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Vu : « Katanga Business »

jeudi 4 février 2010

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Katanga Business

Film de Thierry Michel (2009)

Dans la province du Katanga, dans le sud-est de la République populaire du Congo, les ressources minières sont immenses : du cuivre et du cobalt, surtout. L’Etat du Congo ex-belge, devenu Zaïre sous la férule du maréchal Mobutu (1930-1997), avait créé pour les exploiter la société Gecamines. Celle-ci est confrontée à la nécessité de remettre en route des installations vétustes, après des années de guerre civile, pour faire face à la demande chinoise et indienne. Le cinéaste belge Thierry Michel (auteur de Zaïre, le Cycle du serpent [1992], Les Derniers Colons [1995], Mobutu, roi du Zaïre [1999], Congo River [2006]), a construit sur ce sujet documentaire un film passionnant, où le triangle prolétariat-capital-politique est incarné par des personnages au destin parfois tragique.

Le prolétariat, ce sont les ouvriers qui, dans les carrières délaissées par les grandes firmes, tentent de tirer pour leur propre compte du minerai de galeries mal étayées, promises à l’effondrement. La survie de ce peuple des « creuseurs » est soumise aux fluctuations des cours internationaux comme aux décisions des trafiquants, tel ce Chinois qui achète à bas prix, sur un marché installé en plein air dans la ville voisine, du minerai pour l’exporter en fraude.

Le capital, quant à lui, est représenté par le grand patron Paul Fortin, l’envoyé du gouvernement chinois M. Min, et l’industriel belge Georges Fourest. Le premier est un Canadien appelé par l’Etat pour redresser la Gécamines ; il explique aux ouvriers qu’« il va y avoir une restructuration, parce que l’entreprise ne peut plus être la mère, le père, la sœur, le frère de tout le monde ». Il négocie avec M. Min, qui prend possession du gisement pour les années à venir, contre la promesse de création d’universités, de routes, d’hôpitaux… Georges Fourest est un Belge issu d’une famille d’industriels installée au Katanga depuis les années 1930, et qui cherche à tirer son épingle du jeu avec sa propre entreprise minière ; il convie des investisseurs canadiens à constater le bien-fondé de leurs placements.

Le politique, c’est le personnage complexe de Moïse Katumbi, le gouverneur de la province de Katanga. Cet homme d’affaires récemment enrichi est aussi un populiste. « Papa Moïse » se rend dans les usines, intervient lorsqu’il constate que les fondeurs sont pieds nus ou en sandales, menace le patron chinois de fermer l’entreprise si à son retour les règles de sécurité ne sont pas observées ; distribue aux creuseurs clandestins quelques billets de banque, tout en leur promettant qu’ils ne seront pas expulsés – « Vous leur direz : expulsez d’abord le gouverneur », lance-t-il avant de rentrer chez lui : il n’assistera pas, le lendemain, à l’assaut de la police qui rend vaines ses paroles.

Des assauts de la police, on en verra d’autres, qui tirent à balles réelles contre des manifestants poussés par le désespoir, après avoir perdu leurs moyens de vivre.

A la fin du film, une voix off indique que les cours du cuivre et du cobalt se sont effondrés depuis l’époque du tournage. Et que les Chinois se sont retirés, oubliant leurs promesses…

Le film n’est sorti en avril en France qu’en deux copies, dont une projetée à Paris. Il n’est plus diffusé actuellement (fin juillet 2009). En RDC, en juillet, les projections du film ont donné lieu à divers incidents, notamment à Kisangani où une séance a été interrompue et une autre annulée par la direction de l’université. Et où Thierry Michel a été brièvement arrêté pour être entendu par l’Agence nationale des renseignements (ANR).

F. M. 

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