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La lutte paye ! La lutte continue !
Voici donc que les rumeurs récurrentes d’expulsion des travailleurs sans-papiers de la Bourse du travail ne sont plus des rumeurs. La commission administrative, organisme de gestion de l’institution, vient de faire cesser les on-dit de courir, et les langues de supputer. C’est désormais parole officielle certifiée par le sceau d’un communiqué. « L’outil "Bourse du travail" doit redevenir disponible pour les salariés afin qu’ils puissent se défendre, avec leurs syndicats, contre tous les mauvais coups ». Dont, surtout, le très mauvais que continuent de porter les travailleurs sans-papiers à la défense syndicale des travailleurs nationaux ou avec papiers ; car « ces salariés précarisés sans papiers sont "utilisés" par les employeurs pour tirer tous les acquis sociaux vers le bas, casser le code du travail et les conventions collectives ».
Accusation grave, qui emporte le devoir de la nécessité. Mais en l’occurrence cela ne se fera pas d’abord pour remplir cette obligation de la charge. Ce sera la conséquence d’encore plus nécessaires et, après dix mois, pressants motifs « d’hygiène et surtout de sécurité », afin d’éviter « un risque catastrophique à tous ». Ainsi seront sauvegardés les intérêts de tous les travailleurs, y compris des travailleurs sans-papiers occupants. Lorsque la nouvelle s’est répandue, à l’occupation les esprits se sont échauffés ; des sans-papiers sont allés jusqu’à dire qu’ils ne s’en iront que les pieds devant. Intempérances de langage ?
Pour beaucoup, la régularisation est une question de vie ou de mort, physique et sociale. Beaucoup sont venus en Europe au péril de leur vie. L’expulsion, c’est mettre en danger, avant la leur, la vie des familles restées au pays, qui ont financé le voyage et qui attendent, pour survivre, les envois d’argent. Un tel retour au pays natal, pour beaucoup de ces jeunes Africains, c’est la sanction de leur faillite pratique et le déshonneur social. En plus, cette lutte est en train de payer. Depuis les premières régularisations, fin septembre, elles se sont multipliées, et se somment à plus de deux fois déjà celles obtenues par la CSP 75 dans l’année précédente. En pourcentage, cela représente un nombre qui dépasse désormais celui tant vanté des syndicats. Il est normal que les travailleurs sans-papiers isolés de la Bourse du travail ne veuillent pas renoncer à une lutte prometteuse, et hors de laquelle il n’y a pour eux guère d’espoir. Les délégués ont cherché et cherchent à calmer le jeu. Mais il n’est pas sûr du tout que l’expulsion, si elle s’opère vraiment, se fera sans heurts même graves. Mais au-delà d’une telle responsabilité, la commission administrative et les syndicats en prendraient une plus lourde sur eux. Ils auront réussi à creuser la ligne de faille, les travailleurs sans-papiers et sans droits d’un côté, le reste des travailleurs de l’autre, à les mettre dans une opposition non de détail, mais d’ensemble.
Si l’expulsion se fait, les travailleurs sans-papiers auront perdu une bataille, ils n’auront pas perdu la guerre. Leur lutte sera encore longue, dans l’espèce de guerre sociale que leur font les gouvernants et les patrons de ce pays et de l’Europe. Il y a eu un avant, et il y a eu un après l’occupation de Saint-Bernard. Il y aura un avant et un après l’occupation de la Bourse du travail. C’est de là que reprendront, pour avancer, les luttes des sans-papiers et de la coordination parisienne en particulier. La lutte paye ! La lutte continue !
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Csp 75, communiqué du 18 février 2009 Occupation de la Bourse du travail : on annonce l’expulsion des sans-papiers !
À propos du communiqué de la commission administrative* de la Bourse du travail du 5 février 2009
Sous le titre « Occupation de la Bourse du travail de Paris par le Csp 75 », est apparu un communiqué du secrétaire général de la Commission administrative de la Bourse du travail « réunie en séance plénière le 5 février 2009 ». Commission « composée des organisations syndicales départementales Cfdt, Cgt, Fo, Cftc, Cfe-Cgc, Unsa, Solidaires », précise une note. Communiqué où de nombreux griefs, injustifiés pour la plupart, sont formulés contre l’occupation entrée dans son dixième mois. Pour juger de leur bien-fondé, disons que l’occupation peut être vue comme une médaille. Et, comme toute médaille, elle se présente avec deux faces, recto et verso. Ce n’est que le verso que voit la Commission administrative, et même si le tableau noir qu’elle en fait était exact, encore faudrait-il qu’elle n’oublie pas de regarder aussi ce qui se trouve au recto.
Une occupation de locaux dans le contexte d’une lutte n’est jamais faite pour plaire. Quand des syndicats décident d’occuper une boîte (si nous mentionnons cet exemple, c’est que la Ca rappelle les « actions pour la régularisation des salariés sans-papiers » menées par « les organisations syndicales »), ils le font pour, à bon escient, gêner le patron. Le fait que le patron se plaigne fait partie du jeu. Or, tout ce que la Ca sait faire à son tour, en l’occurrence, c’est de se plaindre de la gêne causée par l’occupation.
Nous avons déjà répondu à maintes reprises et en détail, verbalement et par écrit, dans les mois passés, à ce genre de griefs. Il faudrait, pour être objective, que la Ca se donne au moins la peine de lire et de tenir compte de nos documents. Qui sont publics, et publiés dans notre journal. Brièvement. Il n’est pas vrai que l’occupation « paralyse l’activité des syndicats ». Il est faux qu’elle empêche les imprimeries de « fonctionner normalement ».
N’importe qui peut venir au 85 rue Charlot, et constater que l’activité syndicale de routine se déroule de façon tout à fait normale et tous les jours, et que les imprimeries ne sont ni occupées ni empêchées d’accès. La Ca ne devrait pas passer sous silence que c’est justement pour permettre ce déroulement normal que nous avons, depuis le mois de juillet, abandonné l’occupation des escaliers et couloirs des quatrième et troisième étages de l’immeuble et rendu praticable l’accès aux imprimeries. Cela a été l’effet de décisions prises à la suite de discussions expresses avec l’intersyndicale d’abord, ensuite avec l’Ud-Cgt, le principal des syndicats représentés à la Ca. Celle-ci ne peut donc l’ignorer. Il est vrai, par contre, que l’occupation empêche l’utilisation des salles de réunion. Car c’est là le seul espace où nous pouvons poursuivre l’occupation. Sans cela, elle cesserait d’être telle, et nous aurions déjà quitté la Bourse. Ce point renvoie donc, en réalité, au recto de la médaille, à ce que la Ca ne veut pas voir.
S’agissant de l’hygiène de l’immeuble, la Ca devrait expliquer, par exemple, pourquoi les rats, si nombreux avant l’occupation, ont disparu depuis comme par enchantement. Est-ce que la Ca pense que nous sommes des mangeurs de rats, ou est-ce que nous contribuons à la propreté effective des locaux occupés ? Quant à leur salubrité réelle, non de façade, n’est-ce pas aussi de la responsabilité de la Ca le fait de nous avoir privés de chauffage pendant deux mois et demi ? S’agissant de la sécurité (ce sur quoi la Ca insiste « surtout »), elle devrait expliquer, par exemple, pourquoi M. Vincent, responsable de la sécurité pour la Ville de Paris, a reconnu à chacune de ses nombreuses visites que nous nous tenons strictement à ses instructions.
Enfin, pour le « câblage de l’immeuble », une note de la Ca toujours affichée dans le hall donne ces dates pour celui de l’annexe Varlin (l’immeuble dont nous occupons une partie mais aucun des bureaux) : « 15 février - 15 avril 2008 ». L’occupation n’a débuté que le 2 mai. Quoi qu’il en soit, nous n’avons jamais empêché, tout au contraire, aucun genre de travaux dont nous avons été avertis. Voilà pour le verso, venons au recto.
La Ca juge l’occupation « incompréhensible », purement et simplement ; et elle nous accuse de nous « tromper de cible » et d’« empêcher les salariés de se défendre ». Elle peut bien sûr ne pas partager notre forme de lutte, mais elle ne peut pas la dire incompréhensible. Sans compter les réunions avec l’intersyndicale et l’Ud-Cgt, nous avons fait un grand effort d’information, en produisant un nombre important de documents (tracts, communiqués, affiches, dix numéros d’un journal de huit pages) et en tenant d’importants événements de communication et de débats, dont une émission radio bimensuelle depuis le début de cette année, pour expliquer notre situation et les raisons de notre lutte. Si vraiment la Ca ne nous comprend pas, c’est alors qu’elle ne s’est pas donné la peine de vouloir comprendre. La responsabilité ne saurait que lui en incomber.
Si nous avons décidé d’occuper la Bourse du travail, c’est que nous nous sommes sentis trahis par « les organisations syndicales », lesquelles, après s’être servies de nous dans leurs actions « pour la régularisation des salariés sans-papiers », ont refusé de prendre en compte aussi la situation de ceux qui, parmi ces salariés, sont isolés : tenus dans l’impossibilité de fournir des contrats de travail ou des promesses d’embauche en règle, à cause précisément des conditions illégales dans lesquelles leur travail est exploité. Ces organisations ont en réalité fait le choix de privilégier un nombre réduit de travailleurs sans-papiers, ceux des entreprises d’une certaine taille ou à résonance médiatique, laissant pour compte la grande majorité des sans-papiers de France, les travailleurs sans-papiers isolés, dont nous sommes.
Par ce choix, elles ont contribué à créer, en droite ligne avec la politique d’immigration du gouvernement en place, la division parmi les sans-papiers, dont le mouvement avait besoin de tout sauf d’une telle division de fond. Est-ce donc vraiment nous qui nous trompons « de cible » ? Toute l’histoire du mouvement des sans-papiers depuis treize ans, depuis l’occupation de l’église Saint-Bernard en 1996, est là pour montrer que ce sont aujourd’hui la Ca et ses « organisations syndicales » qui, par leurs choix, se trompent de cible, si vraiment elles veulent opérer « pour la régularisation des salariés sans-papiers », et non pour leur division et l’anéantissement de leur mouvement.
Quelle est la situation actuelle générale de ce mouvement, déterminée par la politique ministérielle ? Que les collectifs de sans-papiers, en tant qu’interlocuteurs valables, sont évincés des discussions avec les préfectures. La défense des sans-papiers, dont la grande majorité sont des travailleurs, se trouve ainsi soustraite aux sans-papiers eux-mêmes. Leur propre auto-organisation, leur propre auto-défense, résultats les plus marquants du mouvement de Saint-Bernard, se trouvent ainsi mises à mal, sous les coups de la politique ministérielle masquée de « régularisation par le travail ». Si « les organisations syndicales » avaient décidé de s’opposer efficacement à cette politique, d’œuvrer pour la régularisation de tous les salariés sans-papiers, isolés ou non, ainsi que nous le revendiquons depuis toujours (c’est cette revendication qui nous a amenés à occuper la Bourse du travail), la situation ne serait pas si grave. Mais elles ont fait le choix contraire, d’œuvrer pour une petite minorité de sans-papiers, et la situation générale est en train de se dégrader continuellement. La Csp 75 est une des situations majeures d’organisation et de lutte de sans-papiers, et parmi les rarissimes qui, grâce à la mobilisation continue, ont su se préserver une marge de discussion en préfecture. Voilà ce qui s’oppose directement, et efficacement (le nombre de régularisations obtenues depuis le début de l’occupation est là pour le prouver), et stratégiquement, à la politique ministérielle. Voilà le recto de la médaille que la Ca et ses « organisations syndicales » refusent obstinément de voir.
Est-ce donc les travailleurs sans-papiers isolés qui, par l’occupation de la Bourse du travail, empêchent « les salariés de se défendre » ? En réalité, dès avant cette occupation, ce sont « les organisations syndicales » qui, par leurs choix en droite ligne avec la politique gouvernementale, empêchent la grande majorité des salariés sans-papiers « de se défendre ». Toutes nos tentatives de leur expliquer ont abouti au classique dialogue de sourds, et ce n’est jamais nous qui avons fermé la porte. Il est faux d’affirmer que nous n’avons « eu de cesse de refuser systématiquement toutes les propositions ». Ces propositions n’ont jamais été qu’une : quitter la Bourse du travail sans autre contre-partie que d’aller occuper ailleurs une autre « cible » jamais définie.
La Ca accuse encore l’occupation d’avoir « entraîné le Csp 75 dans l’isolement ». Et elle mentionne à ce propos « les autres collectifs, les associations et les syndicats ». Ce paragraphe (ainsi que le titre du communiqué) est révélateur du style et du bien-fondé des propos de la Ca. Celle-ci ne sait même pas de qui elle parle. Elle appelle la Csp 75 « le » Csp 75. Ce n’est pas une erreur matérielle. Dans ce même paragraphe, il est écrit expressément « ce collectif ». La Ca ignore que « Csp 75 » veut dire « coordination des sans-papiers 75 », que celle-ci est formée de quatre importants collectifs parisiens. Elle ignore qu’elle se trouve en face de la plus importante expression parisienne concernant les sans-papiers. Ceci étant, comment peut-elle prétendre juger de son « isolement » ? Ce prétendu isolement, vrai pour la plupart des associations plus ou moins inféodées aux syndicats et à la Cgt en particulier, est faux concernant « les collectifs ».
Quels collectifs ? Le neuvième ? expulsé manu militari de la Bourse du travail, il y a deux ans, par cette même Ca et ces mêmes « organisations syndicales » ? Droit devant ? (le collectif est à distinguer de l’association) qui a été souvent, depuis l’occupation, à nos côtés dans les manifestations et dans les réunions des sans-papiers ? Alif ? qui a été à nos côtés pendant toutes les réunions des collectifs de sans-papiers de l’été et de l’automne, qui a été, avec nous, l’organisatrice de la manifestation pour l’anniversaire de Saint-Bernard, et avec qui, s’il y a eu rupture au mois d’octobre, c’est à cause de son anti-syndicalisme viscéral ? Les sans-papiers grévistes ? la Ca ignore-t-elle donc que, par exemple, encore tout récemment (pour la grande manifestation syndicale du 29 janvier) nous avons fait et distribué un tract commun avec les grévistes de « Perfect Intérim », grève lancée par la Cgt ?
En parlant de notre « isolement », la Ca ne parle en réalité que d’elle-même et des « organisations syndicales ». Voilà tout l’isolement dont nous souffrons : le choix que ces organisations ont fait face à la politique gouvernementale d’immigration. La situation dont la Ca se plaint, cette gêne causée par une occupation qui dure depuis bientôt dix mois, ce sont les syndicats qui en portent la responsabilité première. Au lieu de s’ouvrir à nos doléances et à nos raisons, de chercher avec nous les moyens d’appuyer notre lutte, qui est la lutte de tous les sans-papiers, au lieu de chercher à comprendre pourquoi il fallait changer de cap face à la politique gouvernementale, ils se sont enfermés dans leurs positions préconçues et dans le mutisme, choisissant délibérément de laisser pourrir l’occupation, dans la conviction que la fatigue nous ferait enfin renoncer. Le communiqué de la Ca laisse présager (ce qui nous est confirmé par plusieurs bonnes sources) qu’ils vont procéder à l’expulsion, en l’habillant sans doute du manteau de la nécessité pour des raisons de « sécurité ». Si tel est le cas, les syndicats prendraient sur eux une lourde responsabilité historique. Quant à notre lutte particulière, elle en resterait comme un symbole, lourd de sens pour les luttes à venir. En accord avec l’orientation actuelle du capitalisme mondial, et, pour ce qui est de la France, avec la ligne du gouvernement en place, ils apporteraient leur contribution à la création de vastes bas-fonds du travail : composés de travailleurs salariés sans droits véritables et sans droit de cité même dans les syndicats. Ils les opposeraient fondamentalement, par là, au reste des travailleurs.
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Occupation de la Bourse du travail de Paris par le Csp 75
Communiqué de la commission administrative* de la Bourse du travail de Paris, réunie en séance plénière le 5 février 2009
Depuis plus d’un an, les organisations syndicales agissent pour la régularisation des salariés sans-papiers. Ces actions conduisent à des succès et à de nombreuses régularisations.
Dans ce contexte, la décision du Csp 75 d’investir par la force et d’occuper la Bourse du travail de Paris est incompréhensible. En effet, en choisissant, le 2 mai 2008, d’occuper l’annexe Varlin de la Bourse du travail de Paris, ce collectif paralyse ce bâtiment qui est un outil indispensable à la défense des salariés et à l’activité des syndicats. Ce collectif se trompe de cible car paradoxalement, patronat et gouvernement sont totalement épargnés par cette action, alors que ces salariés précarisés sans papiers sont « utilisés » par les employeurs pour tirer tous les acquis sociaux vers le bas, casser le code du travail et les conventions collectives. Cette occupation de la Bourse du travail de Paris est désapprouvée par les autres collectifs, les associations et les syndicats. Cette forme d’action totalement inefficace et contre productive a entraîné le Csp 75 dans l’isolement.
Cette occupation, empêche le fonctionnement normal des syndicats parisiens : Cgt, Cfdt, Fo, Cftc, Cgc, Unsa, Solidaires, qui ne peuvent plus accéder aux salles de réunions et aux services de ce bâtiment.
De fait :
Depuis le 2 mai 2008, 7 salles de réunions sont neutralisées, plus de 1800 réunions ont été annulées ; tous les jours, c’est l’équivalent de 300 salariés qui ne peuvent se réunir pour organiser leurs luttes ; de nombreux congrès ont été reportés du fait que la plus grande salle disponible à Paris pour les salariés (salle Eugène Hénaff), est inutilisable car occupée.
Les formations syndicales ne peuvent plus se tenir,
deux imprimeries syndicales ne peuvent fonctionner normalement,
des permanences de défenses juridiques des salariés ne peuvent plus se tenir.
Empêcher les salariés de se défendre et neutraliser l’activité des syndicats, n’est pas acceptable.
De plus, cette occupation pose des problèmes d’hygiène et surtout de sécurité. En effet, les bâtiments sont constitués de salles de réunions et bureaux qui ne sont absolument pas prévus pour une occupation nuit et jour avec présence de matelas, de bouteilles de gaz et de plusieurs cuisines improvisées. Plus grave, les couloirs, escaliers et issues de secours sont condamnés et occupés faisant courir un risque catastrophique à tous en interdisant l’évacuation en cas de nécessité.
Enfin, cette occupation a aussi eu pour conséquence l’arrêt immédiat et total du gros chantier « câblage » de l’immeuble avec comme résultat, la fin de missions et la mise au chômage de salariés de l’entreprise intervenante.
Malgré ce contexte, les syndicats, avec de nombreux collectifs et associations, n’ont pas ménagé leurs efforts depuis un an pour proposer aux responsables du Csp 75 de travailler ensemble les dossiers de régularisation. Force est de constater que ceux-ci n’ont eu de cesse de refuser systématiquement toutes les propositions qui ont été faites, préférant s’enfermer dans une occupation sans issue qui pénalise les salariés et leurs syndicats.
Dans ce contexte, l’outil « Bourse du travail » doit redevenir disponible pour les salariés afin qu’ils puissent se défendre, avec leurs syndicats, contre tous les mauvais coups.
Le secrétaire général de la Ca de la Bourse du travail de Paris.
(*) la Bourse du Travail de Paris est gérée par une commission administrative composée des organisations syndicales départementales Cfdt, Cgt, Fo, Cftc, Cfe-Cgc, Unsa, Solidaires. [Note originale]
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Lettre ouverte à la Cgt
Françoise Carrasse et son mari sont un couple de soutiens bien connus sur différents lieux d’occupation de sans-papiers, tels que Fabio Lucci, le resto de la Jatte, etc. Lorsqu’ils ont appris qu’il y avait aussi une occupation à la Bourse du travail, ils y sont passés. C’était début mai, et ils n’ont plus cessé depuis. Chacun de leurs passages est une fête pour les occupants, car c’est toujours une pleine voiture de bons vivres qui vient avec. Quand Françoise a su de l’expulsion annoncée, elle a écrit cette lettre ouverte, dont voici des extraits.
Des bruits courent de nouveau sur une imminente expulsion par la Cgt des sans-papiers qui occupent la Bourse du travail rue Charlot. La Cgt n’aurait-elle toujours pas compris que :
1) La Bourse du travail appartient à tous les travailleurs (avec ou sans papiers). Les occupants de la Bourse sont eux aussi des travailleurs : ils n’ont pas vécu toutes ces années en France « d’amour et d’eau fraîche » et encore moins « d’allocations versées par l’État ». […]
2) Que la Cgt aurait beaucoup […] à perdre à procéder à cette expulsion […], alors qu’elle se déclare « défenseur des sans-papiers ». […] La Cgt dit que cette occupation l’empêche d’organiser des réunions […]. N’est-ce pas plutôt pour ne pas laisser voir dans quelles conditions [les sans-papiers] vivent et surtout pour que les participants à ces réunions ne soient pas tentés de décider de soutenir ces sans-papiers de la Bourse ? […] Les sans-papiers qui occupent la Bourse actuellement sont des travailleurs qui ne travaillent pas pour de grosses entreprises mais pour des particuliers ou de très petites entreprises dont ils sont souvent les seuls salariés et généralement pas déclarés. La Cgt préfère-t-elle les grosses sociétés ou des entreprises ayant pignon sur rue (ex : le resto de la Jatte) ? […] Je sais que les cégétistes ne sont pas tous d’accord et sont loin de comprendre les décisions de leurs dirigeants. […] Alors que le combat des sans-papiers est commun sur bien des points avec la lutte des ouvriers français, […] la Cgt rentre dans le jeu de la division que le gouvernement ne cesse de semer. Si La Cgt procédait à l’expulsion des sans-papiers de la Bourse du travail, bon nombre de cégétistes et de sympathisants lâcheraient ce syndicat qui contredit ses propres paroles par ses actes et se montrerait là particulièrement complice de ce gouvernement. La Cgt perdrait là toute crédibilité.
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Coordination nationale des sans-papiers, 15 février 2009
Sur la présence des sans-papiers de la Csp 75 à la Bourse du travail de Paris
Lettre aux syndicats Cfdt, Cgt, Fo, Cftc, Cfe-Cgc, Unsa, Solidaires et à la Ca de la Bourse du travail
La Cnsp a lu avec beaucoup d’inquiétude votre communiqué en date du 5 février 2009.
La Cnsp ainsi que tous les travailleurs sans-papiers et, nous en sommes certains, la Csp 75 sont conscients des problèmes objectifs de fonctionnement que cause le fait que des travailleurs sans-papiers se soient réfugiés dans la Maison des travailleurs qu’est la Bourse du Travail. Ce qui inquiète dans ce communiqué :
c’est cette opposition qui apparaît entre « salariés sans-papiers » défendus par les syndicats et les sans-papiers qui sont à la Bourse du travail ;
c’est la présentation de cette présence de sans-papiers comme ayant pour but délibéré d’empêcher l’activité syndicale ;
c’est d’opposer « les salariés de l’entreprise de câblage » et les sans-papiers en les désignant comme responsables de leur « mise au chômage » ;
c’est de faire croire, comme vous l’écrivez, que leur présence à la Bourse du travail résulte du fait que « patronat et gouvernement sont totalement épargnés par cette action, alors que ces salariés précarisés sans-papiers sont "utilisés" par les employeurs pour tirer tous les acquis sociaux vers le bas, casser le code du travail et les conventions collectives » ;
c’est donc tomber dans le piège tendu par Sarkozy-Fillon de l’exclusion des collectifs de sans-papiers, voire des associations comme interlocuteurs des préfectures, et même la division des syndicats sur le dossier de cette catégorie de travailleurs victimes de patrons négriers et fraudeurs du travail clandestin.
Votre communiqué est dangereux pour les sans-papiers et pour l’ensemble des travailleurs avec ou sans papiers de ce pays, pour l’ensemble des Français et des immigrés de ce pays, parce qu’il ignore totalement le fait que si des sans-papiers ont été contraints de chercher asile dans la Maison des travailleurs, la Bourse du travail, c’est forcément :
un acte de désespoir de sans-papiers qui cherchent par tous les moyens à vivre dans la légalité ;
une demande de solidarité aux autres catégories de travailleurs ;
la conséquence de la chasse à l’homme et aux travailleurs étrangers du pouvoir sarkoziste ;
le résultat de la faiblesse collective de l’ensemble du mouvement syndical, du mouvement social que les syndicats sont chargés d’organiser, y compris les sans-papiers ;
la non transparence et la non lisibilité de l’action syndicale actuelle pour la régularisation des salariés sans-papiers, lesquels dépendent en partie des patrons, en partie de la « chance » d’être à plusieurs dans une boîte à lutter, de l’arbitraire des préfectures et du gouvernement, lesquels les assignent parfois à résidence par l’emploi, ce qui est totalement illégal, ségrégationniste et contraire au code du travail, etc.
Votre communiqué est incompréhensible, car il n’offre d’autre perspective que l’affrontement de l’ultimatum, que les travailleurs sans-papiers rentrent à la maison, et cela après la formidable grève générale du 29 janvier qui permet d’envisager un tous ensemble pour que les patrons payent leur crise.
Votre communiqué fait planer le cauchemar que les syndicats français se trompent de cible tout comme les grévistes anglais qui font grève contre l’embauche de salariés étrangers.
La Cnsp réitère sa proposition :
Réunir tous les syndicats de la Bourse du Travail, la Csp 75, toutes les associations partenaires de la lutte des sans-papiers et la Cnsp pour examiner un plan d’action commune pour créer les rapports de force nécessaires à la régularisation des sans-papiers de la Bourse du travail.
C’est possible, il faut de la volonté et de l’engagement avant que vous ne soyez amenés à poser un acte grave et irresponsable que nous payerons tous tôt ou tard. Nous restons confiants dans le sens de responsabilité du syndicalisme français.
Cette « lettre aux syndicats » est accompagnée d’une autre, que nous reproduisons aussi parce qu’elle témoigne d’un épisode révélateur du style de la Cgt en matière de sans-papiers, et notamment de collectifs de sans-papiers. Quand on pense que la Cgt est, parmi les syndicats, le plus lié à des luttes de terrain, on peut juger plus pertinemment du style du secrétaire général de la Ca de la Bourse du travail lorsqu’il décrète, de son bureau, que les « autres collectifs » désapprouvent l’action de la Csp 75. (Voir aussi, plus haut, le communiqué de celle-ci.) Francine Blanche, secrétaire confédérale Cgt, avait invité à une rencontre, le 22 janvier, sur le thème « point sur le mouvement des travailleurs(es) sans-papiers », tout le monde sauf… les collectifs de sans-papiers. Voici ce que lui a écrit la Cnsp le 20 janvier.
Aux camarades du bureau confédéral Cgt, à la camarade Francine Blanche. La Cnsp a reçu cette invitation qui ne lui [était pas] initialement destinée. La Cnsp et les Csp 59 sont victimes d’un ostracisme discriminatoire de l’État français, lequel a donné consigne aux préfectures d’exclure les Csp comme interlocuteurs auto-défenseurs des sans-papiers. Comme l’ensemble des partenaires syndicaux et associatifs le savent, la Cnsp et les Csp vivent et luttent, malgré la répression dure que les sans-papiers subissent, depuis 1996 jusque de nos jours.
La Cnsp a demandé par lettre ouverte aux partenaires syndicaux que le réexamen sur la base du critère du travail obtenu par la formidable mobilisation des sans-papiers dans des secteurs comme la restauration notamment, et l’assumation de leur responsabilité d’organisation syndicale de tous les travailleurs avec ou sans papiers, notamment la Cgt, que donc ce réexamen ne soit pas laissé à l’initiative des patrons, soit ouvert à tous (les syndicats, les associations et les Csp), que les témoignages de salariés réguliers, les promesses d’embauche, etc. soient pris en compte et que la régularisation [par le] critère du travail soit automatiquement renouvelable indépendamment du fait que l’embauche continue d’exister ou pas, etc. La Cnsp est étonnée que l’ensemble des associations soient conviées par la Cgt à une réunion pour faire le point à l’exclusion de la Cnsp et des Csp, notamment parisiens et d’Île de France.
Espérant que ce n’est qu’un oubli malencontreux, la Cnsp demande au bureau confédéral d’inviter la Cnsp et les Csp parisiens et d’Île de France.
Demande restée sans réponse.
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LE CAS PAR CAS ON N’EN VEUT PAS ! DES PAPIERS POUR TOUS !
[Sous ce slogan a paru un tract commun Csp 75/Perfect Intérim, diffusé, grâce aux ramettes fournies par des soutiens, à plusieurs milliers d’exemplaires lors de la grande manifestation syndicale du 29 janvier dernier]
Les travailleurs sans-papiers isolés qui occupent la Bourse du travail de Paris
Appellent les sans-papiers à se joindre à la manifestation du 29 Janvier !
La coordination de sans-papiers 75 réunit quatre collectifs parisiens de sans-papiers. Elle existe sous ce nom depuis l’occupation de la basilique de Saint-Denis en 2002, et de fait depuis Saint-Bernard en 1996.
En collaboration avec la Cgt, elle a participé au mouvement de grèves des travailleurs sans-papiers dès le début, en avril 2008. La grande majorité de ses adhérents sont des travailleurs sans-papiers isolés. Ils travaillent le plus souvent dans de toutes petites boîtes ou dans des boîtes n’occupant qu’un ou deux sans-papiers, ou encore pour de petites et moyennes agences d’intérim. Leur isolement les met dans une situation de faiblesse extrême face au patron. Cette situation est largement dominante dans le travail des sans-papiers, et les travailleurs qui adhèrent à la Csp 75, et qui occupent la Bourse du travail depuis maintenant neuf mois, sont un échantillon très représentatif des conditions dans lesquelles ce travail, grâce aux dispositions légales en application, s’exerce en France.
« Régularisation par le travail ». Dès le lancement de ce mot d’ordre syndical, les sans-papiers de la coordination 75 ont cru à la volonté franche de la Cgt, ils ont cru au commencement véritable de la régularisation de tous les sans-papiers travailleurs, de pratiquement tous les sans-papiers de France. Ils se sont dit : « Nous aussi on est des travailleurs, notre droit aussi est d’être régularisés. »
Forts de cette logique d’égalité de droits syndicaux, dès le mois d’avril, dans plusieurs réunions avec l’Ud-Cgt, ils lui ont demandé fermement de prendre en charge leurs dossiers, tout comme ceux des travailleurs sans-papiers grévistes. Face au refus du syndicat, la décision fut prise d’occuper la Bourse du travail, la maison de tous les travailleurs : lieu ami d’où faire partir un grand mouvement de solidarité, à l’instar de ce qui se passa à l’occupation de l’église Saint-Bernard. Depuis, l’occupation s’est organisée d’une manière entièrement autonome. Depuis, les sans-papiers de la Bourse du travail avancent, au nom de tous les sans-papiers de France, ce principe d’organisation et d’action : le mouvement des sans-papiers ne pourra se faire que par les sans-papiers eux-mêmes.
La régularisation des travailleurs sans-papiers doit cesser d’être un mot d’ordre syndical qui concerne quelques milliers de travailleurs privilégiés (« immigration choisie »). Elle doit être le fait de tous les travailleurs sans-papiers. C’est-à-dire de tous les sans-papiers de France, puisque tous, d’une manière ou d’une autre, travaillent. Puisque c’est sur l’exploitation de leur travail que se basent bien des fortunes, de ce pays et d’ailleurs.
Coordination des sans-papiers 75
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Les travailleurs intérimaires sans-papiers en grève de Perfect Intérim et Intérim City
Appellent les sans-papiers à se joindre à la manifestation du 29 Janvier !
Ceux qui les maintiennent dans la précarité sont les mêmes qui bloquent les salaires, licencient, cassent les services publics : soutenez la lutte des sans-papiers pour leur régularisation !
Depuis le 16 juin 2008, 34 salariés sans- papiers, intérimaires, sont en grève. Ils ont été employés depuis des années (jusqu’à 8 ans pour certains) par Perfect Intérim et Intérim City. Ils ont travaillé dans le secteur Btp pour des grands groupes comme Bouygues, Eti, De Sousa (décoration).
Ils ont participé à la construction d’édifices publics : à l’Hôpital Saint-Louis (Paris 10ème), au stade Roland Garros, au Palais de Justice de Paris, dans un des bureaux d’un ancien premier ministre rue de Varenne, et…. à Matignon !! L’un d’entre eux a mis en place des stations Velib.
Ils viennent du Mali, de Mauritanie, du Cap-Vert, pays qu’ils ont quittés pour faire vivre leurs familles.
Nous sommes en grève depuis sept mois, notre situation financière est difficile, mais notre résolution est intacte, nous sommes décidés à continuer notre mouvement jusqu’à la régularisation pour nous tous.
Nous appelons les salariés, les jeunes, les citoyens, les élus du 10ème arrondissement, de la Ville de Paris et de la Région à participer à nos différentes actions, à rejoindre les cortèges des sans-papiers le 29 janvier !
Le comité de grève des sans-papiers de Perfect Intérim 12 Boulevard Magenta, Paris 10 ème Contacts : Dabo 06 18 29 31 80 ou comite2greve.perfect@free.fr
LE CAS PAR CAS ON N’EN VEUT PAS ! DES PAPIERS POUR TOUS !
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EXPULSION ANNONCEE : LETTRES ET COMMUNIQUÉS DE SOUTIEN Syndicat CGT-Archives, 23 février 2009 Lettre à la Commission Administrative de la Bourse du travail de Paris
Copies à : Nicolas Monquaut secrétaire général de la Cgt-Culture ; Jean-Marc Canon secrétaire général de l’Ugff-Cgt ; au secrétaire général de l’Ud-Cgt 75 ; au secrétaire général de l’Ul-Cgt du 3e arrondissement de Paris ; à la coordination des sans-papiers 75 ; à la coordination nationale des sans-papiers.
Chers camarades, Le syndicat des Archives de France-Cgt a son siège dans le 3e arrondissement de Paris ; il est membre de l’Uspac-Cgt. Nous venons d’être saisis par la Coordination des sans-papiers occupant actuellement la Bourse du Travail et avons eu connaissance par ce biais de votre lettre en date du 5 février 2009. Nous ne doutons pas un instant que cette occupation a des conséquences quotidiennes dans le fonctionnement normal de la Bourse du travail. Nous connaissons également le combat que, vous comme nous, menons en défense des sans-papiers et pour leur régularisation sans conditions. C’est précisément pourquoi nous ne comprenons pas les termes de votre lettre. En effet, qui donc est responsable de la situation sinon exclusivement les employeurs et le gouvernement ? L’occupation de la Bourse du travail est assurément un geste de désespoir de la part de ces travailleurs et de leurs familles. En ce sens, quels que soient les désagréments, la Maison du Peuple qu’est la Bourse du travail doit donc être et rester pour eux aussi la Maison du Peuple. Il nous semble que la Commission administrative peut et doit expliquer cela aux salariés et usagers habituels de la Bourse et nous sommes persuadés que l’écrasante majorité d’entre eux sera solidaire des sans-papiers et d’une attitude noble de votre part consistant à continuer d’accueillir et de protéger ainsi les sans-papiers qui occupent nos locaux. Entre les difficultés, au demeurant réelles, nous en convenons, que cette situation engendre et l’avenir de ces salariés et de leurs familles, y a-t-il à choisir ?
Nous sommes tous, vous comme nous, résolument du côté de ceux à qui les patrons et Sarkozy refusent une existence digne. On dit en France : qui peut le plus peut le moins. Défendre les plus faibles d’entre-nous n’est-il pas le moyen le plus efficace de nous défendre tous ? Nous ne partageons pas vos termes selon lesquels « empêcher les salariés de se défendre et neutraliser l’activité des syndicats n’est pas acceptable ». Les sans-papiers qui occupent la Bourse n’ont nullement la volonté consciente d’empêcher les salariés de se défendre, bien à l’inverse. Qui plus est, ils sont eux-mêmes des salariés comme vous et nous et ils veulent précisément « se défendre ». Et nous devons les y aider. C’est la nature des syndicats, par définition !
Enfin, il est évident que la meilleure façon de trouver une issue à une telle situation est bien entendu l’obtention de leur régularisation. Il nous apparaît que l’unité et non la division est le seul gage de succès en la matière. Il nous faut redoubler d’efforts en ce sens. Nous sommes décidés à faire mieux et plus, à redoubler d’activité envers les pouvoirs publics, à frapper à toutes les portes afin d’arracher des papiers pour ces familles. Unissons nos efforts et nos initiatives. Nous sommes à votre disposition en ce sens.
En attendant, ensemble, protégeons-les au sein de la Bourse du travail contre toute menace d’évacuation et d’intervention de la police de Sarkozy ! Wladimir Susanj, Secrétaire général du syndicat Cgt des Archives de France
Npa Paris Centre Vers l’évacuation des sans-papiers de la Bourse du travail
[…] On peut apprécier de diverses manières l’occupation de la Bourse du travail par les comités de sans-papiers. Même si une Bourse du travail me paraît un lieu plus naturel pour accueillir des travailleurs en lutte qu’une église par exemple.
Mais le combat pour la régularisation de tous les sans-papiers est une priorité urgente. Il serait désastreux que la police, sur la demande des organisations syndicales utilisatrices de la Bourse et de la mairie (Ps) du 3ème, propriétaire des lieux, procède à l’évacuation de familles africaines. Il serait encore pire (pour les sans-papiers et pour la Cgt) que ce soit le service d’ordre de la Cgt qui se charge de cette évacuation. Une délégation du comité de Npa de Paris Centre a rencontré cet après-midi plusieurs délégués des sans-papiers. Ces derniers sont demandeurs de soutiens du mouvement ouvrier et des associations. Il est important de ne pas les laisser isolés. Tous ensemble, efforçons-nous d’éviter un scénario catastrophe. Salut et fraternité. Franck
Sôs soutien ô sans-papiers Communiqué
Certains syndicats par le biais d’un communiqué de la Commission administrative de la Bourse du travail laissent entendre qu’un front syndical et associatif serait sur le point d’expulser les sans-papiers qui occupent depuis maintenant dix mois la Bourse du travail au 85 rue Charlot à Paris. Sôs soutien ô sans-papiers considère que si cette expulsion devait avoir lieu, ce serait un coup terrible porté a l’ensemble du mouvement social. Nous appelons l’ensemble des organisations citées [dans le communiqué de la Ca], ainsi que toutes les autres à se positionner clairement sur cette expulsion et ainsi à isoler la Ca de la Bourse du travail. Les positions de certains dirigeants syndicaux sur les questions d’immigration font preuve d’un recul historique qui mène à l’impasse et ne représente pas la base. (contact : 06 98 70 33 49)
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Coordination 75 Occupation : bilan et perspectives
Tandis que l’occupation de la Bourse du travail de Paris par des travailleurs sans-papiers est officiellement menacée d’expulsion par la plus haute autorité de gestion de la Bourse, le moment semble venu pour beaucoup de se poser une simple question : quel bilan ? Ces dix mois d’une lutte souvent dure - du moins du point de vue des moyens, des tensions, des efforts humains déployés et engendrés -, d’une lutte qui a été, en dépit des intentions initiales des occupants, entièrement autonome, que laissent-ils derrière eux, si l’expulsion devait avoir lieu ? Notre journal a posé la question à Sissoko, le mieux qualifié à y répondre, en sa qualité de coordinateur et porte-parole des collectifs parisiens réunis dans la coordination des sans-papiers 75. Ses réponses se sont arrêtées sur trois aspects. D’abord, le bilan de la lutte en termes de régularisations. Ensuite, le moment particulier où l’annonce de l’expulsion intervient. Enfin, un bref aperçu de l’action proche, si l’expulsion devait se faire.
Bilan des régularisations
Pour commencer, disons que le bilan serait en tout cas positif, même sans le nombre de régularisations. La Csp 75 a gagné en termes de reconnaissance de la part de la préfecture. Avant l’occupation, on était reçus tous les trois mois. Maintenant, c’est chaque mois. En même temps, nous avons renforcé notre autonomie par rapport à toutes les organisations de soutien. C’est une conscience nouvelle qui est en train de se former, parmi nous, de notre propre force, de ce que nous pouvons faire et obtenir par notre seule organisation et volonté. Venons aux régularisations. Entre le 15 et le 22 juillet nous avons déposé environ 750 dossiers. À ce jour (26 février), plus de 110 ont été examinés et presque 90 régularisations obtenues. Il reste à peu près 400 dossiers à déposer.
C’est à partir de fin septembre que les régularisations ont commencé, en tant que résultat de l’occupation de la Bourse, je ne considère donc pas celles intervenues auparavant au cours de 2008. Au total, nous avons donc obtenu 90 régularisations sur 750 dossiers, cela fait 12 pour cent, étalées sur cinq mois. Peut-on considérer maigre ce résultat ?
Pour l’apprécier, il faut le comparer avec celui avancé par la Cgt, qui revendique le chiffre de 1500 régularisations. (En fait, en partie « bidon » ; car la Cgt compte aussi les Aps, autorisations provisoires de séjour, d’un mois à trois mois ; celles-ci ne sont pas en vérité des régularisations, il y a obligation de quitter le territoire si l’Aps n’est pas renouvelée.) Supposons que, comme l’avait fait Droit devant ! dans son calcul sur le racket d’État concernant les cotisations des sans-papiers, ceux-ci soient 400.000 (chiffre « officiel ») et qu’au moins la moitié travaillent (ce qui est loin de la réalité d’expérience ; à l’occupation de la Bourse, plus de 90 pour cent des sans-papiers travaillent), cela ne fait que 0,75 pour cent de « régularisations par le travail », et ce… sur plus d’un an ! (Sur plus de trois fois cinq mois : les occupations de Métal Europe, de Buffalo Grill, de Paris Store etc., remontent à 2007.)
Nous ne sommes qu’une petite coordination de collectifs de sans-papiers, comparée au plus puissant syndicat des travailleurs de France. Celui-ci parle, s’agissant de nous, de « mauvaise méthode ». Quelle est la « bonne méthode » ? C’est notre petite lutte, comparée à la « régularisation par le travail » de ce syndicat, qui est seule payante !
Le choix du moment
Le communiqué de la commission administrative de la Bourse du travail est d’autant plus étonnant qu’il intervient pendant que, depuis deux mois, une médiation est en cours par les soins du haut Conseil des Maliens de France. Cette médiation n’était pas, le 5 février, quand le communiqué est tombé, à un point mort ; au contraire, elle était en train de rapprocher les deux parties.
Arrivant au beau milieu de cela, ce communiqué nous semble marquer, tout au moins, un manque de respect envers ces médiateurs qui se sont impliqués sincèrement et positivement tout en gardant une position d’équidistance entre les deux parties.
Ou sinon, s’il y a une logique à cela, on peut se demander si ce communiqué n’est pas une tentative de pression sur la Csp 75, pour nous pousser à accepter des propositions sur lesquelles nous ne sommes d’accord qu’en partie, et parce que, de notre côté, nous sommes en train d’en formuler d’autres ou d’apporter des amendements aux leurs. Ou encore on peut se demander : est-ce que les syndicats auraient peur des résultats de notre lutte, confrontés aux leurs ? C’est que, comme par hasard, ce communiqué est tombé juste au moment où nous sommes en train d’arracher de plus en plus de régularisations en préfecture.
Quelques perspectives
Admettons le pire des cas. Que l’on procède vraiment à l’expulsion. Le bilan positif de notre lutte est là pour montrer que la Csp 75 a une vision des choses, concernant les luttes des sans-papiers, plus large que les syndicats. Ceux-ci, s’ils s’en prennent à nous, comme le communiqué de la Ca menace de faire, apparaîtront liés exclusivement à la « régularisation par le travail » dans le cadre de la législation existante. Ils apparaîtront avoir fait le choix de ne pas vouloir la changer dans le sens de la régularisation de tous les sans-papiers. Et cela, pour ce qui est de la Cgt, est encore plus grave, parce qu’en opposition diamétrale avec les décisions en vigueur de son Congrès. Avec ou sans expulsion, la Csp 75 continuera de se battre pour obtenir la régularisation, d’abord de tous nos sans-papiers et aussi de ceux dont les 400 dossiers restent à déposer, et, ensuite, et d’une manière plus large, pour la régularisation de tous les sans-papiers de France. Notre mot pour les initiatives à venir continue donc à être le même : la lutte continue !