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À propos des noyaux autonomes de base

dimanche 8 mars 2009

Ce texte fait partie d’un ensemble de traductions réalisées par nos soins pour le prochain numéro de la revue "Ni patrie ni frontières". C’est notamment parce que nous avons des désaccords profonds avec les théories de "l’insurrectionisme" (théories dont on retrouve des bribes et des fragments dans d’autres courants radicaux spontanéistes ou gauchistes postmodernes) que, conformément à l’objectif de cette revue, nous traduisons ces textes fortement inspirés par ceux d’Alfredo Maria Bonanno, militant anarchiste, condamné à 18 mois de prison pour sa brochure « La Joie armée » et à 6 ans de prison en 2004 pour une prétendue participation à bande armée..... Ni patrie ni frontières.

Les structures de base, les noyaux autonomes de base sont l’élément liant l’organisation anarchiste informelle spécifique aux luttes sociales. Le noyau autonome de base n’est pas une forme de lutte entièrement nouvelle. Des tentatives ont été faites pour développer ces structures, en Italie au cours des dix dernières années. La plus notable d’entre elles a été le Mouvement autonome des cheminots de Turin (l), et les ligues autogérées contre la construction de la base de missiles de croisière à Comiso (2).

Nous croyons que la lutte révolutionnaire ne peut être qu’une lutte de masse. Il nous faut donc construire des structures capables d’organiser le plus grand nombre de groupes d’exploités possible. Nous avons toujours considéré, de façon critique, la perspective syndicaliste, à la fois en raison de ses limites en tant qu’un instrument, et en raison de sa tragique involution historique qu’aucune nouvelle couche de peinture anarchiste ne pourra dissimuler. Donc, nous sommes parvenus à l’hypothèse de la construction de ces noyaux autonomes de base qui n’ont pas les caractéristiques de mini-structures syndicalistes, car ils ont d’autres objectifs et d’autres relations organisationnelles.

Un mur de réticence et d’incompréhension

Grâce à ces structures une tentative a été faite de lier le mouvement anarchiste spécifique aux luttes sociales. Un mur de réticence et d’incompréhension est apparu entre les camarades et a constitué un obstacle pour mettre en place cette méthode d’organisation. C’est dans les moments d’action que les différences apparaissent entre les individus qui sont tous d’accord en principe avec la propagande anarchiste, la lutte contre l’État, l’autogestion et l’action directe. Lorsque nous passons à la phase d’organisation, cependant, il nous faut développer un projet en contact avec le niveau actuel de l’affrontement entre les classes. Nous pensons que, en raison des transformations sociales profondes que nous vivons, il est impensable pour une seule structure d’essayer de contenir toutes les luttes sociales et économiques en son sein. En tout cas, pourquoi les exploités devraient-ils faire partie d’une organisation anarchiste spécifique afin de mener à bien leur lutte ?

Nous ne pourrons changer radicalement la société que par une révolution. C’est pourquoi nous essayons d’intervenir avec un projet insurrectionnel. Les combats de demain ne pourront avoir une issue positive que si la relation entre la structure anarchiste informelle spécifique et la structure de masse des noyaux autonomes de base est clarifiée et mise en œuvre. L’objectif principal du noyau autonome de base n’est pas d’abolir l’Etat ou le Capital, qui sont pratiquement inattaquables tant qu’ils restent un concept général. L’objectif de ce noyau est de lutter et d’attaquer l’État et le Capital dans leurs structures les plus petites et les plus accessibles , en ayant recours à une méthode insurrectionnelle. Les groupes autonomes de base sont des structures de masse et constituent le point de rencontre entre l’organisation anarchiste informelle et les luttes sociales.

L’organisation à l’intérieur du noyau se distingue par les caractéristiques suivantes :

1. l’autonomie par rapport à toute force politique ou syndicale existante ;

2. la conflictualité permanente (une lutte constante et efficace pour les objectifs qui sont décidés, et non pas des interventions sporadiques et occasionnelles) ;

3. l’attaque (le refus du compromis, de la médiation ou des accommodements qui mettent en question l’attaque sur l’objectif choisi). En ce qui concerne les objectifs, ceux-ci sont décidés et réalisés par des attaques contre les structures répressives, militaires et productives, etc. Il est fondamental que la conflictualité et l’attaque soient permanentes.

L’objectif du noyau autonome de base est de lutter contre l’État et le Capital dans les structures les plus petites et les plus accessibles possible Ces attaques sont organisées par les noyaux en collaboration avec les structures anarchistes spécifiques qui offrent le soutien théorique et pratique, recherchent les moyens nécessaires pour l’action en identifiant les structures et les personnes responsables de la répression, et en offrant un minimum de défense contre les tentatives de récupération politique ou idéologique par le pouvoir, ou contre la répression pure et simple. À première vue, la relation entre l’organisation anarchiste spécifique et le noyau autonome de base pourrait sembler contradictoire. La structure anarchiste spécifique résulte d’une perspective insurrectionnelle, alors que le noyau autonome de base semble se situer dans une tout autre dimension, celle des luttes intermédiaires. Mais cette lutte ne se déroule de cette façon qu’à ses débuts. Si l’analyse sur laquelle est fondée le projet coïncide avec les intérêts des exploités dans la situation où ils se trouvent, alors une issue insurrectionnelle de la lutte est possible. Bien entendu, ce résultat n’est pas certain. Il ne peut être garanti par quiconque.

Cette méthode a été accusée d’être incomplète et de ne pas prendre en compte le fait que l’attaque contre une ou plusieurs structures finit toujours par être réprimée. Les camarades peuvent réfléchir à ces accusations. Nous pensons qu’il n’est jamais possible de prévoir le résultat d’une lutte. Même un petit combat peut avoir les conséquences les plus inattendues. En tout cas, aucune procédure ne peut garantir à l’avance le passage des différentes insurrections, limitées et circonscrites, à la révolution. Nous avançons en faisant des tentatives et des erreurs, et disons à celui qui a une meilleure méthode de continuer, lui aussi, son chemin. o.v.

(1) Cf. la brochure Workers’ Autonomy publiée notamment par Bratach Dubh. (2) Cf. la revue Insurrection n° 0 1.

Traduit par Ni patrie ni frontières

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