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Ni patrie ni frontières n° 33-34-35 (juin 2011) : Les pièges mortels de l’identité nationale

lundi 7 septembre 2015

Ce numéro en PDF est aussi disponible sur le site http://npnf.eu/spip.php?rubrique1

PDF - 3.5 Mo

Ce numéro qui paraîtra le 6 juillet 2011 s’ouvre sur plusieurs articles de l’Encyclopédie anarchiste (publiée entre 1925 et 1934). Ils permettent de situer la critique de concepts comme ceux de nation et de patrie, de nationalisme et de patriotisme dans une longue durée historique, et de se dégager de ce que l’on est bien obligé d’appeler « l’antisarkozysme primaire(1) » qui, volontairement ou pas, sert la soupe à la gauche pourrielle et à ses grandes manœuvres pré-électorales cousues de fil blanc.

Ces textes montrent que les anarchistes, au début du XXe siècle, percevaient clairement le rôle de l’embrigadement patriotique dès la Révolution française et se méfiaient du nationalisme républicain de la gauche dite « socialiste ». Portés par l’optimisme initial du mouvement ouvrier qui défendait les vertus du rationalisme et les valeurs des Lumières, ils ont continué à croire passionnément en les vertus de l’éducation (individuelle ou dans le cadre des Bourses du travail et des organisations anarchistes), même après l’avènement du stalinisme, du fascisme et du nazisme. Mais, en comparant systématiquement le nationalisme ou le patriotisme à une religion, les anarchistes ont eu tendance à tomber dans le même piège que celui de leur anticléricalisme (parfois) caricatural : avoir l’illusion qu’il suffit de mener un combat rationaliste déterminé contre une idéologie pour que celle-ci recule, ou disparaisse, dans la tête des exploités.

Le Manifeste des anationalistes est une curiosité. Publié en 1931 par la fraction « prolétarienne » des espérantistes, il n’a guère eu d’influence (du moins à notre connaissance) mais sa critique conjuguée du nationalisme et de l’internationalisme est fort intéressante. Elle a au moins l’avantage de ne pas nous servir une idéologie « interclassiste », prêchant la réconciliation de tous au nom du « respect de l’Autre », de l’ « amour divin », de la démocratie citoyenne ou républicaine ou du « care », dernier hochet d’une social-démocratie désespérément en quête de renouveau idéologique.

Les deux textes suivants d’Anton Pannekoek et de Paul Mattick éclairent la réflexion théorique de ces marxistes antistaliniens sur le nationalisme. Ils prennent en quelque sorte le contre-pied des auteurs anarchistes en affirmant la prééminence du rôle des facteurs sociaux et économiques dans la disparition progressive d’idéologies réactionnaires comme la religion ou le nationalisme.

Malheureusement, l’évolution historique leur a donné tort, du moins sur ce point. Le XXe siècle et aussi le XXIe siècle, du moins pour le moment, n’ont pas vu le nationalisme (ce que Pannekoek appelle la « communauté de destin et de caractère » entre la bourgeoisie et le prolétariat) reculer devant l’internationalisme, ou l’anationalisme, bien au contraire.

Jamais autant de peuples et d’organisations n’ont lutté pour créer des Etats-nations, à l’image de l’Etat républicain français, jamais les luttes politiques n’ont été autant polluées par l’idéologie nationaliste. Et ce ne sont pas les derniers avatars du nationalisme, l’islam politique, le régionalisme identitaire ou indépendantiste et l’anti-impérialisme réactionnaire de la majorité du mouvement altermondialiste qui nous contrediront.

Si Pannekoek et Mattick prônent de répondre systématiquement « Prolétariat » et « Lutte de classe » chaque fois que quelqu’un prononce les mots « autonomie » ou « indépendance nationale », on ne peut qu’approuver leur position de principe, tout en constatant que cette stratégie n’a eu jusqu’ici aucun succès…

La revue aborde ensuite le débat franco-français sur l’identité nationale, en mettant de nouveau l’accent sur la nécessité de ne pas se focaliser sur les échéances électorales et les petites phrases des politiciens, comme l’ont fait l’extrême gauche et la gauche, si l’on veut comprendre pourquoi cette question est récurrente dans le débat politique franco-gaulois.

Nous abordons une des conséquences de ce débat lancé par Sarkozy, ou plutôt du climat entretenu par la droite dure, c’est-à-dire le rapprochement entre un courant de gauche laïco-xénophobe et l’extrême droite sur les questions de la laïcité, de l’immigration et de l’islam, en soulignant que cette tendance se manifeste à l’échelle européenne, sous diverses formes et ne constitue ni une exception française, ni un phénomène négligeable.

Nous faisons un petit saut en arrière en reproduisant un texte de Trotsky sur le fascisme et le nazisme, et en profitons pour remettre quelques pendules à l’heure à propos de l’antifascisme stalinien. Nous reproduisons aussi des extraits d’un texte de Mouvement communiste écrit en 1997 sur le Front national, mais qui comporte surtout une analyse classique de la démocratie bourgeoise, du fascisme et du nazisme – classique du moins à l’ultragauche.

Nous nous intéressons à un OVNI politique, le prétendu « racisme anti-Blancs », mythe répandu bien sûr par l’extrême droite mais qui commence à contaminer la gauche. Les Luftmenschen, auteurs de ce texte, nous précisent leur point de vue dans une interview. Et nous reproduisons un texte de Combat ouvrier sur une autre variante encore plus zarbi du nationalisme, le « noirisme » (2) d’extrême droite, en Guadeloupe, dirigé contre l’immigration haïtienne.

Nous nous interrogeons sur les limites de la liberté d’expression prônée par Radio libertaire, à travers l’analyse de plusieurs émissions en 2009 et 2010 où ont été abordés le thème de l’identité nationale et de l’islam et d’un débat sur la liberté d’expression organisé par cette même radio, et filmé en décembre 2010 par le site d’extrême droite « Enquête et débat » de Jean Robin.

Une contribution de Syb se penche sur le rôle de l’ésotérisme dans l’idéologie d’extrême droite, phénomène souvent méconnu ou jugé secondaire.

Enfin nous observons, avec l’aide de camarades belges et néerlandais, comment les problèmes de l’identité nationale, de la laïcité et de l’extrême droite sont abordés en Belgique, et aux Pays-Bas, sans bien sûr épuiser la complexité et la diversité des situations….nationales sur lesquelles nous reviendrons dans d’autres numéros.

Ni patrie ni frontières !

Notes

1.Le numéro 21-22 (septembre 2007) de la revue avait déjà évoqué cet anti-sarkozysme politiquement peu fécond qui n’a fait que se développer avec la rage et la colère des électeurs de gauche contre les mesures du gouvernement. Les mêmes antisarkozystes ferment les yeux sur la constance des positions socialistes-nationales de Ségolène Royal et Jean-Pierre Chevènement qui, jusqu’à nouvel ordre, font partie de la « gauche » et dont la première fut la candidate officielle de cette même gauche il y a cinq ans. C’est ainsi par exemple que sur le blog officiel de Ségolène Royal, le lundi 13 juin 2011, il est rendu un vibrant aux soldats français morts en Afghanistan. On peut parfaitement comprendre la compassion privée de l’entourage direct de ces victimes de la politique de la bourgeoisie française (compassion qui n’a pas besoin de la récupération des politiciens qui ne paient jamais de leur vie les décisions d’intervention militaire qu’ils prennent), mais il s’agit ici de toute autre chose puisqu’un certain Arnaud Fage au-dessus des photos et des biographies de deux soldats déclare : « Je tiens à pousser un coup de gueule contre les médias qui ne parlent jamais de l’engagement de nos soldats pour défendre notre pays sur notre sol et à l’étranger. » Il s’agit d’un soutien franc et ouvert à la politique de l’impérialisme français, d’un soutien à de nouvelles interventions extérieures meurtrières pour les populations civiles comme pour « nos soldats ». Sur ce plan-là, comme sur bien d’autres, l’identité nationale est une « valeur » partagée par la gauche comme par la droite.

2. Le « noirisme » est une idéologie nationaliste qui s’est développée à Haïti et a notamment inspiré le duvaliérisme. Duvalier père valorisa la langue créole, promut une renaissance culturelle nationale (poésie, littérature, musique) et s’appuya sur le vaudou présenté comme un élément de résistance aux influences étrangères. On en trouve des variantes en Afrique et la minuscule Tribu Ka (Génération Kemi Seba) en France avec ses théories fumeuses sur les Kémites, ou la Nation de l’Islam aux Etats-Unis, se situent dans la même lignée nationaliste-raciale, qui s’oppose de façon symétrique aux théories sur la supériorité de l’Occident (blanc) judéo-chrétien (version de la droite européenne ou américaine « modérée ») ou de la civilisation indo-européenne (version d’extrême droite, fascisante ou fasciste).

P.S. Un petit « Lexique de la confusion » complètera en août 2011 ce numéro pour analyser les passerelles entre l’extrême droite et l’extrême gauche.

Sommaire

Des outils pour penser

Encyclopédie anarchiste : Immigration (Louis Loréal), 8 – Nation (Charles Boussinot), 11 – Nation (Elie Soubeiran), 14 – Nationalisme (Aristide Lapeyre), 17 – Patrie (Charles Boussinot), 19 – Patrie (Madeleine Pelletier), 29 – Patriotisme, 31 – Patriote, 40

Manifeste des anationalistes, 42

Lutte de classe et nation (Anton Pannekoek), 60

Nationalisme et socialisme (Paul Mattick), 86

Un débat piégé

Encore un débat qu’il faut saboter ! (Les Amis de l’égalité), 96

C’est quoi être français ? (B., Anarchosyndicalisme), 97 – Nationales, régionales ou ethniques, les « identités » sont une arme du pouvoir, Anarchosyndicalisme, 99 – Les identitarismes, c’est le capitalisme plus la guerre, Anarchosyndicalisme, 102 – La vérité historique, première victime du nationalisme, Anarchosyndicalisme, 106 – Mélange ou différence, 111

L’identité nationale un vieux mythe dangereux, et une question jamais réglée à gauche, 115 – Petit Quizz de la Bêtise nationaliste, 127 – « Pour nous la France n’existe pas » – Les surréalistes contre la Patrie, la Nation et l’identité nationale, 130 – « Monod, Lacoste, etc., allez vous faire intégrer ! », 132 – « Affaire » Anelka : médias et politiques nous refont le coup de la Cinquième Colonne, 135

« Racisme anti-Blancs » en France et « noirisme » anti-Haïtiens en Guadeloupe

Racisme anti-Blancs ? L’histoire édifiante des martyrs de Perpignan (Luftmenschen), 139 – « Racisme anti-Blancs » qui sont les vraies victimes ? (Luftmenschen), 142 – Quelques questions aux Luftmenschen, 146

Guadeloupe. La résistible ascension d’Ibo Simon et la montée de l’extrême droite xénophobe (Combat ouvrier), 154

Sur les convergences politiques entre la gauche laïco-xénophobe et l’extrême droite, 163 : Introduction, 166, Des Ligues à la « Nouvelle Droite », 171 – L’apéro saucisson-pinard du 18 juin 2010 et sa signification, 176 – La gauche laïque réactionnaire : une vieille tradition française dont Riposte laïque n’est que l’ultime avatar, 181 – Les religions évoluent, ce qui ne les rend pas moins néfastes, 184 – La droite et l’extrême droite évoluent – ce qui ne les rend pas moins dangereuses, 186 – Riposte laïque : un groupe charnière entre la gauche et l’extrême droite, 189

L’anti-universalisme et le pseudo front anti-impérialiste (Stephane Julien), 194

Encore et à nouveau sur la gauche laïco-xénophobe, 196 – Riposte laïque = Riposte xénophobe, 200 – Abécédaire de la xénophobie de gauche, 206 – Les 22 salopards de « l’apéro saucisson pinard », 217 – Lettres de lecteurs mécontents 231

Fascisme, démocratie et antifascisme : Fascisme/antifascisme (OCL) 237 – Stalinisme et antifascisme, 239 – Qu’est-ce que le national-socialisme ? (Léon Trotsky), 241 – Fascisme et démocratie (Mouvement communiste) 248

La fidélité absolue à la « liberté d’expression » :

un piège pour les anarchistes ?

Un peu d’histoire (Floréal Melgar), 259 – Radio Courtoisie, en direct sur 89.4 FM, 266 – Accords et désaccords avec les Luftmenschen, 272 – Réponse des Luftmenschen, 276 – Radio libertaire ou « Radio Français d’abord » ? 281 – Ni religion, ni racisme, ni xénophobie (Fédération anarchiste), 283 – Quand l’Union rationaliste dérape sur l’immigration, 284 – Radio libertaire et la liberté d’expression totale, 290 – Contre leur liberté d’expression (Luftmenschen), 296

Extrême droite et ésotérisme : Politica Hermetica, 303

Identité nationale, catholicisme et extrême droite en Belgique

Vlaams Blok : changement dans la continuité d’une formation xénophobe (Mouvement communiste), 315 – Sur la Fraternité lefebvriste, à l’extrême droite de Dieu (ResistanceS.be), 329 – L’extrême droite catholique pro-Léonard (ResistanceS.be), 342

Pays-Bas : un modèle pour Sarkozy et la droite gauloise, 347

Assimilation française contre multiculturalisme néerlandais ? 351 – Une histoire nationale un peu chaotique jusqu’au XIXe siècle, 352 – Histoire, valeurs et normes « typiquement néerlandaises », 354 – Le pays de la « tolérance » ? 356 – « Pilarisation » et « dépilarisation » de la société, 358 – Les Pays Bas, ex-puissance coloniale, sont devenus un pays d’immigration, 363 – France et Pays-Bas : « problèmes » communs et solutions réactionnaires similaires, 368 – Geert Wilders et le PVV aux Pays-Bas : le Parti pour la liberté vous exclura aussi ! 376

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