oui ou non, l’anarcho-indépendantisme est susceptible d’entrer dans la « grande famille » nationaliste, c’est-à-dire, peut-être, à plus ou moins long terme, de connaître le même destin. Là encore, même si nous en dressons plus bas le rappel, nous ne cherchons pas à établir une définition transcendant les lieux et les époques. Bien plutôt, nous mettons en œuvre une stratégie de vérification de l’idée anarcho-indépendantiste et cherchons pour cela à dégager la substantifique moëlle du phénomène national.
Culture
Difficile, semble-t-il, de prétendre étudier le phénomène national sans se pencher auparavant sur ses « racines culturelles » [2]. Les quelques débats que nous avons eus avec des anarcho-indépendantistes nous y amènent aussi, et encore une fois pour éviter tout détournement conceptuel. Là encore, il est vrai, chez les libertaires, on se heurte au mur de l’inanité théorique ; beaucoup de militants peuvent déblatérer sur la notion de culture sans même avoir le réflexe d’ouvrir leur dictionnaire. Avouant la difficulté « de définir une culture et de comprendre ce que pourrait être une France multiculturelle » [3], un militant commence par évoquer différentes formes de culture : sociale, religieuse, politique, la culture politique étant définie par lui comme l’idéologie. Las ! Cela n’a pourtant rien à voir. De manière plus pertinente, Vanina, applaudissant à la renaissance de la culture corse, se demande si cela implique « un retour aux traditions » [4].
Affirmations vides de sens comme questions sans réponses manifestent à la fois la grande détresse théorique du mouvement anarchiste et, plus particulièrement, le flou de notions pourtant indispensables à la polémique. Ainsi, l’Union des anarchistes de Saint-Etienne, dans un article paru dans Courant alternatif, écrit que « le mouvement culturel en Corse doit […] regrouper l’économique, le social, le culturel ».
Et voilà donc la culture définie par… la culture… juste avant l’affirmation d’un point de vue assez incompréhensible et semblant mêler en une seule les deux principales définitions de la culture : « La culture est notre seule façon de vivre et d’exister (création et communication). [5] »
Sans être exhaustif, cet échantillonnage est révélateur du confusionnisme ambiant et prouve, s’il en était encore besoin, la nécessité de faire reposer le discours anarchiste et la discussion sur un appareil conceptuel solide.
Pour Alain Dieckhoff, la précision est d’autant plus nécessaire que : « Les sociétés humaines sont des sociétés de culture. En cela, elles se distinguent radicalement des organisations animales [6]. Parce que la culture est le soubassement de la vie sociale, elle remplit dans le façonnage des identités collectives une fonction essentielle. [7] »
L’apparition du concept de culture comme synonyme d’éducation et de formation de l’esprit est, selon A. Dieckhoff, contemporaine, dans la deuxième moitié du XVIIIe, de l’émergence de l’individu comme sujet autonome et de l’avènement de la nation comme sujet collectif. Il va de soi, contrairement à ce qu’ont pu croire certains anarcho-indépendantistes avec qui nous discutions et qui ont été prompts au détournement, que nous ne faisons pas référence à cette définition.
La culture, en effet, n’est pas seulement un savoir, et elle peut même, au contraire, renvoyer à un comportement inexplicable. Dès 1774, le philosophe allemand Johann G. Herder, dans Une autre philosophie de l’histoire, rompait avec cette vision des Lumières d’une culture signifiant le savoir en la donnant pour synonyme d’un « génie national ». Dans la même perspective, en 1871, l’anthropologue britannique Edward B. Tylor la définissait comme « l’ensemble des habitudes acquises par l’homme en société », incluant ainsi « toutes les compétences techniques, symboliques et sociales développées par les sociétés humaines » [8].
Plus tard, durant la première moitié du XXe siècle, Franz Boas divisait le monde en aires culturelles, tandis que Bronislaw Malinowski développait l’idée que, dans toute culture, chaque élément possède une fonction, comparable à celle d’un organe dans un corps vivant, et répond à un besoin. Plus proche de nous encore, Claude Lévi-Strauss, avec Anthropologie structurale (1958) et Race et Histoire (1952), affirmait que toute production culturelle obéit à des règles de construction communes de caractère abstrait. Enfin, le constructivisme entendit réviser la notion : alors que Fredrik Barth expliqua que les cultures se construisent au contact des autres et servent à poser des limites entre les groupes, Pierre Bourdieu, avec La Distinction (1979), décrivit les « cultures de classe » comme des outils de différenciation. Nicolas Journet, en dernière analyse, affirme que « la notion d’identité tend à expliquer celle de culture » [9].
En revenant au dictionnaire, on constate que la définition de la culture renvoie à l’« ensemble des activités soumises à des normes socialement et historiquement différenciées, et des modèles de comportements transmissibles par l’éducation, propre à un groupe social donné » [10]. Cette définition nous paraît acceptable, et notre sujet nous amène à nous focaliser sur les cultures nationales.
Première constatation : le caractère relatif (à la société et à son histoire) et dépendant (de l’éducation et de modèles comportementaux pouvant être imposés) de la culture, qui interdit d’ériger celle-ci en valeur sans la soumettre à l’examen de la raison. Plus schématiquement, il faut, pour la rendre légitime à nos yeux, la soumettre à notre grille de lecture politique et en défausser les éléments non conformes… ce qui signifie que la culture n’a pas une valeur intrinsèque positive et que seule la grille en a une. Seul mouvement contestataire à ne laisser aucun élément en dehors du champ de sa critique, l’anarchisme se doit en effet, pour être pertinent, donc légitime, d’examiner le fait culturel et de le soumettre lui aussi au feu nourri de son observation afin de promouvoir la liberté et l’égalité partout où cela est possible.
En tant qu’ensemble de traditions, voire de normes, la culture échappe généralement à toute forme de rationalité, de jugement, et donc de justice. Son acceptation par les individus et les populations repose sur le conditionnement, puisque sa transmission lui fait également acquérir une proximité affective qui la rend légitime à leurs yeux sans aucune forme de critique.
Irrationnelle, la culture, du fait de cette normalisation, de cette institutionnalisation d’habitudes prises dans l’histoire, est aussi un outil d’exclusion des individus puisqu’elle devient une référence constitutive de l’identité et donc de l’unité de la société.
Il importe donc qu’elle soit soumise aux valeurs universelles de l’anarchisme : la justice ne doit souffrir aucune exception, aucune tempérance, et la culture, notamment sociétale, ne doit pas être un vase clos fonctionnant en toute autonomie, légitime parce qu’historiquement déterminée et populairement acceptée : non, tout ce qui est réel n’est pas rationnel, et le statut d’« identitaire » ne saurait être un palliatif à la soumission à nos valeurs et à notre morale.
Sont souvent culturelles, en effet, toutes ces réalités contre lesquelles le mouvement libertaire s’est historiquement inscrit, avec plus ou moins d’efficacité : inégalités sociales, inégalités politiques, inégalités sexuelles, etc. Il serait long et fastidieux d’énumérer toutes ces barbaries culturelles, qui achèvent de montrer que l’on peut et doit parfois aller au-delà de la culture.
Quant à la nation, il semble qu’elle puisse être le trait d’union entre culture, système politique et territoire, ce qui ne peut qu’attiser notre méfiance.
Nation
Comme nous le verrons plus loin, les partisans de l’indépendance des « identités régionales » ont à cœur, comme dans le cadre colonial, de poser leur patrie comme une nation opprimée. C’est là une des clés de leur légitimité.
Or, la seule « nation » renvoie à certains éléments, à la fois objectifs et subjectifs, qu’il nous est possible d’examiner ; leur correspondance avec la réalité est un moyen de déterminer le degré d’idéologie dans les thèses et mouvements anarcho-indépendantistes : en effet, « la "nation" telle qu’elle est conçue par le nationalisme peut être reconnue à titre prospectif, alors que la "nation" réelle ne peut être reconnue qu’a posteriori » [11].
Il est vrai que les anarcho-indépendantistes prétendent prévenir ou répondre à un souhait de la population : les Bretons veulent, les Basques veulent, etc.
Montrer le caractère a-national d’une entité est donc le meilleur moyen de démontrer qu’il s’agit là d’un mensonge et de prouver l’état avancé de décrépitude idéologique du mouvement, c’est-à-dire, en ce qui nous concerne sa proximité vis-à-vis du nationalisme. Pour cela, il est nécessaire d’établir la liste des critères possibles et de fixer une généralité fiable, d’autant que, selon Liah Greenfeld, la seule fondation du nationalisme est une idée, l’idée de la nation [12].
Le mot « nation », qui a une origine latine (nasci : naître) a d’abord été utilisé au Moyen Âge dans les milieux aristocratiques et universitaires pour désigner des groupes, notamment d’étudiants, supposés avoir une même origine géographique. Il y avait ainsi à la Sorbonne quatre « nations » estudiantines : française, picarde, anglaise et normande. Au XVIIe siècle apparaît l’acception du mot « nation » comme population d’un Etat ou d’un pays. Il figure en 1694 dans le Dictionnaire de l’Académie française : « Tous les habitants d’un même Etat, d’un même pays qui vivent sous mêmes lois et usent de même langage » [13]. Mais cette définition, datée, est sans aucun doute restrictive, car liant les individus à leur gouvernement sans tenir compte de leurs aspirations. Les guerres dites ethniques ou nationales qui déchirent de nombreux Etats dans le monde, comme l’existence de peuples sans Etats reconnus comme des nations sont un fameux contrepoint. Le géographe Yves Lacoste, qui considère la nation comme « le concept géopolitique fondamental » [14], nuance lui-même cette opinion toujours répandue qui considère que la nation est « la population d’un pays » [15]. Comment, alors, la définir, et faire le partage entre objectif et subjectif ?
Rebondissant sur la polémique autour d’une définition, E. Hobsbawm rappelle que ni Renan ni Fichte ne s’étaient prononcés exclusivement en faveur de l’une ou l’autre définition, et propose, dans le cadre de son étude, de ne s’attacher à aucune définition a priori : « Dans tous les cas, l’agnosticisme est la meilleure attitude que puisse adopter un étudiant qui s’aventure pour la première fois dans ce domaine […]. Nous prendrons comme hypothèse de travail que tout groupe suffisamment important en nombre dont les membres se considèrent comme faisant partie d’une “nation” sera considéré comme tel » [16]. Mais ce faisant, il privilégie indubitablement son existence subjective. C’est également le choix affirmé par Serge Berstein.
De la même façon, Benedict Anderson insiste bel et bien sur son aspect essentiellement subjectif : « [La nation] est une communauté politique imaginaire, et imaginée comme étant à la fois naturellement limitée et souveraine » [17]. C’est cette notion de souveraineté qui me paraît la plus importante dans le fait national.
Ces propositions qui, contrairement aux définitions des dictionnaires, mettent en avant des éléments subjectifs (bien que ceux-ci reposent sans aucun doute sur des éléments objectifs), nous paraissent intéressantes ; toutefois, il importe de se poser la question : nation imaginaire, donc imaginée, certes, mais « imaginée par qui ? ». Si le fait qu’un groupe politique affirme l’identité nationale du groupe humain auquel il dit appartenir a du sens, ce n’est évidemment pas sur l’opinion d’une extrême minorité que l’on peut décider du statut à accorder à cette communauté. De fait, il importe de se pencher sur la « vision de la nation par en bas, c’est-à-dire du point de vue […] par les gens ordinaires » [18].
Pour reprendre Hobsbawm, c’est la population tout entière qui fait la nation. On s’aperçoit alors qu’éléments subjectifs et objectifs se mêlent : la subjectivité, pour l’historien ou le sociologue cherchant à élucider ce sentiment national, devant être suggérée par quantité de faits tels que l’utilisation de la langue, la récurrence des références culturelles nationales et leur dynamisme, le caractère accru de la « vie locale », l’importance, la représentativité et la combativité des organisations nationalistes, etc. Les opinions concordent donc : pas d’exclusivité de l’une ou l’autre approche et multiplicité des critères de sélection, mais primat de la subjectivité. Le cas par cas est ainsi de rigueur : seule une approche multidirectionnelle peut déterminer le statut d’une sociation.
Continuant son historique, Yves Lacoste déplore les massacres commis au nom de la nation, mais récuse l’idée, conséquente, de l’abandon du concept en tant que revendication. Pour lui, « il faut l’examiner attentivement, en tenant compte des différentes conceptions […] et des conditions géopolitiques » [19] : il faut prendre en compte « la notion de "communauté politique" »… « La nation entend être gouvernée par l’un des siens ».
« Communauté politique » : la notion de souveraineté et d’indépendance revient, et le grand mot est lâché ! Car c’est bien ce mot qui, pour nous, représente tout le problème du phénomène national : en effet, ce que nous contestons, dans ce sentiment national, c’est non seulement qu’il implique un sentiment de proximité entre toutes les personnes issues d’une même nation, qui, alors que nous appelons à la lutte des classes, crée une « disposition subjective commune » [20] entrant nécessairement en concurrence (et quel qu’en soit d’ailleurs le degré) avec celle-ci, mais aussi que cette proximité est susceptible d’avoir à terme des conséquences politiques.
« L’essence d’une nation, disait Renan, est que tous les individus aient beaucoup de choses en commun et aussi que tous aient oublié bien des choses. Aucun citoyen français ne sait s’il est Burgonde, Alain, Taïfale, Visigoth ; tout citoyen français doit avoir oublié la Saint-Barthélemy, les massacres du Midi au XIIIe siècle. » [21]
La nation repose bien sur l’amnésie voire sur le mensonge, sur l’oubli des divergences d’intérêts entre individus issus de classes sociales opposées : « L’oubli et je dirais même l’erreur historique, sont un facteur essentiel de la création d’une nation, et c’est ainsi que le progrès des études historiques est souvent pour la nationalité un danger » [22].
Et c’est parce qu’il est généralement l’instrumentalisation de cet oubli que nous nous méfions du nationalisme : Chris Duncan, de l’université Concordia, évoque « l’équation normale d’une nation, […] une entente populaire qui commence du bas vers le haut » [23].
Il ne s’agit pas d’avancer que toute nation est nécessairement une société de classes, ni même le support d’un système oppresseur, mais d’expliquer que toutes les conditions sont réunies, dans le phénomène de promotion de la nation, pour que l’évolution se fasse dans ce sens : négation théorique de la contingence et l’historicité de la nation (celle-ci étant posée en tant que principe), c’est-à-dire une volonté de figer un accident de l’histoire, etc.
La nation n’est pas que ce désir raisonné de vivre ensemble, sur la base d’affinités conséquentes : elle suppose et institutionnalise des affinités. Elle n’est donc pas que ce regroupement spontané, si compatible avec notre fédéralisme libertaire : à dire vrai, elle en est une limitation.
Le dictionnaire, en reprenant l’aspect binaire de sa définition savante, estime qu’elle est à la fois une « communauté humaine caractérisée par la conscience de son identité historique ou culturelle, et généralement par l’unité linguistique ou religieuse » [24] et également « une telle communauté, définie comme entité politique réunie sur un territoire ou un ensemble de territoires propres et organisée institutionnellement en Etat » [25]. La notion de « conscience » est bien mince pour signifier le caractère subjectif de la nation. Toutefois, ce qui fait la nation, une fois de plus, c’est bien un désir plus ou moins actif de communauté politique trouvant sa source dans un sentiment de communauté culturelle et historique.
Le concept de nation, de facto, est éminemment politique et l’on ne peut l’employer à la légère. On peut désormais le questionner et se demander quelle est la légitimité de l’association unité culturelle/ unité politique : l’époque veut que la « démocratie de proximité » soit une référence, mais n’est-ce pas là une « opération pirate », détournant les regards du « fond » vers la « forme » ? L’association entre culture et politique suppose l’existence d’une norme, d’une norme institutionnalisée, car le principe de la nation autonome suppose des frontières culturelles puis géographiques : donc, qu’il y ait Etat ou pas, l’existence de la nation suppose à court ou à long terme l’exclusion des individus ne correspondant pas à cette norme.
L’ambiguïté de la nation, c’est qu’elle est à la fois un fait et un objectif. En tant que fait, sorte de nation objective, suivant l’expression de Fichte, elle ne peut être niée, quoiqu’elle puisse être combattue. En tant qu’objectif, elle tend à devenir une institutionnalisation du fait, celui-ci étant érigé en dogme : d’une identité témoin d’un regroupement volontaire et/ou spontané, on passe à une identité théorisée, dont on oublie volontairement le caractère évolutif. La réalité n’est donc pas nécessairement celle d’un « contrat national » se rompant à l’envi, comme l’expose assez naïvement la chanson de Tri Yann, La découverte ou l’ignorance, qui reprend par ailleurs un texte bretonniste bien connu. Le sentiment national est l’intrusion plus ou moins spontanée du sentiment dans le domaine politique.
Il peut donc aussi être un conditionnement qui, par le biais d’une propagande étatique utilisant ce sentiment comme un ciment régulateur des conflits sociaux et comme base de son autorité, ou en tant que stratégie de défense d’une communauté menacée, ou encore – pour contourner tout déterminisme – comme simple idéologie, participe d’une logique d’exclusion.
Dans un de ses ouvrages [26], Pierre Clastres mettait ainsi en évidence le rôle fondamental de la guerre dans les sociétés primitives : c’est en excluant l’Autre et par rapport à lui que celles-ci parviennent, selon lui, à fonder leur existence communautaire et leur idéal de vie en autarcie.
Dans le cas national, le schéma pourrait être similaire : la nation, qui n’a tout d’abord qu’une existence subjective, préserve son identité par opposition à d’autres nations. De manière plus polémique, Michel Cahen affirme que, en tant que « réalité sociale subjective dessinée par un ensemble de gens qui se reconnaissent tels », « la nation Corse et la nation France peuvent parfaitement coexister » [27]. Mais c’est oublier que le phénomène national n’a de sens que lorsqu’il entend transformer cette subjectivité en objectivité en modifiant la réalité. Il ne faut pas oublier que la nation est une politisation de l’identité.
Il faut rajouter ici que l’expression « nation objective » n’est pas tout à fait pertinente, et suppose même quelques dérives : la nation est aussi nécessairement une construction mentale qui doit être combattue comme étant un germe d’exclusion et une négation de l’individu et de ses droits. En effet, la nation est la conceptualisation et l’institutionnalisation d’une réalité purement contingente.
Jean-Jacques Rousseau dépeint ainsi ce que sont pour lui les conséquences ultimes de la division de l’humanité en nations : « De là sortirent les guerres nationales, les batailles, les meurtres, ces représailles qui font frémir la nature et choquent la raison, et tous ces préjugés horribles qui placent au rang des vertus l’honneur de répandre le sang humain. Les plus honnêtes gens apprirent à compter parmi leurs devoirs celui d’égorger leurs semblables : on vit enfin les hommes se massacrer par milliers, sans savoir pourquoi ; et il se commettait plus de meurtres en un seul jour de combat, et plus d’horreurs à la seule prise d’une ville, qu’il ne s’en était commis dans l’état de nature, durant des siècles entiers, sur toute la face de la terre. Tels sont les premiers effets qu’on entrevoit de la division du genre humain en différentes sociétés. [28] »
L’élément essentiel de la nation, par-delà les contingences, est bel et bien l’association d’idées entre communauté de culture et communauté politique. Cette association est lourde de sens, la culture, irrationnelle, devenant un élément de définition du politique. Avec la promotion de la nation, tout converge vers un ordre irrationnel, c’est-à-dire faisant la part belle à une idéologie et à une pratique antilibertaires : car l’on peut craindre que la différenciation entre nationalisme de droite et nationalisme de gauche ne puisse s’appliquer qu’à un présent ou un futur très proche. Pour l’heure, il convient surtout de s’attacher à d’autres problèmes, celui de la prétendue opposition entre ethnie et nation.
Ethnie
Il faut précisément donner quelque attention à des termes que les anarcho-indépendantistes ou leurs partisans emploient alternativement comme synonymes ou bien au contraire comme des termes au sens opposé : nation et ethnie. Il importe donc de savoir ce qu’il en est réellement. Le peuple, par exemple, est défini comme un « ensemble d’êtres humains vivant sur le même territoire ou ayant en commun une culture, des mœurs, un système de gouvernement » [29]. Dictionnaire oblige, il s’agit là d’une sorte de nation objective, à laquelle tout mouvement nationaliste fait appel. Mais plus compliqué est le cas de l’ethnie en raison, une fois de plus, de la multiplicité des interprétations.
Une ethnie est, selon le dictionnaire, un « groupement humain caractérisé principalement par une même culture, une même langue » [30] ). Précisant cette explication, J.-L. Amselle constate que les définitions de l’ethnie, peu nombreuses, « tournent toutes autour de quelques grandes caractéristiques » [31]. En 1945, M. Fortes présentait l’ethnie comme l’horizon le plus lointain que les groupes connaissent, au-delà duquel les rapports de coopération et d’opposition ne sont plus significatifs. Pour P. Mercier, en 1961, l’ethnie est un « groupe fermé, descendant d’un ancêtre commun ou plus généralement ayant une même origine, possédant une culture homogène et parlant une langue commune, c’est également une unité d’ordre politique » [32].
Même constat chez G. Nicolas en 1973 : « Une ethnie, à l’origine, c’est avant tout un ensemble social relativement clos et durable, enraciné dans un passé de caractère plus ou moins mythique. Ce groupe a un nom, des coutumes, des valeurs, généralement une langue, propres » [33].
Un « rapide inventaire » [34] des différentes définitions de l’ethnie témoigne d’une « grande convergence des positions sur ce thème » même si, J.-L. Amselle le montre, la difficulté pour les anthropologues est plutôt généralement d’indiquer précisément ce qu’ils mettent sous ce vocable. Mais quoi qu’il en soit, cette définition n’est pas sans nous rappeler celle de la nation.
Toutefois, comme le rappelle Amselle, l’utilisation du concept d’ethnie est liée à la volonté de classer à part certaines sociétés en leur déniant une qualité spécifique : l’historicité. Ainsi, si, avec ethnos, le grec renvoie à peuple et à nation, il lui oppose également la polis. Selon V. Ehrenberg, en effet, il est « vraisemblable » que l’ethnos soit « beaucoup plus proche de la société primitive » [35]. C’est un constat partagé par Samir Amin qui, en 1979, affirme que « le phénomène national ne peut être séparé de l’analyse de l’Etat » [36] : pour les marxistes, en effet, l’historicité est très liée à l’Etat. Entre ethnie et nation, donc, s’opérerait « le grand partage entre anthropologie et sociologie : société sans histoire/société à histoire, société préindustrielle/société industrielle, communauté/société » [37].
Elikia M’Bokolo souligne toutefois le rôle primordial de la colonisation dans la « fabrication » des ethnies africaines, qui se voient classifiées et regroupées par les Etats coloniaux.
« Que les groupes soient classés et identifiés, dit Jean Bazin, c’est le revers d’une liberté perdue : celle de se nommer soi-même. Il est vrai que de cette étiquette au départ arbitraire, ou même parfois absurde, une nouvelle identité politique peut naître, à l’épreuve des rivalités ou des résistances dans un même espace souverain » [38]. Pour lui, sous l’Etat colonial, les nations, même lourdes de passé, deviennent des ethnies, « au même titre que les sociétés fragmentées en micro-unités indépendantes » [39].
En définitive, « la délimitation de l’objet de la discipline aux seules sociétés traditionnelles s’avère surtout problématique au regard du projet de l’anthropologie dont la finalité est de penser et de comprendre l’unité de l’homme à travers la diversité des cultures, de toutes les cultures » [40].
Qu’attendre alors de la notion d’ethnie ?
Vacher de Lapouge, qui en fut l’introducteur à la fin du XIXe siècle pour affiner ses conceptions racialistes, l’identifiait au groupe défini par une langue et une culture communes (donc une tradition intellectuelle) et l’opposait à la race, définie par une hérédité physiologique ou une solidarité historique. « La question de l’ethnie est dès cette époque liée au nationalisme et à la légitimité de l’Etat national » [41].
Depuis lors, le terme est toujours au centre de polémiques ; Max Weber mettait l’accent, contre ceux qui identifiaient l’ethnie à une semi-espèce, sur son aspect essentiellement subjectif, un point de vue généralement partagé aujourd’hui. Il est vrai que la nature « exotique », anhistorique, de l’ethnie semble être actuellement remise en cause, comme l’illustre le développement de l’ethnologie.
N’étant pas des spécialistes, nous n’avons pas de place à prendre dans ce débat ; ainsi, nous nous contenterons de rejeter la mise en opposition des deux notions, percevant peut-être la nation, mais avec bien des réserves, comme « une forme particulièrement durable et intense de l’ethnie » [42].
Ces certitudes établies, nous pouvons rejeter les définitions fantaisistes, employées par certains anarcho-indépendantistes pour revendiquer et opposer le terme ethnie à celui de nation, trop connoté d’un point de vue anarchiste, mais aussi identifié à une entité oppressante.
Ainsi, dans Le Monde libertaire, il est des militants pour évoquer « les différentes ethnies qui composent une nation » [43]. Il en est d’autres, plus légitimement, pour revendiquer leur « appartenance à l’ethnie corse » [44].
Ce dernier point doit retenir particulièrement notre attention : l’« affiliation ethnique » impliquant, comme l’affiliation nationale, une identification consciente, n’est-elle pas elle aussi susceptible de développer des solidarités inter-classistes, des solidarités capables d’annihiler toute affirmation de l’individu ? Car l’ethnie, comme la nation, « est par définition interclassiste » [45]. Ce sont autant de problèmes qu’il va nous falloir aborder.
Il est clair, en tout cas, qu’en invoquant des « ethnies régionales » [46], ou « ethnies minoritaires », les anarcho-indépendantistes tentent, par l’emploi d’un terme qui a été associé par l’histoire et les médias, de même que par un certain « afro-pessimisme », à l’Afrique (Afrique théâtre de « guerres ethniques » – et ce en dépit des remises au point faites par les africanistes), de faire un lien avec le problème de la colonisation.
Ces rapprochements sont-ils fondés ? Il nous faudra y revenir très bientôt, après avoir fait ce rappel : il apparaît que ethnie et nation ont bel et bien des apparences synonymiques et que la diversité de leur emploi renvoie finalement, outre à la diversité des motivations politiques (on en a vu quelques exemples), à la démarche poursuivie ou éventuellement à la discipline dans laquelle on s’inscrit.
Nationalisme
A propos du nationalisme, Raoul Girardet se fait plus téméraire et paraît croire en la possibilité de mettre en évidence une essence nationaliste : « Au-delà de la multiplicité des définitions, il semble […] qu’une formulation plus générale puisse être présentée, susceptible de recouvrir les réalités les plus aisément reconnaissables et plus communément reconnues du phénomène nationaliste » [47]. « Dans la situation antérieure à l’existence d’un Etat-nation juridiquement autonome, le nationalisme semble ainsi pouvoir être défini comme la volonté d’une collectivité ayant, par suite de circonstances diverses, pris conscience de son individualité historique, de créer et de développer son propre Etat souverain. Dans le cadre d’un Etat-nation déjà constitué, il peut apparaître, sur le plan politique, comme le souci prioritaire de défendre l’indépendance et d’affirmer la grandeur de l’entité nationale ; sur le plan moral et idéologique, il semble se résumer dans l’exaltation du sentiment national […] [48] »
Exception faite de la référence à l’Etat [49], tout notre crédit peut être accordé à cette définition, qui s’inscrit dans la coutume historienne de distinguer entre un nationalisme d’existence et un nationalisme de puissance [50]. Dans le No Pasaran déjà cité, Régis établit une différence entre le « chauvinisme » et la défense d’une « identité », suivant l’opinion anarcho-indépendantiste que le nationalisme – dans la mesure où il est perçu comme négatif – se définit par son caractère hiérarchique.
Mais de quoi est faite l’essence du nationalisme ? Sur quels critères peut-on juger qu’une organisation ou qu’un individu est nationaliste ?
Pour Ernest Gellner, « le nationalisme est essentiellement un principe qui exige que l’unité politique et l’unité nationale se recouvrent » [51]. Etre nationaliste, ce serait donc poser en nécessité l’existence des nations, ce serait considérer celles-ci, non comme un fait de l’histoire, mais comme un horizon indépassable. Définition appréciable, mais qui nécessite sans doute quelques explications. Tel que le définit le dictionnaire, dont les propositions concordent au moins en partie avec les recherches savantes, le nationalisme renvoie à une triple définition :
–- « attachement exclusif à la nation dont on fait partie et à tout ce qui lui est propre » ;
–- « doctrine politique revendiquant la primauté de la puissance nationale sur toute autre considération de rapports internationaux » ;
–- « mouvement fondé sur la prise de conscience, par une communauté, de ses raisons de fait et de droit de former une nation » [52].
C’est également un cadre ternaire, quoique plus engagé et n’évoquant pas cette notion d’ « horizon national », qui est avancé par Eric Nguyen :
–- Le nationalisme « se confond avec l’attachement à la patrie, la volonté de la défendre contre toute agression extérieure » [53].
–- Il peut désigner « l’aspiration des nations opprimées ou dispersées à se constituer en Etat-nation souverain, à réclamer leur indépendance » [54].
–- Il peut être « une idéologie d’extrême droite qui, dans un Etat-nation déjà constitué, subordonne tout aux intérêts de la nation, à sa gloire, à son rayonnement, à sa puissance » [55].
On retiendra l’utilisation, dans ce troisième tiroir, du qualificatif « extrême droite », dont l’emploi a sans doute comme ambition le discrédit, politiquement correct aidant, préfigurant ainsi une opposition entre deux « bons » nationalismes et un « mauvais » nationalisme. Mais peut-il y avoir un « bon » nationalisme ? Que signifie cet élément commun : la présentation de la nation comme horizon politique ? Ainsi, « la défense de la patrie » est une position de principe ne tenant pas compte des contingences politiques. Il en est de même pour les nations opprimées ou dispersées : la souveraineté ne porte en elle a priori aucune garantie d’émancipation et de bien-être. Ainsi, la particularité exclusive du nationalisme d’extrême droite paraît fort nuancée : le nationalisme exige de l’individu une négociation de l’oubli de soi et de ses besoins propres.
Ce qui ressort, en effet, et en définitive, des trois définitions établies, c’est que, quoique concurrentes, elles sont toutes trois basées sur l’érection en principe politique du lien affectif qui existe entre les individus et leur communauté culturelle.
A l’affectif, c’est bien à cela que Max Gallo, l’« historien », fait appel dans L’amour de la France expliqué à mon fils : « – Elle est cela pour toi, [la France,] dit-il, une personne, qui a une longue histoire, des cicatrices, des blessures ouvertes, un avenir peut-être incertain, des défauts et même des vices. Tu veux bien qu’on te dise tout cela, et tu réponds : "Mais c’est la France." Parce qu’elle est en toi. […] », « –Tu ne me convaincs pas, répond son fils. Tu cherches à m’émouvoir et tu y réussis » [56].
Participer à cette rationalisation de l’affectif, tentative de légitimation de ses pulsions, de son irrationalité, c’est prendre le risque que la ligne politique qui en découle ne soit plus en accord avec l’idéal de Justice qui, avec ce grand « J » proudhonien, découle de la raison et d’elle seule.
L’anarchisme, en tant que mouvement soucieux de l’émancipation universelle, doit se garder de toute immixtion des sentiments dans la théorie politique. Ces sentiments, en effet, sont synonymes de tromperie : comme l’illustrait le mythe de la caverne de Platon, « avoir le sentiment » est un état bien différent d’« avoir la conviction ». Et sans polémiquer sur les limites de la raison et de la science, sur la différence entre vérité absolue et vérités relatives, il apparaît que dé-rationaliser la politique, c’est rendre possible toutes formes de manipulations internes et externes à un mouvement, c’est ouvrir la porte à toutes les déviances vis-à-vis de nos considérations et de nos objectifs. De fait, considérer l’humanité en termes de nations ou de peuples autrement que dans le cadre d’une division néfaste provoquée par l’Histoire suppose la négation de la légitimité majeure de toute perspective de classe et surtout de la primauté de l’individu, constitutives de l’anarchisme. Dans l’éventualité où perspective de classe et perspective individualiste seraient conservées, elles le seraient dans le cadre étriqué de l’horizon national, où il est possible qu’elles ne conservent pas la même vigueur.
Il est bien impossible de concilier affirmation de la liberté des individus et affirmation du sentiment national, premier pas vers le nationalisme, les deux entrant en confrontation exactement comme la raison affronte la passion. Cela a toujours été l’opinion des anarchistes : « Qu’est-ce que le patriotisme ? Est-ce le fait d’aimer le lieu où l’on est né, l’endroit où se sont déployés les rêves et les espoirs de notre enfance, nos aspirations les plus profondes ? […] Suivant la théorie du patriotisme, notre globe serait divisé en petits territoires, chacun entouré d’une clôture métallique. Ceux qui ont la chance d’être nés sur un territoire particulier se considèrent plus vertueux, plus nobles, plus grands, plus intelligents que ceux qui peuplent tous les autres pays. Et c’est donc le devoir de tout habitant de ce territoire de se battre, de tuer et de mourir pour tenter d’imposer sa supériorité à tous les autres. [57] »
Une opinion similaire était exposée par Aristide Lapeyre : « Diviser le monde en nations ; tout faire pour donner à chacune d’elles une physionomie particulière, un caractère spécifique ; lui donner une langue et une histoire ; des mœurs et une morale en opposition avec les expressions collectives des autres nations ; soutenir une presse et une littérature qui chantent les louanges des "qualités" de son pays, de sa nation, de sa race ; développer le sentiment de supériorité, de domination, d’autorité ; tout cela pour aboutir à ce que chaque individu se sente une cellule du corps social, réel, positif, qu’est sa nation, la seule, l’unique, la divine Nation, celle que redoutent et envient toutes les autres nations. "Le patriotisme n’est pas seulement le dernier refuge des coquins ; c’est aussi le premier piédestal des naïfs et le reposoir favori des imbéciles. […] Le nationalisme, c’est cette stupidité, cette abjection et ce crime. Il a les porte-plume, les porte-parole et les porte-drapeaux qu’il mérite. Tout individu doué de bon sens et de dignité doit le dénoncer sans répit et sans trêve le combattre. La lutte est engagée entre le nationalisme et l’internationalisme. Ceci tuera cela. [58] »
Pose-t-on l’existence des nations en principe plutôt qu’en fait : on se situe dans un schéma nationaliste. Donne-t-on des conséquences politiques à ce principe et accorde-t-on à une nation, creuset de classes antagoniques et de multiples individualités, des droits en tant qu’entité : on est nationaliste. Ainsi, les différences entre les diverses formes de nationalisme ne nous paraissent pas avoir d’importance d’un point de vue théorique, puisque nous les considérons toutes trois comme illégitimes.
A notre point de vue, puisque l’anarchisme s’inscrit dans une logique d’émancipation des individus, il ne doit pas considérer que « le nationalisme peut aussi concerner des aspirations authentiques à la liberté » [59] et il doit affirmer que, s’il peut rassembler des individus ayant de telles aspirations, celles-ci ont pour cadre l’illusion ou la tromperie. Etant des amants passionnés de « la culture de soi-même » [60], nous ne saurions accepter l’institutionnalisation de réalités contingentes voulue par le nationalisme : ce processus est un processus d’enfermement et de conditionnement des individus.
On comprendra, dans ce cadre, combien le « nationalisme de gauche » ne peut être qu’un mythe, à moins de limiter la notion de gauche à des réalisations sociales, dont la pérennité ne pourrait d’ailleurs être garantie par les probables évolutions d’un mouvement n’étant que partiellement émancipateur.
A l’inverse, le fédéralisme libertaire repose sur un « contrat individuel » impliquant un choix : or, la nation rompt ce contrat en transcendant les affinités. Reposant sur l’obligation, celle d’un individu enchaîné à « sa » culture, à « sa » communauté, qui lui seraient attribuées dès la naissance, ou qui seraient liées à sa qualité de citoyen, nous ne saurions croire qu’un projet de société reprenant de tels principes puisse concerner des « aspirations authentiques à la liberté ».
Reprenant ces conclusions, il semble que nous nous inscrivions dans une certaine « tradition anarchiste », qui affirme que « le nationalisme revendique le droit des peuples à être exploités par leur propre classe dominante, par des oppresseurs de leur propre pays » [61]. Mais quid, alors, de ce principe maintes fois réaffirmé, dans différents camps politiques, et même énoncé dans la charte des Nations unies [62], qu’est le « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » ? Ce dernier, revendication souvent reprise dans les rangs du mouvement socialiste (entendons par là : réformiste, communiste, anarchiste), se présente dès la première analyse comme un mot d’ordre ambigu. L’exemple du communisme peut également à ce propos fournir une illustration, en comparaison notamment avec une certaine tradition anarchiste d’anationalisme.
Karim Landais, 2005, chapitre extrait de "Anarchisme nation identité culture - régionalisme, nationalisme et anarcho indépendantisme" publié aux Editions Orphéo, 184 pages 8 euros
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