Cet article est paru en novembre 2008 sur le blog Spartacus1918.
Après Lehman, AIG, Fannie Mae, Freddie Mac, les banques islandaises... à qui le tour ?
Au début du mois de novembre 2008, la patate chaude des CDS(crédits par défaut) est devenue l’objet de plusieurs réunions aux niveaux continental et international. La Banque centrale européenne a réuni les représentants des banques et associations sur le problème, la Commission européenne un groupe de travail spécial. De l’autre côté de l’Atlantique, on cherchait à maquiller le plus possible « la monstruosité des pertes » avant la réunion du G20 du 15 novembre.
Le 17 novembre, La Tribune titre « Des chambres de compensation pour limiter les risques, c’est bien la seule chose concrète qui est sortie du sommet du G20 » En effet, la Réserve fédérale américaine (Fed), la Securities and Exchange Commission (SEC) et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), trois institutions clefs, ont décidé de coopérer en vue de lancer, d’ici la fin de l’année [2009], des chambres de compensation privées en charge d’assurer la sécurité des transactions sur le marché des Credit Default Swaps (CDS), en fait pour maintenir un semblant d’architecture financière.
Selon le même journal, « les grandes Bourses, de NYSE Euronext aux grands marché de Chicago, ont proposé de se porter garante de ces opérations en montant une ou plusieurs chambre de compensation ». La Tribune du 17 novembre fait encore remarquer que les Etats-Unis ont purement et simplement doublé les Européens, les suspectant de vouloir réguler le G20 : « Des pays européens espéraient la création d’une chambre internationale, publique, placée sous le contrôle des gouvernements ou du FMI. Mais les établissements de Wall Street ont milité pour la constitution d’une chambre américaine, indépendante et privée… qui a reçu l’accord de la Fed vendredi ! »
Juste avant le sommet la DTCC, le compensateur américain, publiait la liste des mille plus grosses émissions de CDS (La Tribune du 6 novembre). On apprenait qu’il ne s’agissait plus d’une valeur de 55 000 milliards de dollars, la baudruche s’étant dégonflée on en serait à 33 557 milliards fin octobre. Si vous cherchez une explication, on vous dira : « Ainsi, si 188,6 milliards de dollars de CDS ont été traités sur la dette de la Turquie, son défaut ne signifiait “que” 7,6 milliards de dollars de transferts nets entre acheteurs et vendeurs de CDS. » Le moins que l’on puisse dire, c’est que les fameux marché de dérivés sont tellement opaques que les montants qui leur sont attribués sont de dimension variable. Selon l’ISDA (International Swaps and Derivatives Association), le marché des CDS s’élèverait à plus de 50 000 milliards de dollars, soit le triple du montant repris par l’OCC .
Quoi qu’il en soit, la spectaculaire dégringolade de la consommation américaine va accroître encore toutes les difficultés. Les entreprises, coincées entre le marteau de la sous-consommation et l’enclume du manque de crédit, vont sombrer les unes après les autres. La déflation frappe à la porte.
Nous venons d’apprendre que Citigroup, la plus grande organisation de services financiers au monde, se prépare à supprimer 53 000 emplois. Elle en avait déjà éliminé 23 000 entre janvier et septembre. La situation de ce fleuron bancaire américain est si inquiétante que des analystes demandent son démantèlement rapide avant la catastrophe. Quant au fleuron de l’assurance américaine AIG,la Réserve fédérale est contrainte d’intervenir, pour la troisième fois, en injectant 29 milliards de dollars. Jusqu’à présent 150 milliards d’argent public ont été nécessaires pour éviter la banqueroute du groupe .
En Europe, comme nous l’annoncions, les CDS vont maintenant faire tomber les gros bonnets de la finance. Le 18 novembre, les cours des actions de quatre banques figurant au CAC 40 se sont effondrés. Depuis le 10 septembre 2008 : - 40,50 % pour le Crédit agricole, - 35,89 % pour la BNP Paribas et - 46,16 % pour la Société générale. Quant à Dexia, l’injection de l’argent public n’a pas empêché la chute de son titre : - 66,24 % depuis le 9 septembre 2008.
Au moment où nous écrivons ces lignes, on apprend que l’Allemagne et le Japon entrent en récession, que l’Equateur est au bord du défaut de paiement, que les faillites aux Etats-Unis ont augmenté de 34 % au mois d’octobre. Quant aux prix, ils chutent et la presse commence à parler de déflation. A Taïwan, le gouvernement décide de distribuer des bons d’achat de 100 dollars, pour relancer la consommation.
Gérard Bad
21 novembre 2008