Dans le monde capitaliste globalisé, à la recherche de moindres coûts de production, le capital a pris en Inde ce que l’arriération des infrastructures l’autorisait à prendre sans trouver d’obstacles majeurs. C’est ainsi qu’Internet lui a permis, sans gros investissement et par la voie des ondes, d’utiliser le potentiel offert par les jeunes issus d’une classe moyenne cultivée parlant anglais. Cette exploitation couvre des secteurs variés, depuis les centres d’appel jusqu’à la recherche dans toutes les technologies. En trois ans, l’Inde est devenue un redoutable compétiteur dans la création, la transformation et la maintenance des programmes à distance. Cette activité touche tout traitement de données, la comptabilité, l’analyse financière, toute la recherche et développement depuis la pharmacie jusqu’à l’aéronautique. Une heure de travail dans ce secteur coûte trois fois moins cher qu’en Europe.
La classe moyenne indienne (200 à 300 millions de personnes, dont 4 % parlent bien l’anglais) offre un marché de 400 000 diplômés par an. Les cinq grands de l’informatique indienne Infosys, Tata, Wipro, Satyam, Cognirant recrutent chaque année 125 000 jeunes et 100 000 autres s’orientent vers des firmes plus petites. Beaucoup vont se former aux Etats-Unis, le quota annuel de 65 000 entrées offert pour cette émigration temporaire est rempli en un jour. Les 30 000 Indiens déjà fixés dans la Silicon Valley en Californie reviennent au pays.
Le système de recrutement pour une société comme Infosys est confié à des sous-traitants et traité par informatique : un million de candidats sont triés chaque année par ordinateur, 160 000 sont sélectionnés, puis, après entretien, 80 000. Les « heureux » vont être astreints à un stage de formation de dix-huit semaines dans un camp spécial ultra-perfectionné, une sorte d’hôtel quatre étoiles. Le coût total de cette sélection représente 4 % des ventes. Mais étant donné l’expansion rapide du secteur, le turn-over est de 14 % et on estime qu’en 2010 il manquera 500 000 travailleurs dans ce secteur où les entreprises mondiales délocalisent entre 5 % et 20 % de leurs effectifs mondiaux. La capitale de cette envolée économique est Bengalore, une ancienne ville de garnison britannique dans l’Etat de Karnataka (Deccan, Sud de l’Inde) passée en cinquante ans de 150 000 habitants à 7 millions. Peu importe qu’autour toute l’infrastructure ne suive pas : tout s’exporte par la voie des ondes.