Telle est l’alternative bizarre à laquelle les organisateurs des manifestations anti-sommets réduisent les militants ou sympathisants libertaires, de gauche, d’extrême gauche ou « radicaux ».
« Casser du flic » me semble parfaitement inutile, même si c’est certainement marrant et excitant pour ceux qui se livrent à ce sport de plein air… tant qu’ils ne se font pas prendre.
Récolter des mois de prison pour quelques minutes d’adrénaline, c’est cher payé, mais s’il y a des casse-cous pour le tenter, après tout ce n’est pas plus stupide que de rouler à 200 à l’heure en moto et sans casque sur le périphérique. Ou de conduire en état d’ivresse après avoir descendu 2 litres de tord-boyaux achetés chez Ed.
C’est surtout politiquement inutile car ce type de violence ne sert qu’à fournir des images chocs aux journaux télévisés et aux merdias, et cela n’est accompagné d’aucune explication compréhensible aux yeux de la masse de la population.
Quant à devenir indicateur, ou à collaborer de façon plus ou moins ouverte avec les flics, ce serait la seule attitude cohérente pour les organisateurs de ces manifestations anti-sommets qui espèrent (naïvement ou cyniquement) que la police leur permettra de manifester pacifiquement, alors qu’ils savent parfaitement que plusieurs centaines de loulous (manipulés ou pas) vont venir déranger leurs plans foireux de protestation gentille contre la méchante OTAN.
On me permettra de ne pas choisir entre les deux termes de cette alternative, et de n’avoir en tout cas ni sympathie ni compréhension pour ceux qui demandent à l’Etat bourgeois français de les protéger contre les méchants « casseurs » , que ces derniers soient des révoltés sincères ou des flics déguisés en « black blocs ».
Plutôt que de participer à ces manifestations spectacles anti-sommets qui n’ont jamais dérangé le moins du monde la bourgeoisie française ou internationale, il faudrait commencer par s’interroger sur le contenu politique nationaliste de ces événements dans chaque pays, sur les convergences entre extrême droite et extrême gauche dans un anti-américanisme primaire (qui affleure sous la dénonciation hypocrite du récent tournant français favorable à l’OTAN, alors qu’on sait parfaitement que cette collaboration a toujours continué à fonctionner) tout aussi ambigu et nocif que l’anticommunisme primaire d’antan.
Le jour où les anti-OTAN gaulois s’intéresseront vraiment aux interventions permanentes de l’armée française en Afrique ou en Afghanistan et se mobiliseront sérieusement dans la rue contre ces interventions, en s’en donnant tous les moyens matériels, je commencerai à prendre au sérieux leur « anti-impérialisme ».
En attendant, les manifestations anti-sommets ne font qu’entretenir la confusion politique et contribuer à ce que quelques innocents se trouvent condamnés à de lourdes peines.
Y.C.
9/4/2009
Judicieux commentaires de deux camarades
Il est vrai que la participation de la majorité des organisations politiques et syndicales françaises à ce contre-sommet est motivée par un certain nationalisme qui puise ses sources dans le gaullisme. Mais il ne faut pas pour autant éluder ces organisations -pour la plupart libertaires - sincèrement anticapitalistes, anti-impérialistes, telles que Dissent et qui donnent une autre grille de lecture quant aux raisons pour lesquelles nous devons nous opposer à l’OTAN.
De plus, ce serait oublier le formidable travail pédagogique qu’elles effectuent, non seulement pour promouvoir l’organisation d’un contre-sommet d’une manière non centralisée (le village autogéré), mais aussi par son contenu tout au long du 1er au 5 avril (ce n’était pas uniquement une manif à Baden-Baden le 3 et une à Strasbourg le 4 avril) avec des débats, des conférences, etc...
C’est un moyen incontournable pour le mouvement libertaire d’échanger et de se coordonner internationalement. On ne peut donc pas réduire l’organisation de ces contre sommets internationaux à de simples festivités où pacifistes traîneraient leurs savates dans des manifestations plan-plan et des ultra-radicaux recherchant la poussée d’adrénaline.
Certes, on peut critiquer le choix de certains de vouloir en découdre avec les flics et de détruire des biens capitalistes, d’un point de vue de l’utilité pour le mouvement social et de l’exploitation médiatique qui en est faite contre le mouvement social.
Mais ces actions ne résultent-elles pas de la détresse de militant-e-s qui tentent de s’organiser tant bien que mal car ils/elles ne se retrouvent plus dans les moyens traditionnels de luttes que sont les organisations syndicales ?
Aristide
************
L’iimportant c’est que le pouvoir cherche l’affrontement. et ça lui a déjà réussi (en Italie aussi) : les mémés regardent TF1 et se disent que les opposants à Sarkozy sont des casseurs. Les vidéos qui circulent sur Dailymotion (1) sont donc utiles, même si elles ne circuleront probablement que sur l’internet militant déjà convaincu.
Pour le reste, je pratique peut-être l’amalgame mais tout ça m’évoque un certain bougisme, un ultra-bougisme minoritaire dans l’Education nationale qui ne saurait être un palliatif sérieux à l’immobilisme des centrales syndicales, car c’est malgré tout la masse qu’il faudrait convaincre et mettre en action.
Elle a d’ailleurs montré en janvier et mars qu’elle était prête, je n’ai jamais vu tant de gens du privé dans les manifs. La stratégie des actions à visée médiatique perdra probablement face à un pouvoir qui n’attend que l’affrontement pour marginaliser et criminaliser l’adversaire. Je ne suis absolument pas convaincu par la nature anticapitaliste des rassemblements anti-G20 ou anti-OTAN, mais quelque part je ne leur reproche pas vraiment, y a tellement peu de vrais anticapitalistes, tout ça est le reflet de l’époque.
1. http://www.dailymotion.com/user/fee...
http://www.dailymotion.com/smashthe...
Anatole
**********
Annexe
Ceux qui chercheraient à sortir un peu du ronron antisommets pourront se reporter à deux articles issus de courants différents :
deux textes sur le g20 :
http://www.ibrp.org/fr/articles/200...
*********************************
Contestation du G20 - Une manifestation ou une diversion ?
Nous ne sommes pas les témoins d’une simple dégringolade financière. Nous sommes au milieu d’une grave crise du système capitaliste et cette crise perdure depuis 1971. Nous subissons aujourd’hui les effets de l’éclatement de la bulle spéculative fondée sur le capital fictif. Et ceux et celles qui en seront les victimes sont les créateurs et les créatrices de toute véritable richesse ; les travailleurs et les travailleuses du monde entier.
L’irrationalité du capitalisme est mise à nue. Pour ne donner qu’un exemple, quatre millions de domiciles ne sont pas occupés aux États-Unis, mais il y a des centaines de milliers de personnes qui vivent dans des « tent cities » ou dans des parcs de maisons mobiles.
Il n’est donc pas surprenant que la colère gronde. Il est encore moins surprenant que l’on veuille faire de la rencontre des 25 plus grands dirigeants de la planète au G20 de Londres un point central de l’expression de cette colère.
Pourtant, contrairement à la crise qu’ils ne peuvent résorber, les manifestations risquent d’être une diversion opportune pour Brown, Obama, Sarkozy, Harper et Cie. Plutôt que de représenter une menace réelle, les manifestations attireront l’attention du public loin des divergences entre les grandes puissances et leur incapacité de coopérer dans le but de prévenir que la crise s’approfondisse. Au mieux, les manifestations seront indicatives du niveau de « mécontentement social » auquel tous les leaders du monde seront confrontés à mesure que la situation économique se détériore. Mais alors que des partis sont chassés du pouvoir et que des gouvernement sont remplacés – de la Lituanie, la Hongrie et la République Tchèque jusqu’au Madagascar – comme conséquences directes de la crise économique, aucune alternative n’a jusqu’à maintenant été formulée au capitalisme en soi. Dans les plus importants centres du capitalisme, non seulement l’État reste intact, mais il est maintenant promu comme le sauveur de dernier recours. Le capitalisme ne peut être réformé
En fait, les mouvements organisateurs des activités de cette semaine s’imaginent que le capitalisme peut arriver à trouver une solution à la crise. Ils croient que l’occasion peut servir à mettre de la pression sur le G20 pour qu’il allège la situation. Le bal commence le 28 mars avec les syndicats, diverses associations caritatives et des organisations qui militent contre la pauvreté et qui revendiquent que le G20 mette la priorité sur le « monde ordinaire », un mot d’ordre réformiste particulièrement doucereux qui révèle le manque total de compréhension de l’énormité de la crise et qui se déroulera sans doute sans autre participation de la masse des travailleurs et des travailleuses que celle d’en prendre connaissance à la télé.
Les groupes organisateurs des manifestations du 1er avril n’entendent pas pour leur part être doucereux. Lors de la journée qu’ils ont rebaptisé « Poisson d’avril financier », les soi-disant anarchos remaniés de l’anti-mondialisme (No Global, Reclaim the Streets, etc.) se joindront à des organisations environnementalistes, vraisemblablement pour protester contre le capitalisme lui-même. Sauf que comme toujours, ils n’ont qu’une vision très étriquée et vague de ce qu’est réellement le capitalisme. Si le site web G20 Meltdown n’explique pas clairement qu’il vise à se débarrasser des gros bonnets et des barons de la finance, ses vociférations à l’encontre « des fraudeurs fiscaux, des siffleurs de bonis et des voleurs des prestations de retraite de ce monde du marché libre non règlementé » qui est en « désintégration » en arrive au même. Mais derrière toutes ces affectations radicales, nous soupçonnons qu’il y a l’espoir qu’un capitalisme réglementé puisse se réformer en quelque chose de plus humain. Comment interpréter autrement un « anticapitalisme » qui ne se concentre pas sur la nécessité d’abolir le travail salarié, dont l’exploitation est la source de toute la richesse capitaliste ?
La fragmentation supplémentaire de l’opposition s’exprime aussi par le fait que la manifestation de la Coalition contre la guerre a lieu une autre journée encore. Comme si la guerre impérialiste peut être traitée séparément de la crise du capitalisme. Tout cela ne fait que confirmer la nature parcellisée du « mécontentement social » qui pour le moment ne pose aucune menace au capitalisme (même si le Parti Travailliste de Gordon Brown craint pour sa peau électorale). Il y a pourtant une alternative
Le fait demeure cependant que cette crise de proportion gigantesque n’est pas que le produit de financiers cupides et d’un système bancaire sans contrôle (quoique ces parasites méritent de tout perdre et plus encore) et est loin d’avoir terminer son cours. Quelque soit le montant de « facilitations quantitatives » gouvernementales ou de rachats d’actifs en péril, ces mesures ne pourront résoudre la crise, car elle n’est pas le produit d’une absence de « liquidités » mais d’un ralentissement paralysant de l’accumulation de capital résultant de la baisse du taux de profit. Ce n’est pas fortuitement que des parallèles sont établis avec la Grande Dépression des années 30. Le futur du capitalisme se présente très mal. La seule voie qui nous permette d’avancer vers un avenir meilleur est de se débarrasser du capitalisme une fois pour toute et pas seulement de ses abus les plus grossiers.
Cela ne peut être réalisé que par la classe ouvrière, la classe dont le travail est la seule source de valeur réelle et la base des profits des capitalistes. Une manifestation plus sérieuse que celles qui sont annoncées cette semaine serait accompagnée par des grèves le jour du début des travaux du G20 (et non pas une semaine à l’avance). Les 600 000 travailleurs et travailleuses qui viennent tout juste de perdre leurs emplois pourraient constituer une puissante armée dans cette mobilisation. Mais même cela ne serait qu’un premier pas. On ne peut abattre le capitalisme sans un programme anticapitaliste clair qui vise à abolir l’argent et le travail salarié de même que les capitalistes et leurs profits. Un mouvement organisé autour d’un tel programme international serait une vraie force. On est loin des manifestations du G20, mais c’est ce qu’il nous faudra si on veut bâtir un mouvement réellement efficace contre la crise historique à laquelle pas un seul politicien, pas une seule politicienne ne pourra jamais trouver de solution. C’est ce que nous efforçons de construire. Qu’en pensez-vous ?
La Communist Workers’ Organisation, section britannique du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire, le 26 mars 2009
************
et
http://socialisme-mondial.blogspot....
********************
Manifester contre le G20 ?
Diverses organisations appellent à une « mobilisation internationale » ce samedi, le 28 mars, « contre le Sommet du G20 » qui se tiendra à Londres le 1er avril (date qui s’avérera sûrement bien choisie !). Mais à quoi ça sert si elle ne s’accompagne pas d’une lutte pour l’instauration d’une société nouvelle et différente ? En effet, il est vain de s’agiter tous azimuts en tentant de traiter les effets sans s’attaquer aux causes profondes du mal.
Les partisans de la résistance pure et simple se divisent en deux groupes. Premièrement, les réformistes authentiques, qui n’ont aucun projet de société alternatif à proposer en lieu et place du capitalisme et qui se bornent à vouloir introduire quelques changements mineurs. Il s’agit des ONG, de groupes religieux et d’autres organisations comme le mouvement ATTAC. Pour se rendre compte de ce type de réformisme il suffit de lire ce que ATTAC-Québec propose que le gouvernement canadien devrait faire pour lutter contre la crise : établir un contrôle public des banques et du secteur financier ; éliminer les retraites par capitalisation boursière ; établir une fiscalité équitable ; investir massivement dans les services publics et dans les infrastructures ; etc., etc.
La seconde catégorie est composée de gens qui conçoivent uniquement la résistance pure et simple comme une tactique. On les reconnaît aisément, dans les manifestations, aux drapeaux rouges et aux portraits de Lénine qu’ils arborent, aux côtés de ceux de Trotski, de Mao ou de Che. En tant que léninistes, ils pensent que le commun des mortels est incapable d’imaginer une alternative au capitalisme, qu’il peut tout au plus résister à la détérioration progressive de son niveau de vie et que, de ce fait, il a besoin d’être dirigé par une minorité consciente, à savoir. . . eux-mêmes. Leur stratégie consiste à faire de l’encouragement à la résistance pure et simple un instrument de conquête du pouvoir. C’est dans ce but qu’ils ont créé des organisations-écrans, dénommées par exemple « Résistance globale » ou « Rèsistance internationale », qui rivalisent avec les réformistes authentiques par le manque d’ambition de leurs revendications. En réalité, ils proposent bien une solution de rechange au capitalisme privé, mais, s’agissant d’une version idéalisée du capitalisme d’Etat qui a existé autrefois en Russie, ce projet est loin d’être attrayant. Rien d’étonnant dès lors à ce qu’ils éprouvent le besoin de le déguiser.
Mais alors, quelle est la véritable alternative au capitalisme ? Le socialisme ! mais dans sa conception originelle, celle d’une société bâtie à l’échelle mondiale, dépourvue de frontières, fondée sur la propriété collective des ressources de la Terre et sur l’application universelle du principe « De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ». Une telle société n’a jamais existé, et certainement pas en Russie ou en Chine ni sous aucun gouvernement « socialiste », social-démocrate ou de gauche. Cette société nouvelle reste à créer, et il est urgent d’oeuvrer en ce sens si l’on veut s’attaquer efficacement aux problèmes auxquels notre monde fait face aujourd’hui.
« Face à la crise, d’autres politiques s’imposent, au Canada comme ailleurs », dit ATTAC-Québec. Non, face à la crise, c’est une autre société mondiale qui s’impose.