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REVOLTES ET CHAOS DANS LE CAPITAL

mercredi 14 décembre 2005

NADA est un collectif d’agents de différents services Poste ou Télécom, fonctionnaires ou contractuels de droit privé. NADA tisse un réseau avec des sympathisants, des collègues, pour résister et agir... Rennes, Hiver 2005/2006 « Nada, sinon rien ! »

Depuis plusieurs années, la caste politique et ses médias amplifient et entretiennent dans la population les fantasmes délirants, suscités par des groupuscules islamistes, ou par des crispations identitaires marginales, comme le voile à l’école. Ces rideaux de fumée masquaient les vrais problèmes qui sont économiques. A l’automne 2005, les provocations et le jeu politicien d’un Sarkozy n’ont pas pu réduire l’explosion du ras-le-bol accumulé à une histoire de délinquance et de répression. Interviewvé dans Ouest-France du 24 novembre, il prétend que l’économie « normale » ne pourra revenir dans les quartiers pauvres qu’une fois l’économie « parallèle » éradiquée ! Or c’est le contraire : le capitalisme normal élimine partout sur la planète ce que lui coûtait l’intégration sociale de la population (l’Etat-providence des réformistes), pour ne favoriser que ce qui génère les meilleurs taux de profit, qui lui sont vitaux. Cela entraîne notamment l’exclusion, les mafias de la drogue, etc., mais les caïds ou les dealers ne sont pas si éloignés des indics, des flics et ... des politiciens d’avenir ! Ces digues ont sauté.

Même si la stratégie du « tout répressif et fort en gueule » va persister, elle a trouvé des limites face à cet embrasement social. L’extension spontanée de la révolte à plusieurs villes, sa durée prolongée ont obligé l’appareil d’Etat à répondre avec autre chose que la répression ; les robinets à fric ont été réouverts, alors que des crédits continuaient d’être supprimés quelques semaines auparavant (voir Canard enchaîné du 9 novembre 2005). Les cibles des dégradations (commissariats, écoles, voitures, commerces) ne sont pas si difficiles à comprendre : l’Ecole a toujours servi la reproduction de l’exploitation capitaliste ; les émeutiers d’aujourd’hui ou de demain savent qu’elle ne peut déboucher que sur les boulots précaires, sur le chômage à 25% (quartier Rennes-Le Blosne) et plus souvent 40% . La société publicitaire d’hyper-consommation exclut de plus en plus de monde : la voiture est hors de prix et sert souvent à aller se faire exploiter pour la payer ! Les lieux commerciaux incendiés représentent la frustration, la discrimination à l’embauche, des boulots surexploités...

Les commissariats et les mosquées sont « le sabre et le goupillon » de l’époque moderne !

Il y a des « marxistes de confort », des sectaires, pour insinuer que les révoltés (le « lumpenprolétariat » selon une phraséologie marxiste) n’auraient rien à voir avec la classe ouvrière, avec les « bons immigrés », etc. C’est quasiment le fiel des médias sécuritaires ! Révéler des conspirations de politiciens ou le bushisme de Sarkozy, ce serait le scoop ! Cette mauvaise foi nous rappelle ce que Marx écrivait en 1868 : « la secte trouve sa raison d’être dans son point d’honneur, elle ne le cherche pas dans ce qu’elle a de commun avec le mouvement de classe, mais dans un signe particulier qui la distingue de ce mouvement »...

Le collectif Nada considère que l’intifada des quartiers pauvres a donné une bonne gifle au système capitaliste, cette société de prédateurs et d’exploiteurs. La révolte des jeunes des cités et des banlieues rappelle à la face du monde la saloperie d’apartheid social qui se développe dans les pays occidentaux, au cœur du capitalisme mondialisé. Les « sous-prolétaires » des quartiers pauvres sont juste les frères de misère des enfants de l’intifada d’Israël, des jeunes manifestants algériens fauchés par les balles des généraux en 1988, des émeutiers de Los Angeles en 1992 ou des innombrables ghettos de la planète... Cette révolte rappelle que depuis 25 ans, les réformistes, les partis de gauche, les républicains, n’ont jamais eu de solutions que des rustines à la roue du Capital !

Or, où que nous habitions, nous subissons le même rapport social destructeur, en tant que salariés. Nous encaissons la liquidation croissante des compromis ou des acquis des luttes sociales passées. Aujourd’hui ce système planétaire poursuit ses dégâts de la Chine à la Nouvelle-Orléans en passant par la « Françafrique », l’Amérique latine... Mais le capitalisme a du plomb dans l’aile, aux dires même de ses grands prêtres, économistes ou dirigeants d’entreprises multinationales. C’est de cela qu’il est temps de parler à nouveau.

LE CAPITALISME EST EN TRAIN DE S’AUTODETRUIRE !

Dans Ouest-France du 28 octobre, l’ex-patron du Crédit Lyonnais, Jean Peyrelevade, évoquait ses craintes pour l’avenir du système économique capitaliste (chocs boursiers, séismes politiques...) ; l’avidité de l’actionnaire « ne peut pas durer » déclare cet ... actionnaire et grand fonctionnaire du Capital ! Dans son récent bouquin Le capitalisme est en train de s’autodétruire, c’est Patrick Artus, directeur des études à IXIS la banque d’investissement du groupe Caisse d’Epargne, qui critique l’obsession de rentabilité à court terme des firmes ! Il constate, ce que Marx avait montré, que cette course pour toujours plus de profit est liée à la concurrence mondiale entre les capitaux. Cela nous fait doucement rire que ces messieurs dénoncent des caractères fondamentaux du capitalisme lui-même ! Ils peuvent gémir car les recettes de Keynes pour sauver le capitalisme ont épuisé tout leur suc depuis 30 ans ! L’accroissement historique énorme des appareils d’Etat est l’éternelle Solution des sociaux-démocrates rivaux, de tous poils (fascistes, trotskystes, maoïstes, Attac, etc. ) ; mais l’intervention d’un soi-disant « Etat populaire » ou « social » sert de béquille périodique au capitalisme, retardant seulement l’exacerbation de ses contradictions chaotiques.

La quadrature du cercle les fait pousser des cris d’orfraie : les contre-tendances économiques et les bricolages successifs des gouvernants du monde, depuis une soixantaine d’années, ne parviennent pas à éliminer l’inexorable baisse tendancielle du taux de profit ; or, cette loi, congénitale au capitalisme, lui est aussi fatale. Nos experts éminents énoncent dans leurs bouquins quelques réformes dont disposerait encore la « gouvernance » mondiale aux abois... Leurs incertitudes ne portent pas sur l’éventualité des prochaines crises majeures, mais sur leurs dates, sur le degré du chaos, l’ampleur des destructions.

POUR DES INSURRECTIONS ANTICAPITALISTES

Actuellement le capitalisme semble triomphant : il ne cesse de licencier, fliquer, précariser, flexibiliser, délocaliser... L’Etat liquide les « compromis historiques » : systèmes de retraite, santé, éducation... Nos résistances sont parcellaires, modestes... Pourtant le système révèle aussi ses failles béantes : apartheids explosifs, faillites d’Etats, crises financières, guerres, catastrophes écologiques, impuissance des politiques réformistes...

Cela fait plus de 100 ans que les prolétaires sont intégrés à la société capitaliste par l’Etat, par l’Ecole, par les partis et les syndicats : cela nous a réduits à n’être que du « capital variable » ; les populations jugées non rentables sont reléguées dans les « banlieues » ou les bidonvilles de la planète. Cette préhistoire du genre humain finira-t-elle ?! Les hommes continuent de faire leur histoire. Des insurrections prolongées, des grèves générales, ont éclaté, éclatent, éclateront. A nouveau, sans même l’avoir cherché au départ, des révolutions sociales se retrouveront en rupture avec l’intégration au Capitalisme. Ce régime s’effondrera dans ses propres contradictions avec sa démocratie bourgeoise, sa république de classes. L’intervention révolutionnaire des hommes est nécessaire pour inventer une autre voie que celle, suicidaire, qui pourrait succéder au capitalisme : le chaos, les mafias généralisées, la misère fatale.

« Arrivé à l’apogée de sa puissance, le capitalisme est aussi arrivé au plus haut point de sa vulnérabilité ; il ne débouche nulle part ailleurs que sur la mort. Si faibles que soient les chances de révolte, c’est moins que jamais le moment de renoncer au combat » (Paul Mattick, communiste de conseil)

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